Table Of ContentRheinisch-Westfälische Akademie der Wissenschaften
Natur-, Ingenieur-und Wirtschaftswissenschaften Vorträge · N 260
Herausgegeben von der
Rheinisch-Westfälischen Akademie der Wissenschaften
ILYA PRIGOGINE
L'Ordre par Fluctuations et le Systeme Social
JOSEF MEIXNER
Entropie einst und jetzt
Springer Fachmedien Wiesbaden GmbH
231. Sitzung am 5. Februar 1975 in Düsseldorf
© 1976 by Springer Fachmedien Wiesbaden
Ursprünglich erschienen bei Westdeutscher Verlag GmbH Opladen 1976
Gesamtherstellung: Westdeutscher Verlag GmbH
ISBN 978-3-663-00083-9 ISBN 978-3-663-00234-5 (eBook)
DOI 10.1007/978-3-663-00234-5
Inhalt
Ilya Prigogine, Bruxelles
L'Ordre par Fluctuations et le Systeme Social
Preface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1. lntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2. Thermodynamique et Structures Dissipatives . . . . . . . . . . . . . . . 11
3. Exemple de Structure Dissipative: le Modele Trimoleculaire .. 12
4. Evolution - Stabilite Structurelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
5. Applications Biologiques: 1' Agregation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
6. Insectes Sociaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
7. Formation des Structures Dissipatives - Description Stochasti-
que ................................................... 31
8. Structures Dissipatives et Systeme Social . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
Appendice: Dynamique de Population et Evolution . . . . . . . . . . . . 44
References . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 7
Josef Meixner, Aachen
Entropie einst und jetzt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
Literatur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
Diskussionsbeiträge
Professor Dr. rer. nat. Claus Müller; Professor Dr. phil. Dr. rer. nat.
h. c. Josef Meixner; Professor Dr. med. Benno Hess; Professor Dr. rer.
nat. Friedrich Schlögl; Professor Dr. rer. nat. Ottmar Knacke; Professor
Dr. Dres h. c. Ilya Prigogine ................................. 67
L'Ordre par Fluctuations et le Systeme Social*
Par Ilya Prigogine, Bruxelles**
Priface
Dans la plupart des phenomenes etudies par la physique classique,
les fluctuations jouent un röle mineur. 11 en est ainsi dans tout le domaine
de la thermodynamique classique domine par le principe d'ordre de
Boltzmann. Au contraire, les systemes non lineaires loin de l'equilibre,
introduisent des situations nouvelles dans lesquelles les fluctuations
jouent un röle central. C'est alors les fluctuations qui peuvent forcer le
systeme a quitter un etat macroscopique donne et le conduire vers un
nouvel etat a structure spatio-temporelle differente.
L'etude des structures dissipatives illustre precisement ce type de
comportement. Par opposition aux structures d'equilibre, les structures
dissipatives peuvent se former a distance suffisante de l'equilibre thermo
dynamique lorsque le fonctionnement du systeme est regi par des
equations incluant un feedback approprie.
La theorie thermodynamique des structures dissipatives sera esquissee.
Des resultats recents montrent l'importance de ces structures dans de
nombreux problemes de chimie et de biochimie. Les structures dissipa
tives conduisent a tout un eventail de dimensions caracteristiques liees
aux reactions chimiques et aux phenomenes de transport. De plus, des
exemples montrent que la formation de ces structures peut s'accompagner
de brisements de symetrie et d'apparition de formes nouvelles.
Des exemples d'instabilites lies aux structures dissipatives et empruntes
a l'etude des amibes ainsi qu'a celle des insectes sociaux (abeilles et
termites) seront presentes.
Les structures dissipatives peuvent etre considerees comme des fluc
tuations geantes, aussi leur evolution temporelle contient un element
stochastique essentiel.
* Texte redige par Monsieur J. L. Deneubourg. Ce texteestune version e1argie d'une
conference donnee au College de France en decembre 1974. Certains travaux
evoques font partie d'un programme realise avec 1'aide des ministeres belges de
l'education et de 1a culture franc;aise et neerlandaise, ainsi que du F.R.F.C. belge.
Uneversion ang1aise a paru dans Evolution and Consdousness, Human Systems in transition,
ed. E.Jantsch and C. H. Waddington, Reading,Addison-Wes1ey, 1976.
**
Ega1ement: Center for Statistica1 Mechanics and Thermodynamics, The Univer
sity of Texas at Austin, Texas 78712, U. S. A.
8 Ilya Prigogine
Un nouveau type d'equation stochastique introduit recemment par
a
Nicolis et l'auteur permet de discuter la fois les aspects deterministes
et stochastiques de ces phenomenes. En particulier, ces equations per
mettent d'etudier la nucleation d'une nouvelle structure dissipative. 11s
permettent aussi de discuter les relations entre les trois niveaux de
description indiques sur le schema
'
fonction ~ structure spatio-temporelle
/
fluctuations
L'approche consideree permet clone de discuter la maniere clont des
a
elements premiere vue opposes tels que determinisme et fluctuations
a
cooperent. 11 est interessant d'appliquer ce formalisme la description
de la structure des societes dans laquelle la dialectique masse-minorite,
suivant l'expression heureuse de F. Perroux, joue un röle essentiel.
1. lntroduction
La physique et la chimie theoriques passent actuellement par une
periode de renouveau qui resulte en particulier de l'integration du
concept de structure dans le cadre d'une physique theorique elargie et
d'une interpretation plus precise des notions d'irreversibilite et de pro
cessus.
Ces progres rendent possible un dialogue renouvele entre chercheurs
appartenant au domaine des sciences physiques et chercheurs appartenant
au domaine des sciences humaines.
