Table Of ContentCENTREDERECHERCHESD'HISTOIREANCIENNE
Volume 29
MYTHE ET
CONTRADICTION
ANALYSEDELAVileOLYMPIQUEDEPINDARE
ANNALES LITTeRAIRESDEL'UNIVERSITeDEBESANÇON,230
LESBELLESLETTRES95,BOULEVARDRASPAIL, PARIS VIC
Il Ya certainsvers -parfois des poèmes entiers·moi·même je ne sais pas ce
qu'ils veulent dire. Ce queje ne saispasme retientencore.Ettoi tuasraison
d'interroger.Nem'interroge pas.Jete disquejenesaispas.
YannisRitsos, Expl:cationnécessaire.
INTRODUCTION
Depuis certains travaux illustres,mytheetstructureparaissentirrévoca
blementliés,etilestvraique touteétudemythologiquesérieusedoitaujourd'
hui prendre en compte les acquisde laméthodestructuraliste.Cependant,en
prenant pour thème les rapports entre mythe et contradiction, ce livre peut
semblers'inscriredansune autre perspective.Eneffet,dialectiqueetstructure
passent pour s'exclure mutuellement, et, en outre, plusieurs tentatives pour
éla'.:>orer une théorie de synthèse se sont révélées peu convaincantes. Aussi
notre propos n'est-il pas de proposer un nouveau compromis entre les deux
méthodes d'approche, préalablement érigées en philosophies. Notre objectif
est à la fois plus modeste et plus concret. Depuis longtemps,il est apparu
qu'il était impossible de mettre en évidence l'armature logique d'un mythe
.en faisant abstraction de ce qu'on a appelé la diachronie -nous dirions plus
volontiers: l'Histoire -, opposée à la synchronie, où la méthode structura
liste se révèle si féconde. Mais,le plus souvent, l'Histoire est conçue comme
emironnement spatio-temporel. Elle n'intervient donc qu'a posteriori, et,
pourlemythologue,latâcheconsistealors à examinercommentunestructure
s'inscrit dans un temps et dans un lieu particulier. Pour notre part, notre
objectifest de mettre en évidence les multiplescontradictionsquicondition
nent la production du discours, de montrer comment de la contradiction
s'opèrelastructure.Onpourraitapparemmentdire quecequiest àl'ordinaire
le point d'arrivée - l'Histoire -, est pour nous le point de départ. En fait,
comme onle verra,leschosessont pluscomplexes,etils'effectueun constant
va-et·vient entre l'analyse dialectique et l'étude d'une structure, qui est elle
même sans cesse reprise et enrichie à mesure qu'est mis en évidence l'extra
ordinairekaléidoscopequeconstituel'universmythologique.
Nos mythes de référence sont tirés d'une ode de Pindare, la VIIO
Olympique. C'est donc le mondehelléniqueduVOsiècleav.J.-C.,celuidela
grandeur d'Athènes comme chacun sait, qui a conditionné leur élaboration.
Ilva de soi quelecadredel'ode triomphale,poèmelyriquedédié àun aristo
crate vainqueur dans un desgrandsjeuxdelaGrèce,nesauraitjustementêtre
assimilé à celui de latragédie,athénienneetdémocratique parexcellence(l).
C'est dire que l'étude du rapport entre ''J'auteur'' et son "public" nesaurait
être négligée, puisque ce que d'aucuns appellent "le lieu d'où l'on parle"
intervient directement dans l'élaboration-méme des mythes. Mais tout de
10 Mytheetcontradiction
méme, pourquoi la Grêce ? Et pourquoi Pindare?Surle premierpoint,ilest
aisé de répondre que la Grèce du VO siècle relève incontestablement du
champ d'applicationdesétudeshistoriques,etqu'elle diffèredoncdessociétés
d'Amérique du Sud ou d'Océanie, dont on considère, à tort ou à raison,
qu'elles n'ont pas d'histoire. Mais ce siècle voyait pourtantencorefleurirdes
mythes, au sens habituel du terme, et, en ce sens, on peut dire que le VO
siècle, en Grèce,est un siècle charnière. Quant au second point, ilnoussem·
blait que la complexité etlaréputation d'hermétismedesmythespindariques
pouvait permettre la mise à l'epreuve de la méthode que nous élaborions.
