Table Of ContentМинистерство образования Республики Беларусь
УЧРЕЖДЕНИЕ ОБРАЗОВАНИЯ
«ГРОДНЕНСКИЙ ГОСУДАРСТВЕННЫЙ УНИВЕРСИТЕТ
ИМЕНИ ЯНКИ КУПАЛЫ»
И. Д. Матько
L’HISTOIRE DE LA LANGUE FRANЗAISE
LE MOYEN FRANЗAIS
LE FRANЗAIS CLASSIQUE
ИСТОРИЯ ФРАНЦУЗСКОГО ЯЗЫКА
СРЕДНЕФРАНЦУЗСКИЙ ЯЗЫК
КЛАССИЧЕСКИЙ ФРАНЦУЗСКИЙ ЯЗЫК
Пособие по курсу «История французского языка»
для студентов специальности
1-020306-04 – Французский язык. Английский язык
Гродно 2006
УДК 811.133.1
ББК 81.471.1
М35
Рецензенты: кандидат филологических наук, доцент кафедры иностранных
языков ИПО И. Г. Бурлыко;
кандидат филологических наук, доцент кафедры английской
филологии ГрГУ им. Я.Купалы И. В. Сорокина.
Учебное издание
Рекомендовано советом филологического факультета ГрГУ
Матько Ирина Дмитриевна
им. Я. Купалы
L’HISTOIRE DE LA LANGUE FRANЗAISE
LE MOYEN FRANЗAIS
Матько, И. Д.
LE FRANЗAIS CLASSIQUE
L’histoire de la langue franзaise: le moyen franзais, le franзais clas-
ИСТОРИЯ ФРАНЦУЗСКОГО ЯЗЫКА
М35sique = История французского языка: среднефранцузский язык,
СРЕДНЕФРАНЦУЗСКИЙ ЯЗЫК
классический французский язык : пособие / И. Д. Матько. – Гродно :
КЛАССИЧЕСКИЙ ФРАНЦУЗСКИЙ ЯЗЫК
ГрГУ, 2006. – 146 с.
Пособие
ISBN 985-417-805-6
Редактор И. А. Ушакова
Компьютерная верстка: Т. И.Сальникова
В пособии представлены два последних этапа формирования и развития
французского языка – среднефранцузский и классический периоды. Содержатся
сведения об основных фонетических, морфологических и синтаксических изменениях,
Сдано в набор 30.03.2006 . Подписано в печать 11.05.2006.
особое внимание уделяется их системному характеру. ×
Предназначено для студентов специальности «Французский язык. Английский Формат 60 84 / 16. Бумага офсетная.
язык». Печать RISO. Гарнитура Таймс.
Усл. печ. л. 8,37 Уч.-изд. л. 10,65 Тираж экз. Заказ
УДК 811.133.1
ББК 81.471.1
Учреждение образования «Гродненский государственный университет
имени Янки Купалы».
ЛИ № 02330/0133257 от 30.04.2004. Ул. Пушкина, 39, 230012, Гродно.
Отпечатано на технике издательского центра
Учреждения образования «Гродненский государственный университет
имени Янки Купалы».
ISBN 985-417-805-6 © Матько И. Д., 2006 ЛП № 02330/0056882 от 30.04.2004. Ул. Пушкина, 39, 230012, Гродно.
LE MOYEN FRANЗAIS (XIV – XV ss.)
TABLE DES MATIERES
L’HISTOIRE EXTERNE
Les principaux йvйnements politiques et sociaux des XIV – XV ss.
LE MOYEN FRANЗAIS (XIV – XV ss.) ......................................3
1337 – le dйbut de la guerre de Cent Ans
L’histoire externe............................................................................................3 1348–58 – la Peste noire
L’histoire interne...........................................................................................13 1358 – l’insurrection parisienne (Etienne Marcel)
1360–1380 – (sous Charles V) la reconquкte du royaume avec Du
La phonйtique..............................................................................................................13
Gueslin
La grammaire..............................................................................................................19 1378–1417 – le Grand Schisme d’Occident
Le vocabulaire.............................................................................................................36 1429–31 – Jeanne d’Arc
L’orthographe..........................................................................................43 1453 – Constantinople prise par les Turcs
1453 – la fin de la guerre de Cent Ans
L’AFFIRMATION DU FRANЗAIS:XVI s. .....................................46
1493 – la dйcouverte de l’Amerique par Christophe Colombe
L’histoire externe..........................................................................................46 1494 – la premiиre campagne d’Italie
L’histoire interne...........................................................................................79
La phonйtique.............................................................................................................79 Les changements de structure politique et sociale
Avec les XIV et XV ss., la France entre dans une pйriode de son
La grammaire..............................................................................................................86
histoire particuliиrement йprouvante: famines, йpidйmies, rйvoltes, guer-
Le vocabulaire............................................................................................................93 res vont se succйder pendant plus d’un siиcle.
