Table Of ContentTHERESE DESQUEYROUX, ARCHETYPE DU HEROS
DE FRANCOIS MAURIAC
by
JAMES ALAN DAINARD
B.A., University of British Columbia, 1951.
A THESIS SUBMITTED IN PARTIAL FULFILMENT OF
THE REQUIREMENTS FOR THE DEGREE OF
MASTER OF ARTS
in the Department
of
• Romance Studies
We accept this thesis as conforming to the
required standard.
THE UNIVERSITY OF BRITISH COLUMBIA
October, 1961.
In presenting this thesis in partial fulfilment of
the requirements for an advanced degree at the University of
British Columbia, I agree that the Library shall make it freely
available for reference and study. I further agree that permission
for extensive copying of this thesis for scholarly purposes may be
granted by the Head of my Department or by his representatives.
It is understood that copying or publication of this thesis for
financial gain shall not be allowed without my written permission.
Department of / \. (Tyi\£LA-AJL^
r
The University of British Columbia,
Vancouver 8, Canada.
Date
Abstract
Cette these se propose d'etudier les personnages des
romans de Francois Mauriac, en essayant de les rattacher a
un type bien defini. A cet egard, Therese Desqueyroux
semble reunir le plus grand nombre de caracteristiques
communes a tous ces personnages,- et c'est ce qui justifie
le qualificatif d'archetype que nous utilisons dans notre
titre. En etudiant The'rese, nous la rapprocherons d'autres
personnages et, en meme temps, nous essayerons de preciser
1'attitude de Mauriac devant la condition humaine.
Les romans de Francois Mauriac sont caracteristiques
de ceux de la premiere moitie du vingtieme siecle en ce
qu'ils presentent un hdros a la recherche du sens de sa vie.
C'est un personnage complexe et contradictoire, qui se sent
depayse" meme au sein de sa famille et de son milieu; il est
conscient surtout de la solitude de sa condition. Aux
yeux du monde, il parait anormaT, monstrueux meme, a cause
de ses idees peu conventionnelles,.de ses ©motions violentes,
et de ses actes extravagants et quelquefois criminels.
Ce personnage archdtype de'Therese, ce "passionne",
est d'abord un desherite qui, sur le plan social, se trouve
incapable de rejoindre son prochain, et ainsi de trouver le
bonheur, qu'il s'agisse de la vie de famille ou des conven
tions de la socie'te dans laquelle il est ne*. II est en
tous points 1'antithese de I'homme social, qu'il meprise a
cause de la suffisance dont il fait preuve, mais qu'il
i ii
envie. en meme temps a. cause de la securite dans laquelle
il v i t.
C'est ensuite un mal aime", puisqu'il est aussi inca
pable de rejoindre son prochain sur le plan purement
individual. II ne trouve le bonheur ni dans, l'amitie
ni dans 1'amour. Au contraire, 1'amour est toujours pour
lui un echec: il souffre, ou bien il fait souffrir. En
effet, s ' il y a solidarite humaine, elle consiste surtout
en 1'influence que nous avons l'un sur 1'autre sur le
plan affectif. La cause de cette souffranee, selon
Mauriac, vient de ce que I'homme est un "egare d1amour",
qui cherche vainement a assouvir en I'homme un amour qui
ne peut s'assouvir qu'en Dieu.
C'est enfin un possede, ce personnage: les tourments
mysterieux auxquels il est en proie sont, selon Mauriac,
d'origine diabolique. C'est en effet le demon de l'indi-
vidualisme qui le pousse aux actes de destruction.
L'homme est generalement passif devant les forces interieures
qui le possedent et qui font de l ui un desherite et un mal
aime"; il l ui reste tout de meme une marge de liberte que
Mauriac essaie d'attribuer a. 1' intervention divine. Celui-
ci conclut que la seule solution pour l ui est d1accepter sa
condition comme la "croix" que Dieu l ui impose. Pour
Mauriac, tout devient clair et supportable dans la perspective
du divin; et, cependant, il n'arrive pas dans ses romans a
convaincre entierement le lecteur.
iv
TABLE DES MATIERES
Pages
Introduction 1
Chapitre Premier.
Therese Desqueyroux, archetype de
la passionnee 10
Chapitre I I.
Therese, la dcfshe'ritee 20
Chapitre I I I.
Therese, la mal aimee 47
Chapitre IV.
Therese, la possedee 89
Conclusion 138
Bibliographie 141
(Les notes se trouvent a. la f in de chaque chapitre.)
INTRODUCTION
Les critiques litteraires s'accordent depuis pas
mal de temps pour de*finir le caractere particulier du
roman de la premiere moitie" du vingtieme siecle. A vrai
dire, le roman dans sa forme moderne existait de"ja au dix-
neuvieme siecle; les noms de Stendhal, de Henry James, et
de Dostoievski suffisent a nous rappeler que le roman
traditionnel, facilement classe en roman psychologique,
roman social, ou roman regional, cessait d'indiquer la
tendance la plus representative du roman contemporain.
C'est pourtant depuis le commencement du vingtieme siecle
que le roman s'est affirme" dans ses traits proprement dits
"modernes". Frantz Kafka, Hermann Hesse, Virginia Woolf,
James Joyce, William Faulkner a 1'Stranger, et Proust,
Bernanos, Mauriac, Malraux, et Camus en France, pour n'en
nommer que quelques-uns, aussi diff€rents qu'ils soient
par le style et par leur philosophic particuliere, se
ressemhlent tous par leur maniere de de"finir le r6le du
romancier. Pour eux, il ne s'agit plus, comme dans le
roman traditionnel, d'affirmer des verites etablies,
d'adopter une attitude qui laisse supposer que
lecteur et auteur sont des hommes qui savent vivre.y
et qui e*changent quelques idees sur un point
particulierement interessant.