En effet, le surnom que les Anciens donnaient à Héraclite, "l'obscur"
(ho skoteinos), pourrait tout aussi bien s'appliquer à Pindare. Les scholies
montrent que, dès l'Antiquité, les odes pindariques souffrirent d'une multi
tude d'incompréhensions,quisouventendénaturaientlesens.DepuisleXIXo
siècle,des étudessavantes,ennombreparticulièrementimportant,ontpermis
de débrouilleruncertainnombre de difficultés.On n'oseraitplusaujourd'hui,
comme le faisait Voltaire,parler du "galimatias pindarique". Pourtant,bien
des obscurités subsistent encore, ne serait-ce que dans la lettre du texte, qui
oblitèrent la compréhension d'un grand nombre d'épinicies. Ainsi, la VIlo
Olympique. unanimement considérée comme l'un des chefs4'œuvre de
Pindare,est néanmoins l'une des odes où l'on rencontre leplusdedifficultés
detraductionetd'interprétation.
Composée en 464av.J. -Co(2)enl'honneurde l'EratideDiagorasetde
sa patrie,Rhodes, cette odecomprendtroismythes.Soncaractèreparticulier
viendrait de cequenullepartailleursPindaren'auraitautantinsistésurle rôle
de l'erreur. En effet, Tlépoléme, ms d'Héraclès, tue l'oncle de sa mère,
Licyrnnios, dans un accès de colère, et reçoit pourtant des honneurs divins
après sa mort. Les enfants d'Hélios, le dieu solaire, montent sur l'acropole
pour y sacrifierà Zeusetà Athéna :maisilsoublientd'emporterla "semence
de la flamme" (spenna phlogos),et instituent un sacrifice sans feu. Ils sont
néanmoins comblés de bienfaits et d'honneursparZeusetsafille.C'estenfin
Hélios,absentlorsdupartagedelaTerreentrelesOlympiens,qui,nonobstant,
obtient comme lot l'ne de Rhodes, riche et fertile. Ainsi, paradoxalement,
trois fautes seraient devenues causes de félicité. En fait, A. Puech suggérait
déjà que cette explication était sans doute insuffisante, et reconnaissait que
"si l'on se soustrait difficilement à l'impressionquelechoixdestroismythes
associésparunmémecaractère .etparuncaractèreassezsingulier-apuavoir
quelque raisonsecrète,ilfait avouerqu'ici,commeend'autrescassansdoute,
cetteraisonnouséchappe"(3).
Tel est précisément l'objectifde notre recherche :trouver les "raisons
secrètes" qui expliquent l'association des trois mythes,afin de pouvoirjuger
de la validité de la théorie des "trois fautes", paradoxalement suivies de
récompense. Pour en arriver là,il faut d'abord étudierles trois mythessépa·
rément. D'une part, on doit restituer à chacun sa logique propre. Ainsi,
par exemple,on doit se demander si,effectivement,iln'existeaucunejustifi·
cation particulière au cadeau offert par lesHéliadesaprèslesacrifice sansfeu
qu'ils ont offert à Zeus et à Athéna. N'y a·t-il pas là en réalitéunenchaîne
ment parfaitement logique ? Une réponse positive équivaudrait donc à lever
le paradoxe de la récompense "imméritée". D'autre part,etparallèlement,la
méthode employée consiste à mettreenévidencelesprocéduresjuridiquesou
rituellesauxquelles renvoient les imagesdelaVIIo01. :celledupartagedela
terre parles dieux, celle de l'attribution deRhodesàHélios,ouencore,dans
Introduction 11
le prologue, celle de la coupe offerte au jeune fiancé.etc. C'est au prix de
cette double analyse de la logique du récit et des images employées qu'ilest
possible de lever définitivement le paradoxedestroisfautes suiviesde récom
pense,et derestituerpeu àpeulalogiquecomplexedel'ensemblede l'œuvre.
Ces analyses permettent donc de rendre compte de l'agencement et de la
signification globale des trois mythes, mais aussi de maintdétail quiresterait
inexplicable si l'on s'en tenait à l'étude séparée de chacun des trois récits.
Ajoutons que, pour mener à bien ces investigations,nous avons daprocéder
à une série de mises au point de traduction, et nous livrerà uncertainnom
bre d'analyses proprement historiques. Dans cette optique, également, si la
VIIO 01. a été pour nousle textede référencequenousnoussommesefforcé
d'étudier dans le détail . sans prétendre à une illusoire exhaustivité ., nous
avons été amené à prendre en considération une série d'autres odes,si bien
que,leplussouvent,notre proposs'élargitàl'ensemblede l'œuvredePindare.