L’orthographe..............................................................................................................97 Dиs le XIII s., l’essor des villes transforma peu а peu l’organisation
L E F R A N З A I S C L A S S I Q U E (XVII– XVIII ss.)...........99 de la sociйtй fйodale qui reposait sur les liens personnels unissant un
suzerain а un vassal: avec le dйbut de la spйcialisation des mйtiers (jus-
L’histoire externe..........................................................................................99
que-lа, un mкme serviteur travaillait la terre, fabriquait des ouils, cousait
L’histoire interne........................................................................................127 des vкtements, dйcoupait les bкtes de boucherie, etc.), des confrйries
La phonйtique........................................................................................................... 127 urbaines socioprofessionnelles se formaient, les bourgeois obtinrent pour
leur villes des privilиges йconomiques et juridiques qui concurrenзaient
La grammaire.......................................................................................................... 131
les pouvoirs seigneuriaux.
L’orthographe........................................................................................................... 142
Vers le XIV s., le dйveloppement de l’artisanat et de diffйrentes
B I B L I O G R A P H I E.............................................................144 industries fut tel qu’il nйcessita l’extension des relations йconomiques et
commerciales. Cependant, le morcellement territorial et l’indйpendance
des fiefs fйodaux et des villes (communes autonomes) crйaient un obsta-
cle а la fondation d’un marchй commun intйrieur et aux relations com-
merciales avec d’autres pays.
Au dйbut du XIV s. Philippe le Bel (1268–1314) rйussit а agrandir
le royaume en rйunissant sous le pouvour royal de nombreuses contrйes
(la Champagne, la Brie, la Navarre, etc.). Il se dressa contre la puissance
des papes, grands propriйtaires terriens de l’йpoque, ayant confisquй plu-
sieurs terres et entrepris certaines mesures anticlйricales. Depuis, la bour-
geoisie et les villes furent redevables d’une contribution rйguliиre а la
146 3
couronne, ce qui les plaзa sous la dйpendance йtroite du roi. La centrali- 21. Meillet A. Introduction а l’йtude comparative des langues in-
sation se poursuivait avec succиs: furent constituйs le Conseil du roi, le doeuropйennes. – P., 1915. – 463 p.
Parlement de Paris et des Parlements dans les provinces, les йtats gйnй- 22. Nyrop K. Grammaire historique de la langue franзaise.
raux et les йtats provinciaux. La vieille sociйtй fйodale se trouva йbranlйe 23. Terracher L. L’histoire des langues et la gйographie linguistique.
et un nouvel idйal social, moral et intellectuel commenзa а naоtre. Oxford, 1927–1928. – 230 p.
La guerre de Cent Ans (1337 – 1453) 24. Wartburg W. von. Evolution et structure de la langue franзaise.
Ce long conflit entre la France et l’Angleterre a pour origine un 5e йd. Berne, Francke, 1958.– 230 p.
conflit fйodal (les rois d’Angleterre йtaient vassaux des rois de Fran- Dictionnaires йtymologiques
ce) doublй d’une querelle dynastique (le roi d’Angleterre rйclamait la 1. Bloch O., W. v. Wartburg. Dictionnaire йtymologique de la lan-
couronne de France). En 1328, le dernier des Capйtiens (Charles IV) gue franзaise. – P., 1950.
mourut sans hйritier. Le roi d’Angleterre fit valoir ses droits а la suc- A. Dauzat. Dictionnaire йtymologique de la langue franзaise. Paris,
cession, mais Philippe VI de Valois fut prйfйrй par les princes franзais Larousse, 1957.
et йlu roi de France (1337). Dиs lors, deux rois de langue franзaise se 2. Godefroy P. Dictionnaire de l’ancienne langue franзaise et de
disputиrent le royaume de France jusqu’en 1453; ce fut la guerre de tous ses dialectes. – P., 1938.
Cent Ans.
La longue guerre de Cent Ans affaiblit la monarchie franзaise,
qui perdit plusieurs provinces au profit de l’Angleterre jusqu’а ce que
les interventions du connйtable Du Guesclin (1320–1380), homme de
guerre breton au service du roi de France et type du parfait chevalier,
et plus tard de Jeanne d’Arc (1412–1431), redonnиrent dйfinitive-
ment l’avantage au roi de France; ce dernier reprit progressivement
Paris (1436), la Normandie (1450), la Guyenne (1453). Ainsi, la France
rйcupйra-t-elle son territoire, annexй depuis le XII e s. par l’Angleter-
re.
Mais le royaume franзais paya trиs cher sa victoire sur les An-
glais. La guerre de Cent Ans retarda de beaucoup le dйveloppement
йconomique de l’йtat: elle ravagea le pays tout entier et ruina l’agri-
culture, occasionnant la famine et la peste, dйcimant le tiers de la
population. La noblesse elle-mкme perdit prиs des trois quarts de ses
effectifs, permettant ainsi aux bourgeois, enrichis par la guerre, d’ache-
ter des terres et de s’anoblir.
Aux insuccиs du dйbut de la guerre s’ajouta le mйcontentement
du peuple, des bourgeois de villes et des grands seigneurs. Le milieu
du XIV s. connaоt les soulиvements du peuple contre le joug fйodal et
les abus des nobles, contre les bandes armйes qui ravageaint le pays
sous le couvert de la guerre de Cent Ans. Dans les provinces au
Nord-Ouest de Paris, en 1358, eut lieu une rйvolte paysanne dйnom-
mйe la «Jacquerie» (du nom de Jacques donnй aux paysans). A Paris,
le soulиvement des artisans et bourgeois contre les gros impфts et le
pouvoir royal fut dirigй par Etienne Marcel. Mais les nobles avec
l’appui des Anglais rйduirent les rebelles а l’obйissance.