La possibilite d'un tel dialogue a provoque l'inten~t general des la
premiere formulation de la science moderne au Siede de Newton et de
a
Galilee. 11 est ce propos passionnant de lire le chapitre "Generalisation
du paradigme Newtonien aux sciences de la nature et aux sciences de
l'homme" dans le remarquable ouvrage de G. Gusdorfl. Mais ce dialo
a
gue s'etait heurte des difficultes insurmontables, un trop grand fasse
separait la mecanique rationelle et l'etude des mouvements simples, des
problemes specifiques que posent la biologie ou l'histoire. Cette opposi
tion est taut particulierement marquee dans le concept temps. La mecani
que rationnelle ne connait que le temps reversible. Au contraire, la
direction du tempsjoue un röle fondamental dans les sciences biologiques
et humaines. 11 est vrai qu'au XIXe Siede, la direction du temps appa
rait egalerneut en physique et cela en relation avec le second principe
L'Ordre par Fluctuations et le Systeme Social 9
de la thermodynamique mais ici encore le cantraste est frappant entre
l'idee d'evolution en physique et celle en biologie ou en sociologie. En
physique, la croissance d'entropie exprimee par le second principe indique
a
une tendance la "desorganisation" progressive du systeme. Par contre,
l'evolution biologique ou sociale s'accompagne d'une structuration
progressive teile que celle p. ex. introduite par la division du travail.
a
Malgre de telles difficultes, les references la physique ne manquent
certes pas dans l'reuvre des specialistes des sciences humaines. Un des
entretiens de Levi-Strauss et G. Charbonnier2 s'intitule "Horloges et
a
machines vapeur" et l'excellent traite "Le systeme social" d'Henri Janne3
part du concept de "force" sociale. Ainsi le vocabulaire de la physique
classique est-il etendu au moins dans Ull sens metaphorique aux Seiences
humaines.
Auguste Comte4'5 distinguait entre sciences "analytiques" et sciences
"synthetiques". Fant partie des sciences synthetiques la biologie et la
sociologie. En effet, en biologie, il est impossible d'expliquer un organe
a
ou une fonction si on ne se refere pas l'etre vivant taut entier et cette
remarque peut etre transposee en sociologie. La consideration de la
totalite est essentielle dans les deux cas. Or, recemment, l'etude des
structures dissipatives6 a fait entrer l'etude de telles "totalites" dans le
cadre d'une thermodynamique etendue. Nous reviendrons sur ce concept
de structure dissipative dans la section 2 de ce rapport.
Rappelans seulement que la thermodynamique classique a permis
d'interpreter les structures d'equilibre, celles qui se realisent par exemple,
dans un systeme isole au baut d'un temps suffisamment lang. Un cristal
est un exemple typique de structure d'equilibre. La formation de telles
structures est dominee par le principe d'ordre de Boltzmann (qui donne
a
la populationdes differents etats energetiques dans un systeme 1' equilibre
thermodynamique). La situation change radicalement lorsqu'on con
a
sidere au lieu d'un systeme isole, un systeme ouvert pouvant echanger
la fois energie et matiere avec le milieu exterieur. Dans ce cas et pour
autant que les reservoirs externes d'energie et de matiere soient suffisam
ment grands pour resterdans unetat permanent, le systeme peut tendre
vers un regime constant autre que celui d'equilibre. C'est un etat
a
stationnaire de non-equilibre. Alors qu'un systeme isole l'equilibre
a
est associe des structures "d'equilibre" telles que le cristal que nous
a
venons de citer, un systeme ouvert "hors d'equilibre" sera associe ce
que l'on appelle des structures dissipatives. Le principe d'ordre de
Boltzmann n'est plus applicable dans ce cas. Les structures dissipatives
a
sont associees un principe d'ordre entierement different, que l'on peut
10 Ilya Prigogine
appeler "ordre par fluctuations". En effet, de telles structures prennent
naissance par amplification de fluctuations resultant d'une instabilite
de la "brauche thermodynamique".
Comme nous le verrons dans la section 2 les structures dissipatives
presentent precisement cet aspect global, cet aspect de totalite que Comte
attribuait aux objets des Seiences synthetiques.
Pour pouvoir se former, une structure dissipative exige un mecanisme
de fonctionnement non lineaire. C'est ce mecanisme qui est responsable
du mecanisme de l'amplification de la fluctuation. Les structures dissi
patives forment ainsi un pont entre Jonction et structure. On peut meme
considerer des sociologues tels que Comte, Durkheim ou Spencer comme
des precurseurs du concept de structures dissipatives. Ainsi dans sa
division du travail social Durkheim ecrit7:
"La division du travail progresse donc d'autant plus qu'il y a plus
d'individus qui sont suffisamment en contact pour pouvoir agir et
reagir les uns sur les autres. Si nous convenons d'appeler densite dynami
que ou morale ce rapprocherneut et le commerce actif qui en resulte,
nous pourrons dire que les progres de la division du travail sont en raison
directe de la densite morale ou dynamique de la societe."
La distinction entre le principe d'ordre de Boltzmann et le principe
d'ordre par fluctuations implique une difference fondamentale du röle
des fluctuations. Danstout le domaine d'application du principe d'ordre
a
de Boltzmann les fluctuations jouent un röle subordonne. Considerons
a
titre d'exemple, un volume V l'interieur duquel, se trouve N particules.
Decoupons dans le volume un element de volume L1 V (v. fig. 1.1).
Fig. 1.1
a
Nous nous attendons ce que le nombre moyen de particules fi dans
L1 V sera
fi L1 V
( 1.1)
N V