Au contraire, le roman le plus repr^sentatif de la premiere
moitie du vingtieme siecle met tout en question, la
signification mSme de la vie et les assises, de la realite.
2
A i n s i, ce roman prdsente une technique "de recherche plus
2
que d'affirmation". Les romanciers s'engagent lihrement
et courageusement dans un corps a corps avec les contra
dictions, l es complexitds, les ambiguites, et l es
absurdites de la condition humaine. l is n'ont pas
1'intention de presenter une explication claire et raison-
nahle de ces problemes; i ls savent une telle explication
impossible, puisqu'ils congoivent l'univers comme une
entite qui de*passe I'homme, et qui, par consequent,
de*passe la portee de 1'esprit humain. I ls veulent
simplement "que la mSme question se pose aux lecteurs qu'a
eux-m§mes". Dans cette recherche, qui consiste force'ment
dans 1'expression poetique et dramatique plut6t que dans
1'articulation intellectuelle d'une philosophie, le romancier
n'est secouru par aucun principe moral autre que la sincerite.
L'application de ce point de vue a la technique
romanesque n'aboutit pas, comme le diraient certains, a la
creation d^un monde f i c t if oti les personnages sont
completement ddnu^s d'un sens de responsabilite. S ' il
est vrai que le h^ros du roman moderne ne se ment jamais
et ne passe sous silence aucun aspect de sa personnalite,
il e st e"galement vrai qu'il ne se cache pas ses responsa-
b i l i t e s, m§me et surtout s ' il a enfreint l es codes sociaux.
Car, d'apres le jugement de ces romanciers, enfreindre l es
codes sociaux, c'est refuser de jouer la comedie, c'est
cesser d'etre "un homme honorable", c'est consentir a.
faire face a "la tragique realite qui est au fond de la
condition humaine". ^ En effet, pour l'individu, enfreindre
les codes sociaux, ce n'est pas abuser de sa liberte,
c'est plut8t reconnaitre sa responsabilite', en tant
qu'homme libre, "de ne rien laisser e*chapper de toutes
les realite*s de l'homme, et, ainsi, "d1accroitre la zone
des terres inconnues qui sollicite critiques, historiens,
romanciers".
Le roman n'est plus un spectacle pre*sente du dehors
par un temoin plus ou moins desinte'resse'; le romancier et
son heros s'embarquent plutot ensemble dans une aventure
de recherche et d'enquete dont ni l'un ni 1'autre ne sait
d'avance le denouement. Ce qui distingue le romancier de
ses personnages,' c'est 1'objectivity dont jouit n'importe
quel e*tre humain a l'e*gard d'un autre. Mais le romancier
n'essaie pas d'expliquer son personnage dans sa totalite";
il veut que sa creature et que les situations qu'il a
inventees restent complexes et sans explication evidente.
II ne pretend pas resoudre tout seul des problemes qui sont
universels. II se contente de nous faire pe"ne*trer dans
la conscience de son heros; et la, fraternellement, mais
le plus lucidement possible, il poursuit jusqu'au bout
son examen des conflits et des sentiments obscurs dont
l'homme est la proie. Le personnage lui-mgrne est une
crdature d'exception, douee d'une intelligence et d'une
sensibility qui la rendent capable de profiter d'un de ces
k
"defeats exemplaires de conscience".^ Ainsi, la littera-
ture romanesque de la premiere moitie* du vingtieme siecle
est peuplee de ces figures qui hantent longtemps apres
qu'on a fermi le roman, figures qui doivent leur
persistance surtout a leur mystere. Demian, Leopold
Bloom, Swann, Clarissa Dalloway, Mouchette, Meursault, et
plus re'eemment, Querry, sont, pour le lecteur de romans,
comme des Stres vivants et presque comme des freres,
puisqu'ils l'e*clairent sur lui-meme autant que sur leur
propre £nigme.
Francois Mauriac, romancier, est bien de son e"poque
de par sa volonte* "d'^interroger le sens de la vie humaine
dans la mesure ou ce sens ddpasse les notions de la
8
morale commune". Comme ses peres spirituels et ses
contemporains, il.invite le lecteur a entrer dans un monde
"ou la claire raison de I'homme s'dteint",^ et ou I'homme
est mis a nu devant les forces, en l ui et hors de lui,
qui le tourmentent et qui le rendent miserable. S i,
Mauriac, catholique de naissance, considere la tragique
rcfalitd qui est au fond de la condition humaine comme le
symbole chre*tien de la Croix, il n'en reste pas moins
vrai qu'il pose dans ses romans les m6mes questions
angoisse*es que les e'erivains qui ne sont pas chre*tiens.
Par exemple, la phrase tiree des Mouches de Sartre, qui
va droit au coeur dealapiece, pourrait servir dgalement de
citation liminaire a toute l'oeuvre romanesque de Mauriac:
Description:du v r a i moi; a. son a v i s , Therese parle en paradoxes: Ce n'est pas malin d'avoir de 1' trouvent un icho dans tous l e s autres romans de