4 145
La guerre de Cent Ans contre les Anglais fit naоtre un fort sentiment
B I B L I O G R A P H I E nationaliste, tant en France qu’en Angleterre. En France il se dйveloppa
un mouvement populaire pour la libйration du pays (campagnes de Jean-
1. Аллендорф К. А. Очерк истории французского языка. – М.: ne d’Arc).
Учпедгиз, 1959. – 178 с. En Angleterre au XIV e s. le franзais perdit progressivement le
2. Бородина М. А. Историческая фонетика французского языка statut de langue dominante, en rйaction contre la France. Cela se traduisit
(на франц. яз.). М.-Л.: Просвещение, 1961. – 158 с. par le remplacement du franзais dиs 1363, au parlement de Londres: en
3. Бородина М. А. Историческая морфология французского 1363 la session du Parlement anglais s’ouvrit par le discours en anglais
языка (на франц. яз.). – М.-Л.: Просвещение, 1965. – 230 с. (dйjа en 1362 Edouard III permit qu’on plaide en anglais devant le parle-
4. Скрелина Л. М. История французского языка (на франц. ment anglais). Henry IV fut le premier roi de langue maternelle anglaise;
яз.). – М.: Высш. шк., 1972. – 280 с. Henry V fut le premier roi d’Angleterre а utiliser l’anglais dans les docu-
5. Скрелина Л. М. Хрестоматия по истории французского ments officiels; il йcrivit son testament en anglais. Mais le franзais conti-
языка. – М.: Высш. шк., 1981. – 277 с. nua а кtre employй oralement а la cour anglaise, car la plupart des reines
6. Скрелина Л. М., Становая Л. А. История французского языка: d’Angleterre venaient de France. Et il demeurera nйcessaire pour les
Учебник. – М.: Высш. шк., 2001. – 463 с. postes importants jusqu’au XVI e s. grosso modo.
7. Катагощина Н. А., Гурычева М. С., Аллендорф К. А. История Le franзais йtait donc de moins en moins maternel en Angleterre, il
французского языка. – М., 1963. devait кtre soutenu par un enseignement spйcifique. Cela faisait augmen-
8. Шигаревская Н. А. История французского языка (на франц. ter le nombre de traitйs didactiques ou йpistolaires, visant а professer le
яз.). – Л.: Просвещение, 1974. – 280 с. franзais (par ex., vers 1400 apparaоt Donait franзois de John Barton:
9. Шишмарев В. Ф. Книга для чтения по истории французского grammaire en forme de dialogues, questions / rйponses; rйdigйe d’aprиs
языка. – М.-Л.: Изд-во АН СССР, 1955. – 557 с. le modиle latin). De tels ouvrages reprйsentent une source importante
10. Сергиевский М. В. История французского языка. – М., des donnйes sur la langue franзaise de l’йpoque.
Изд-во иностр. лит., 1947. – 274 с. Il existe une curieuse hypothиse lancйe par Henriette Walter dans
11. Cohen M. Histoire d’une langue: le franзais. – P., EFR, son livre Honni soit qui mal y pense que, sans l’intervention de Jeanne
1950. – 388 p. d’Arc, les Anglais restйs en partie francophones auraient pu adopter dйfi-
12. Bourciez E. Prйcis de phonйtique franзaise. 9e йd. Paris, Klinck- nitivement le franзais et transporter plus tard cette langue dans les futurs
sieck, 1958. – 235 p. Йtats-Unis d’Amйrique et ailleurs. Mкme s’il ne s’agit lа que d’une hypo-
13. Brunot F. Histoire de la langue franзaise, t. I – XIII. – P., thиse, les chances du franзais de s’implanter en Angleterre auraient йtй
Colin, 1933 – 1953. incontournables. Soit le duc de Bourgogne, soit le roi d’Angleterre aurait
14. Brunot F. et Bruneau Ch. Prйcis de grammaire historique de la occupй le trфne de France en lieu et place des Valois; or, les deux prйten-
langue franзaise. Paris, Masson, 1956. – 642p. dants parlaient le franзais. Ayant conservй la moitiй de leurs terres en
15. Darmesteter A. Cours de grammaire historique de la langue France, les rois-anglais-de-langue-maternelle-franзaise n’auraient pas eu
franзaise. – Р., 1950 cette rйaction anti-franзaise qu’ils ont dйveloppйe par la suite, une fois
16. Dauzat A. Histoire de la langue franзaise. P., PUF, 1959. «boutйs hors de France» par Jeanne d’Arc. Autrement dit, la conquкte
17. Gougenheim G. La relatinisation du vocabulaire franзais. An- de la France par les Anglais auraient assurй la pйrennitй du franзais en
nales de l’Universitй de Paris, janvier-mars, 1959.– 463 p. Angleterre grвce а la fusion des deux royaumes. Dans ce cas, le franзais
18. Guillaume G. Temps et verbe. Thйorie des aspects, des modes aurait certainement dominй sur l’anglais. Par la suite, la rйpartition mon-
et des temps. P., 1970. – P. 62. diale des langues aurait aujourd’hui une toute autre apparence.