A vraidire,d'aucunssedemandentsilerésultatestbien àlamesure des
efforts consentis pour éclairer les difficultés du texte : "Quelle que soit la
naiveté de sa pensée, (pindare) se montre siobscurquedesgrammairiensont
passé leur existence à débrouiller ses constructions plus contournées encore
que celle deslanguesteutoniques,pourn'enextrairefinalementqu'unemasse
de sonoresplatitudes"(4). Bref,pourreprendre lemotd'O. Wilde,Pindarene
serait qu'un "sphinx sans secrets!" Cette visiondeschosesnousparaitradica·
lement erronée. Certes, les épinicies sont des œuvres de circonstance. Mais
l'intérêt du discours pindarique tient précisément au dépassement de ces
contingences immédiates. Alors que, selon certains,il n'est question que de
chanter leslouanges du riche aristocrate commanditaire,en agrémentant cet
é:loge de quelque récit mythologique plus ou moins fantaisiste, le propos de
Pindare se situe en fait au cœur des antagonismes delasociétédu temps,des
contradictions relatives à la terre et à son appropriation, à l'échange, à la
monnaie,auconflitsentreoligarquesetdémocrates,etc.
En outre, un décryptage approprié révèle, sous les formules d'apparence
banale,la matrice fondamentale qui conditionnelediscoursetlemondeima
ginaire qu'il crée. Jointes aux analyses sur la contradiction,ces observations
redonnent aux odes pindariques leur véritable dimension.C'estbienlamulti
tude des résonances de l'œuvre qui fait sa richesse,etquipermetd'expliquer
la faveur dont Pindarejouissait dès l'Antiquité. Faute de les percevoir,onse
condamne à affirmer que les œuvres du poète thébain ne renfermentqu'une
"masse de sonores platitudes", et on laisse échapper l'essentiel. Le grand
nombre de perspectives ouvertes par le discours pindarique adonccontribué
à rendre possible l'établissement d'un bilan théorique sur les rapports entre
mytheetcontradiction,quiclôtcetouvrage.
Nous avons pris comme référence pour la VIIo Olympiquel'éditionde
Br. Snell (5). Il est apparu indispensable de donner une nouvelle traduction
de ce texte, car, surbon nombrede points,nousnoustrouvionsendésaccord
avec les interprétations proposées précédemment,entre autresavecla traduc
tion de A. Puech. Cela ne signifie pas,bien au contraire,que nous n'ayons
aucune dette à l'égard de nosdevanciers,deA.Puechenparticulier,puisque,
en plusieurs occasions, ses notes et son commentaire indiquaient déjà la
bonnedirectionde recherche.C'estdumoinscequenousparaissentconfumer
nospropresanalyses(6).
12 Mytheetcontradiction
Notesdel'introduction:
1: Sur ce point, voir J.-P. Vernant et P. Vidal-Naquet,Mythe et tragédie en Grèce
ancienne.
2: L'ode fut composée en la 790 Olympiade. Cf. scholies Vllo 01., introduction.
3: Cf. Pindare] Olympiques, éd. trad. A. Puech, Les Belles Lettres, Coll. Univ. de
France,20ed.,Paris,1931,noticeintroductiveàlaVllo01.,p.91.
4: W.Durrant,Histoiredelacivilisation,trad.fr., V,Lausanne,1962,p.228.
5: Br.Snell,Pindaricarminacumfragmentis, Leipzig,50éd.,1-11, 1971-1975.
Néanmoins, les références aux autres odeset fragments pindariquessont données
dans l'édition de A. Puech, plus accessible au public français. Les scholies aux
œuvres de Pindare sont toujours tirées de l'ouvrage de A. B. Drachmann,Scholia
veterainPindariCarmina,1-III,Leipzig,1903-1927.
6: Les premiers chapitres de cet ouvrage ont constitué une thèse pour le Doctorat
de 30 cycle, soutenue àBesançon enjuin 1977. Nous remercions les membres du
jury, M. les Professeurs P. Levêque, F. Vianet P.Briant pourtouteslesremarques
qu'ils ont bien voulu nous faire. En outre, nous tenons à exprimertoutparticuliè
rementnotregratitudeàP.Briant, quiarelulespar~aphes consacrésàlamonnaie,
ainsi qu'à P. Levêqueet M. Hugounenq-Bresson, qw nous ont fait partsi souvent
deleursobservations.