19. Guiraud P. L’ancien franзais. – P., 1963. L’essor d’aprиs-guerre
20. Guiraud P. Le moyen franзais. «Que sais-je». A la suite des derniers combats, la France rйcupйra toutes ses terres
sauf la rйgion de Calais. La guerre contribua а la consolidation du pays.
144 5
Louis XI (1461 – 1483), pragmatique et rusй, fut un des principaux phe (teste [tet]); les voyelles et les consonnes finales qui ne sont plus
constructeurs de l’unitй nationale. Il rйunit presque toutes les provinces prononcйes persistent (vie [vi], parler [parle], etc.); ainsi que les voyel-
de France en un Etat national ayant supprimй les fiefs et le pouvoir les en hiatus (meur [mur]).
illimitй des seigneurs. La Provence, la Bourgogne et la Bretagne furent Les principes latinisants sont soutenus par l’Acadйmie, notamment
rattachйes а la France. Cela fait, l’unification du pays fut accomplie а la par ses Dictionnaires: l’orthographe de la premiиre йdition du Dictionnai-
fin du siиcle: а la mort du roi Louis XI en 1483 le domaine royal coпncide re de l’Acadйmie (1694) est traditionnelle partant du principe йtymologi-
presque avec la France actuelle. que. Cependant en 1740, la 3 iиme йdition s’aligne sur l’usage et adopte
Les industries et les sciences connurent un nouvel essor reprenant quelques nouvelles rиgles :
le cours du dйveloppement amorcй а la fin du XIII s. et retardй par la – suppression de plusieurs lettres doubles: agraffer > agrafer; mais:
guerre de Cent Ans. aggraver, apparaоtre, etc.;
Au XV s., naоt un nouvel art de vivre. Le dйcor de la vie se trans- – suppression de s devant consonne remplacй par un accent: teste >
forme dans le sens du mieux-кtre, du confort, voire du luxe, avec un tкte, escrire > йcrire;
certain caractиre ostentatoire. La moinde dйmarche humaine traduit cet- – suppression de quelques lettres йtymologiques: faict > fait, deb-
te transformation. Dans le costume d’abord. Les draps lourds cиdent la voir > devoir;
place а la fine draperie, aux soieries, au linge dйlicat, faзon de Damas ou – suppression des voyelles en hiatus: meur > mыr, veoir > voir;
de Venise, aux belles fourrures. La mode parisienne fait dйjа prime; elle – suppression de la lettre y en faveur de i: moy > moi, cecy >
est recherchait а l’йtranger, notammant par les Anglais. Les cours royales ceci, etc.
et princiиres constituent des foyers d’йlйgance. Le luxe de l’alimentation Dans l’orthographe, c’est а partir de 1740 que les actuels accents
aussi: abondance de viandes, plats raffinйs, vins fins, fruits exotiques, furent rйglementйs et systйmatiquement utilisйs.
sucreries. Le mobilier devient plus soignй: tables en bois de cyprиs, ivoi- Au total un quart de mots (environ 5 000) se trouvиrent donc modi-
res, vases d’йtain, tapisserie de haute lisse а personnages ne sont pas fiйs, cette rйforme est la plus importante dans l’histoire de l’orthographe
monopole de princes et ornent les demeures bourgeoises. franзaise. Toutefois, il reste dans la langue quantitй de mots avec des
Depuis le milieu du XV s., la maison urbaine s’embellit. La fiиvre consonnes doubles (difficile), de lettres йtymologiques (doigt) et mкme
de construction de l’aprиs-guerre ne s’apaise pas. La maison garde son arbitraires, de voyelles en hiatus (j’eus), etc.
pignon, mais gagne en йlйvation; les piиces, plus nombreuses, sont dй- L’orthographe du franзais moderne est traditionnelle par excellen-
sormais faites pour recevoir; la pierre, d’abord rйsйrvйe aux soubasse- ce. Nйanmoins, tous les cinq principes se trouvent reprйsentйs en fran-
ments, gagne les йtages. Les villes, ainsi, s’embellissent: on pave les rues зais classique.
de pierre, on йloigne les abattoirs, on multiplie les fontaines. L’architectu- 1. Le principe traditionnelle (historique): les lettres reflиtent les sons
re civile prend son essor, mais la part de Dieu reste toutefois la plus dont la prononciation a changй: eau [eau] (ancien franзais) > eau [o]
grande. (franзais classique, moderne).
L’extension du francien 2. Le principe йtymologique veut rapprocher les mots franзais des
Dans une France qui n’йtait pas encore centralisйe, Paris occupait, mots latins ou grecs dont ils sont issus: homme < homo, doigt < digitu, etc.
aux XIV – XV ss., une place prйpondйrante sur le plan intellectuel. Si- 3. Le principe morphologique: un mкme morphиme quelle que soit
tuйe au carrefour des routes, la ville йtait ainsi largement ouverte aux sa prononciation garde la mкme notation: long, parce que longue, etc.
influences extйrieures, tandis que son emplacement privilйgiй assurait Dans la conjugaison des verbes les dйsinences quoique muettes sont
son essor йconomique. Les imprimeries se multipliaient, les groupes de prйservйes: tu parles.
discussion et d’йtudes fleurissaient а Paris. Ce sont ces donnйes а la fois 4. Le principe hiйroglyphique sert а diffйrencier les homophones:
spirituelles et matйrielles qui expliquent le dйveloppement des arts, des ou / oщ, conter / compter, la / lа, etc.
lettres et des sciences surtout au centre du pays. 5. Le principe phonйtique est un fait exceptionnel en franзais.
La tendance а la cenralisation du pays contribua а l’extension des D’aprиs ce principe, un son correspond а un seul signe graphique et vice
dialectes de l’Ouest y compris le francien. Les Franзais, s’ils йtaient versa: parlй, mur, etc.
6 143
L’йpoque du capitalisme industriel naissant voit apparaоtre le sens actuel instruits, n’йcrivaient donc plus en franзais dialectal, c’est-а-dire dans les
des mots tels que fabrique, usine, capital, etc. Les termes concernant l’activi- langues d’oпl, mais en franзais ou en latin.
tй banquaire deviennent particuliиrement nombreux: bourse, compte courant, Les domaines de l’expansion gйographique ainsi que les fonctions
billets de banque, etc. accomplies par le franзais dans la sociйtй franзaise de l’йpoque s’йlargis-
Au XVIII s. le franзais continue а crйer sa terminologie scientifique sur- saient aux dйpens du latin. Dиs l’йpoque de Philippe le Bel, on avait
tout en empruntant les mots latins ou grecs (abdomen, commissure, etc.). commencй а employer le francien (franзais) pour les actes officiels, aux
Plusieurs termes scientifiques sont tolйrйs et introduits dans la langue littйraire. parlements et а la chancellerie royale. Ainsi, dиs 1300, se constitua une
La langue du XVIII s. est plus dйmocratique car elle admet un nombre langue administrative et judiciaire qui faisait dйjа concurrence au latin.
considйrable de mots et expressions du parler populaire (v. les comйdies de Le franзais est largement employй dans les йdits, les ordonnances,
Beaumarchais, etc.): escamoter, bambin, marmot, se battre les flancs, manger etc., afin que la documentation officielle soit intelligible partout et а tous
jusqu’а crever, etc. dans le royaume de France. Dans les tribunaux on avait facilement re-
Dйrivation cours а la langue du peuple (par ex., Ordonnance de Moulins (28.12.1490)
La dйrivation reste toujours le procйdй essentiel de l’enrichissement prescrit, art. 101, que les dйpositions des tйmoins soient faites «en langa-
lexical du franaзis et, notamment, la dйrivation par suffixes d’origine savante ge franзais ou maternel»). Le franзais йtait favorisй aussi dans les affai-
-ateur, -ation, -isme, -iste, etc. qui font souvent concurrence aux suffixes res. Les juristes romains et les philosophes grecs furent dиs lors traduits
dits populaires (-ier, -in, -ien): indiffйrantisme, capitaliste, etc. La prйfixa- en franзais, en mкme temps que naissait une littйrature comique ou sati-
tion donne naissance aussi а nombre de mots: antipatriotique, sous-officier, rique plus adaptйe а un public peu instruit. Quant aux savants, clercs et
contre-rйvolution, etc. autres lettrйs, ils continuaient а latiniser leur franзais.
Par dйrivation impropre se forment plusieurs substantifs а partir des par- Il est а noter un nombre dйplorable des gens instruits а l’йpoque: en
ticipes et des adjectifs: l’aperзu, le dйbutant; le singulier, etc. supposant que 15 millions de Franзais йtaient des sujets du roi, on peut
Emprunts penser que quelque 40 000 d’entre eux savaient lire et que le tiers (pres-
A la diffйrence de l’йpoque prйcйdente, le XVIII s. assimile beaucoup de que tous les clercs) de cette mince fraction trouvait l’occasion de lire les
mots йtrangers, surtout des mots anglais grвce aux rapports йconomiques et textes. On peut estimer que pas plus d’un cinquantiиme de la population
culturels avec l’Angleterre qui se dйveloppent et par intйrкt pour les institutions pouvait pratiquer ce franзais йcrit.
et droits politiques de la bourgeoisie anglaise: meeting, club, budget, parle- L’attirance pour les lettres et la pensйe antique
ment, speaker, comitй, etc. Le mode de vie (habillement, alimentation et sur- L’intйrкt pour les lettres et la pensйe antique se manifeste.
tout le sport) fournit aussi un certain nombre de mots anglais: redingote, bif- Les traductions йtaient commandйes par le roi et les grands sei-
teck, boxe, brick, budget, cabine, club, coke, grog, humour, importer, gneurs. Plusieurs йminents traducteurs contribuиrent а l’enrichissement
punch, spleen, etc. Fait curieux, c’est que quelques mots anglais dus а l’em- du vocabulaire franзais, а la crйation de la terminologie des sciences et
prunt а l’ancien franзais par l’intermйdiaire de l’anglo-normand retournent au des techniques. Ce furent N. Oresme, Pierre Bersuire, Jacques Bou-
XVIII s. en FM avec un sens particulier: bougette (petit sac en AF) > budget, chaut, etc. Les traductions des auteurs latins et grecs (les traitйs philoso-
desport (jeu en AF) > sport, entrevue (en AF) > interview, etc. phiques, juridiques et scientifiques de Tite Live, Horace, Aristote, Virgi-
le, Cicйron) favorisaient aussi le dйveloppement et le perfectionnement
L’ORTHOGRAPHE du dialect central.