TRADUCTION
VIIoOLYMPIQUE
PourDiagorasdeRhodes,
pugiliste
1
Comme on prendrait, tendue par une main généreuse, une coupe
bouillonnant de rosée de vigne,pièce d'or massifdelaplushautevaleur,
pour la donner, après avoir buàlasanté desamaison,àunjeunefiancé,
6 afinderehausserl'éclatdubanquetetdesurcroîtd'honorersaparentéen
la faisant envier des amis présents pour un mariage si bien accordé,
moi aussi j'apporte un fluide nectar, don des muses, doux fruit de
l'esprit, aux mâles vainqueurs chargés des prix conquis à Olympie et à
10 Pythô,etj'implore pour euxla faveur divine. Bienheureuxceluiqu'envi
ronne une renommée glorieuse. Le regard de la grâce vivifiante se pose
tour à tour sur l'un et sur l'autre, au double accompagnement de la
phorminxauxsonsmélodieuxetduconcertdesflûtes.
Ainsi aujourd'hui, à leurs accords, j'ai abordé avec Diagoras, etje
suis venu chanterla fille marine d'Aphrodite, l'épouse d'Hélios,auxfins
de louerl'hommeextraordinaire,lecombattantallantdroitàl'adversaire
15 qui a remporté la couronne comme prix du pugilat près de l'Alphée et
aussi de Castalie, ainsi que son père Damagétos, agréable à Dikè : fis
habitentparmilesguerriersargiensl'neauxtroiscités,prochedel'éperon
queprojettel'immenseAsie.
II
20 Je veux -encommençantàl'origine,avec TIépolème -redres.~rdan!!
mon message l'histoire quileurestpropre,àeux,laforte raced'Héraclès.
Pourl'ascendancepaternelle,ilsseflattent deremonterà Zeus,et,Amyn
torides, à Astydamie pourl'ascendance maternelle. Mais sur l'esprit des
25 hommes planent les fautes innombrables,et il est impossible de trouver
14 Mythe etcontradiction
ce qui serait à la fois favorable dansl'immédiatetheureuxdansson
issue. Ainsi, dans un accès de colère, celui qui fut le colonisateur de ce
30 pays frappa de son sceptre d'olivier dur Licymnios, le frère bâtard
d'Alcmène, venu du palais de Midéa, et il le tua. Le trouble de l'esprit
égaremémelesage.Ilallaauprèsdudieuetconsultal'oracle.
Le dieu aux cheveux d'or, de sonsanctuaireembaumé,luiprescrivit
une traversée directe avec ses vaisseaux depuis le promontoire de Lerne
jusqu'au domaine entouré par la mer, là où,autrefois,le grand roi des
dieux fit neiger surl'acropoledesflocons d'or,lorsque,surl'intervention
35 d'Héphaïstos muni de sa hache d'airain, Athéna jaillit du front de son
père et poussa un formidable cri de guerre. Elledonnale frisson à Oura
nos,ainsiqu'àlaTerre-Mère.
III
C'est alors que le dieu qui donne aux mortels la lumière, le ms
d'Hypérion, plein d'affection pour eux, recommanda à ses enfants de
40 prendrê soin de la tâche qu'ils se préparaient à accomplir,pourpouvoir,
les premierS,.élever àladéesseunautelbienenévidence,et,ainsi,réjouir
le cœur de la'Vierge à la lance frémissante etceluidesonpèreenfaisant
unsacrificeauguste.Le respectdeProméthéeest pourleshommessource
devigueuretdejoie.
45 Mais le nuage de l'oubli s'avance subrepticement, et il distrait de
l'esprit sa ligne deconduite.C'estainsiqu'ilsmontèrent àl'acropolesans
avoir la semence de la flamme ardente,et consacrèrent le sanctuairepar
un sacrifice sans feu. Et c'est poureuxqueZeusamenauneblondenuée
50 et fit pleuvoir de l'or en abondance, cependant que la déesse aux yeux
brillantsenpersonneleuraccordait
d'exceller dans toutes les techniques, de leurs mains d'une habileté
sans égale parmi les mortels. Leurs chemins accueillaient des œuvres qui
ressemblaient à des étres vivants se déplaçant par eux-mémes.Aussileur
gloire fut-elle immense; méme pour celui qui est compétent dans son
domaine,ce n'est que purde toute fraude quesontalentatteintsa pléni
tude. Les antiques traditions des hommes disent aussi qu'aumomentoù
55 Zeus et les Immortels se partageaient la terre, Rhodes n'était pasencore
visiblesurlesflots delamer,etquel'neétaitcachéedanslesprofondeurs
salées.
IV
Comme Hélios était absent, personne ne désigna son lot; et ils le
60 laissèrent donc sans terre, le dieu pur. Il en réclama une, et Zeus était
sur le point de faire un nouveau tirage. Mais il refusa; car, disait-il, il
voyait, quant à lui, au sein de la mer blanchissante, surgir du sol et
crottre une terre nourricière pour une multitude d'hommes et favorable
auxtroupeaux.