Nicolas Oresme fut le plus illustre des traducteurs. Il traduisit la
Il existe au XVII s. une assez grande variйtй de notations parmi les Politique d’Aristote (1374), ayant accompagnй son њuvre d’une grande
imprimeurs ainsi que parmi les auteurs. Malgrй une quantitй de projets rйflexion sur la langue franзaise dans le texte joint: Excusacion et com-
de rйformer l’orthographe au XVI s., les latiniseurs prennent le dessus, et mendacion de ceste њuvre. Oresme s’y montra le premier а avoir une
le XVII s. connaоt une йcriture trиs compliquйe. Elle le devient encore vue а long terme sur les progrиs de la langue franзaise: conscient de ses
davantage а la suite des modifications syntagmatiques de la prononcia- dйfauts, il est convaincu que le travail des traducteurs la rendra plus
tion franзaise: le s qui s’amuпt devant consonne subsiste dans l’orthogra- prйcise. Le traducteur dйveloppa йgalement le thиme de la translatio
142 7
studii: le savoir йtant passй de la Grиce а Rome, il doit passer de Rome а Emprunts
Paris. Ce grand homme de l’йpoque remit totalement en question la si- L’apport des emprunts aux autres langues est trиs faible au XVII s.:
tuation du latin, enrichit de beaucoup le vocabulaire de la langue franзai- il n’y a que 188 d’emprunts а l’italien (surtout les termes d’art: sonate,
se, visant toujours la perfectibilitй du franзais. bravo, violoncelle, etc.), 103 d’emprunts а l’espagnol ayant trait au pay-
Mais dans cette pйriode du franзais il existe aussi une forte tendan- sage, aux produits et au mode de vie des pays du sud: aubergine, sieste,
ce latinisante, traduite par l’influence des clercs et des scribes instruits et cigare, etc.; 52 au nйerlandais et 27 а l’allemand. Notons aussi les
puissants dans l’appareil de l’Йtat ainsi que dans la vie йconomique de la premiers emprunts au russe: cosaque, steppe, ukase, etc.
nation. Ces gens, imprйgnйs de latin, йblouis par les chefs-d’њuvre de Le XVIII siиcle.
l’Antiquitй et dйsireux de rapprocher la langue parlйe, c’est-а-dire celle L’enrichissement lexical prend au XVIII s. un nouvel essor dы en
des «ignorants», de celle reprйsentant tout l’hйritage culturel du passй, premier lieu aux progrиs des sciences et des industries, mais surtout de la
dйdaignиrent les ressources dont disposait alors le franзais. Ces savants pensйe. De profondes transformations survenues dans la sociйtй et les
latiniseurs «translatиrent» les textes anciens en les accommodant а l’йtat idйes; la crйation de nouvelles institutions dйmocratiques et l’abolition de
du franзais. celles de l’йpoque fйodale sont reflйtйes dans le lexique du XVIII s. Tout
Ce faisant, ils йloignиrent la langue franзaise de celle du peuple: ce le vocabulaire politique administratif se modifia avec la disparition des
fut le dйbut de la sйparation entre la langue йcrite et la langue parlйe. En mots relatifs а l’Ancien Rйgime (bailli, dоme, gabelle, etc.), la Rйvolu-
plus, le franзais perdit peu а peu la prйrogative de se dйvelopper libre- tion ayant renouvelй le vocabulaire politique et administratif.
ment, il devint la chose des lettrйs, des poиtes et des grammairiens. Le fait capital de l’йpoque est la consitution du vocabulaire politi-
L’Antiquitй n’est donc pas ignorйe, mais le monde antique apparaоt que et social, ce qui reflиte la lutte des conceptions politiques et philoso-
comme trop lointain pour кtre assimilable et utilisable dans le monde phiques du XVIII s.
prйsent; surtout, son image est brouillйe: s’y mкlent lйgendes, mytholo- Les mots changent de sens ayant pйnйtrй dans le vocabulaire politi-
gies, anachronismes … C’est la «lettre» et non «l’esprit» des textes que. Ainsi, le sens politique du terme astronomique rйvolution naоt au
anciens que l’on connaоt, que l’on apprend par coeur. On tronque la XVIII s. Deux mots citoyen et bourgeois dйsignaient au XVII s. celui qui
littйrature antique pour en extraire les passages; on ne l’interroge pas, on habite une ville (citй, bourg). Au XVIII s. bourgeois indique la personne
ne la discute pas, on ne la comprend pas exactement. d’un certain rang social, tandis que citoyen reзoit un sens civique et
L’Universitй aux XIV – XV ss. demeurait sclйrosйe: il y avait da- patriotique.
vantage de commentaires sur les commentaires d’oeuvres dйjа йcrites Au cours de la Rйvolution, а la fin du siиcle il naоt un grand nombre
que de rйelles nouveautйs. Surtout, les formes se figиrent, celles de l’ensei- de nйologismes. Certains de ces mots subsistent en franзais contempo-
gnement comme celles de l’art en gйnйral: le respect excessif pour la rain et ont mкme pйnйtrй dans d’autres langues, c.-а-d. sont devenus des
tradition gкnait toute йvolution. vocables internationaux: session, la droite, bureaucratie, diplomate, etc.
Traditionnellement, on considиre que le Moyen Age s’achиve en D’autres seront abandonnйs, comme ceux, au reste trиs
France а la fin du XV s. pour faire place а ce qu’on appelle la Renaissan- poйtiques, correspondant au calendrier rйvolutionnaire,
ce. Mais bien avant son apparition «officielle», le dйcor est mis. Les vendйmiaire (septembre),brumaire (octobre),
contacts entre les intellectuels d’Europe qui dйboucheront sur l’humanis- frimaire (novembre), nivфse (dйcembre); athйi-ser, dйprкtriser, esclaver,
me sont dйjа йtablis. L’influence de l’Antiquitй grecque et latine est con- rйpublicaniser, etc.
sidйrable. L’influence de l’Eglise sur la crйation se fait moins pressante, Le Supplйment contenant les mots nouveaux en usage depuis la
ce qui facilite l’expression de la pluralitй. Le franзais s’impose peu а peu Rйvolution du Dictionnaire de l’Acadйmie publiй en 1798, nous en of-
au dйtriment du latin. fre un beau tйmoignage. Ce Supplйment de 369 entrйes est consacrй aux
L’imprimerie mots ou sens nouveaux apportйs par la Rйvolution franзaise, et plus de
La diffusion de la culture connaоt une йvolution essentielle avec le 60% de ces derniers seront de fait inclus dans l’йdition suivante du Dic-
dйveloppement de l’imprimerie. L’industrie de l’imprimerie, nйe а Mayen- tionnaire de l’Acadйmie, par ex.: carmagnole, cocarde, dйpartement,
ce en 1448 avec Gutenberg, s’installe а Paris en 1470, а Lyon en 1473. йcole normale, guillotine, prйfet, sans-culotte, etc.
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2. Dans la sйrie de synonymes le mot plus ancien est remplacй par L’imprimerie favorisa la diffusion du franзais: il parut plus rentable
le vocable de formation plus rйcente: baler, caroler (AF, MF) > danser aux imprimeurs de publier en franзais qu’en latin vu le nombre plus
(FCl); ir (AF, MF) > colиre (FCl), etc. important de lecteurs en cette langue. Cela dit, c’est а cette йpoque que
3. Les mots formйs par la voie de dйrivation regressive (perte de l’on doit cette dйplorable orthographe du franзais dont les francophones
suffixes) se trouvent remplacйs par ceux formйs а l’aide de suffixes: d’aujourd’hui subissent encore les servitudes: les typographes, une espи-
bers > berceau, etc. ce alors а la mode, furent responsables de biens des traditions, parfois
4. La forme rйguliиre supplante une forme irйguliиre: ardre, occire, fort encombrantes.
clore (III conjugaison) > brыler, tuer, fermer (I conjugaison), etc. Les imprimeurs, qui sont la plupart du temps des йrudits, s’instal-
La langue tend aussi а йliminer la synonymie suffixale: dans la sйrie lent de plus en plus nombreux а Paris, mais aussi dans les grandes villes
maigreur / maigresse / maigretй le suffixe -eur est choisi aux dйpens de de province. Vers 1500 quarante villes franзaises possиdent une «librai-
deux autres, etc. rie», c’est-а-dire un endroit oщ on йdite, on imprime et on vend des
Il se fait aussi un certain triage dans les suffixes, les uns se ratta- livres. Les techniques de fabrication se perfectionnent. Les tirages aug-
chant de prйfй- rance au radical verbal, d’autres au radicaux des noms et mentent, la diffusion s’amйliore. Ainsi, la culture peut-elle davantage se
des adjectifs, etc. Notons que l’ancien franзais y йtait absolument indif- rйpandre. Mais on est loin encore de la vulgarisation du livre. Le nombre
fйrent. d’exemplaires sortis demeure faible. Le livre reste un produit coыteux,
Plusieurs mots disparus а cette йpoque ne subsistent que dans les objet de luxe rйservй а des privilйgiйs non seulement cultivйs, mais aussi
proverbes et les locutions figйes: se tenir coi, laisser choir, etc. fortunйs.