Il enjoignit aussitôt à Lachésisaubandeaud'ordeleverlesmains,Je
Traduction 15
65 prononcer sans arrière-pensée le grand sennentdesdieux,etdes'incliner
ensigned'assentissement àlavolontédumsdeCronos:unefoisparvenue
dans les espaces aériens resplendissants de lumière, cette terre serait
désonnais sa part d'honneur. Ces insignes paroles s'appliquèrent à la
réalité,quandlemomentfut venu.
70 L'ne naquit de l'onde marine;c'est lepèrequiprésideàla naissance
des rayons perçants, le martre des chevaux qui soufflent le feu qui la
possède. Là, un jour,il s'unit à Rhodes et engendra sept ms, dotés des
ressourcesd'espritetdutalentlesplusgrandsparmilespremiershommes.
L'un d'eux engendra, avec Ialysos leurafné,CamîrosetLindos. Ilspartao
75 gèrent en trois la terrepaternelleetchacundesoncôtéhabitalavillequi
luiétaitéchue;cesvillesportentle nomdeceluiquiy résidait.
v
C'est làqu'estdévolue à Tlépolèmeladouce rançondesadéplorable
infortune : au chef des colons tirynthiens revient la grasse fumée dell
80 bêtes solennellement sacrifiées et le jugement des Jeux. Ace concours,"
deux fois Diagoras a été couronné de fleurs; quatre fois il a connu le
succès dans l'Isthme glorieux; deux fois, l'une après l'autre, à Némée,
vainqueuraussi danslarocheuseAthènes.
L'airain d'Argos le connalt, et il en est de même desconcoursorga-
85 nisés selon la loi des Béotiens, lui qui a vaincu six fois à Pellène et à
Egine; chez les Mégariens, les tables de pierre ne donnent pas unchiffre
différent. Mais toi, Zeus Père qui veilles aux sommets de l'Atabyros,
honore le vainqueur olympique qui a obtenu l'hommage rituel de cet
hymne,
cet homme qui à coupsdepoings'estgagné une réputation;accorde
90 lui le respect bienveillant de ses concitoyens; car ilempruntesansdévier
un chemin hostileà ladémesure,explicitementinstruitde cequ'une âme
droite, issuedenoblesancêtres,luiafait savoir.Neplongepasdansl'obs
curité la descendancequileurestcommune,à euxetà Kallianax.Certes,
en l'honneur desEratides, la cité elle-même est en fête; pourtant, en un
95 seul instant,les brises peuvent souffler dans un sens, puisdansunautre.
CHAPITRE PREMIER
LA TERRE ET L'EPOUSE
Le mythe d'Hélios·onappeleraainsi,parconvention,lefragment de la
VIIo01. du v. 54au v. 76 -est situédansunautre temps,audébutdulllonde :
"Lesantiquestraditionsdeshommesdisent aussi ..." (v. 54-55). Ainsi,ilyest
question du partage de la terre par les dieux; Hélios, d'abord lésé, obtient
pourtantensuite unbienexceptionnel:l'îlede Rhodes. Enfait,ledieu solaire
obtient méme une double satisfaction. Rhodes, en effet, n'est passeulement
une île, donc une terre,un domaine, mais aussiuneépousedont lafécondité
fait écho à celle de l'île (v. 71·72 : "Là, unjour,il s'unità Rhodesetengen
dra sept ms"; v. 63 :"Uneterrenourricièrepourune multituded'hommeset
favorable aux troupeaux"). Rhodes a donc une double nature, et Je texte
passesansobstaclede l'une àl'autre.
Les analyses de ce chapitre ont deux objectifs. D'une part, il s'agit de
faire apparaitre les processus sociaux auxquels renvoient les signifiants du
discours. D'autrepart,demettreenévidencelescontradictionsquistructurent
le récit, ce qui permet de rendre compte de tel ou tel détail du mythe :le
fait qu'un personnage qu'on pourrait s'attendre à voir figurer n'apparaisse
pas, ou encore, le "choix" fait par un héros dans une circonstance donnée.
Cependant, en ce qui concerne les deux points qui viennent d'étre évoqués.
on doit préciser que l'analyse nepeut être menéejusqu'àsonterme:eneffet,
on ne saurait prétendre expliquer le mythe d'Hélios isolément, en faisant
abstraction desrelationsqu'il entretientavec lesautresmythesdela VlI0 01..
et, plus largement, avec l'ensemble de l'ode. Ce chapitre doit donc étre
considéré comme un point de départ, à la fois pour l'analyse de la VlIo 01.
danssonensemble,etpourcelledumythed'Hélioslui-méme.
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