Les savants ont effectuй un grand travail pour prйciser le sens des
vocables, par ex., dans le cas de entrevue les dictionnaires insistent qu’il LA LITTЙRATURE
s’agit de la premiиre rencontre, tandis que rendez-vous n’est admis que Tenant compte des mutations sociales, vers le XV s., toute une part
pour dйsigner une future rencontre, etc. de la littйrature est devenue celle de la ville et des bourgeois, alors qu’elle
L’enrichissement lexical n’est pas considйrable au XVII s. Il se pour- йtait restйe celle de l’йlite fйodale durant la pйriode l’ancien franзais.
suit toutefois par les procйdйs suivants : Au XIV s., dans des conditions pйnibles (troubles, guerres, fami-
– la dйrivation suffixale (йquipement, draperie, etc.) et prйfixale nes, йpidйmies) on conзoit que la littйrature ait vu dйcliner les genres а
(inaction, dйsoeuvrй, etc.); succиs comme le roman courtois et l’йpopйe. En revanche, la chronique,
– la composition (savoir-vivre, casse-noisette, etc.); le reflet des troubles de l’йpoque, de l’inquйtude des hommes et aussi de
– la dйrivation impropre: substantivation (le commandant, etc.) et leurs aspirations, connaоt un dйveloppement exceptionnel. La littйrature
adjectivation (un homme dйsobligeant, etc.). des XIV – XV ss. excelle dans le thйвtre et les ouvrages de prose ce qui
Il est а noter que la langue utilise de plus en plus souvent la forma- reflйtait les besoins de la nouvelle sociйtй en formation dans les grandes
tion analytique de mots nouveaux, remplaзant parfois les procйdйs syn- villes – la bourgeoisie. Le dйveloppement des genres poйtiques n’atteint
thйtiques de formation de mots, telle dйrivation propre. Ainsi, les suffixes pas la grandeur littйraire des siиcles prйcйdents, mais la diversitй des
diminutifs font place а l’adjectif petit qui a perdu son sens lexical primitif formes littйraires est considйrable.
йtant devenu quasi-morphиme: enfantel (eau), enfanзon, enfanзonnet > La prose
= petit enfant, etc. 1. Une littйrature historique florissante.
Suivant la mкme tendance, les verbes de formation synthйtique sont Jusque-lа, la prose йtait rйservйe а la langue juridique ou а certains
supplantйs par des tours pйriphrastiques (qui est un procйdй analytique): textes de dйvotion, c’est-а-dire qu’elle n’avait pas encore conquis son
s’entreblesser > = se blesser mutuellement, etc. statut littйraire. Les premiers prosateurs, Geoffroi de Villehardoin et Jean
Dans la classe d’adverbes le suffixe -ment, restant productif, le rфle de Joinville, tous deux historiographes, en se libйrant de contraintes de la
prйpondй- versification, se dйmarquиrent du mкme coup du roman et de l’йpopйe et
rant vient dйsormais aux constructions analytiques: а peine, de temps trouvent, dans la langue franзaise qui peu а peu se perfectionnait, des
en temps, etc. ressources stylistiques propres. Mais il faudra attendre les Chroniques
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de Jean Froissart (1337 – 1411), йvoquant les йvйnements de l’йpoque relations de plus en plus complexes: pour peu que (condition), cependant
et rйdigйes а la fin du XIV s., et surtout les Mйmoires de Philippe de que (temps), puisque (cause), quoique, encore que (opposition), etc.
Commynes (1447 – 1511) (seconde moitiй du XV s.) pour que l’on Dans la question portant sur le prйdicat on utulise beaucoup le tour
puisse commencer а parler vйritablement d’historiens. interrogatif est-ce que, surtout en langage parlй.
La langue des chroniques de J. Froissart, tout en se rangeant du La question indirecte est introduite rйguliиrement depuis le XVII s.
cфtй du francien, comporte nombre de picardismes. Bien que J. Frois- par ce que et ce qui, а la diffйrence des siиcles prйcйdents oщ on se
sart soit essentiellement connu pour son oeuvre de chroniqueur, il est contentait de la conjonction que sans antйcйdent.
йgalement l’auteur d’un grand nombre de ballades, rondeaux, lais et vire- Depuis l’йpoque du franзais classique se dйveloppe l’emploi de ce qui,
lais et aussi de quelques pastourelles originales. Comme dans ses Chro- ce que, c’est…que pour mettre en relief les parties d’une phrase complexe.
niques, l’auteur donne, de la sociйtй de son temps, une image brillante, C’est le franзais classique qui йtablit dйfinitivement la structure de
sans dйfauts. la proposition indйpendante et le systиme riche et variй des phrases com-
Le plus grand historien du XV s. est Philippe de Commynes, fla- plexes qui sont utilisйes en franзais moderne.
mand de par son origine. Philippe de Commynes cherche а pйnйtrer les LE VOCABULAIRE
causes des йvйnements et porte des jugements politiques instructifs pour Par rйaction а l’exubйrance lexicale du XVI s., le XVII s. marque
les dirigeants de ce monde. Il s’en tient encore а un rйcit avec beaucoup une tendance nette а purifier la langue encombrйe de nйologismes et
de reflexion, de recul, de jugement. d’archaпsmes introduits par la Plйпade.
Les chroniqueurs du Moyen Age, Villehardoin, Joinville, Froissart, En ce qui concerne le vocabulaire, les deux siиcles – le XVII et le
Commynes, ont peu а peu pliй la langue franзaise а la prose, qu’ils XVIII – se font opposition, le premier tendant а purifier et а diminuer le
estimaient plus capable d’exprimer la vйrite historique que les vers. lexique, а le rendre plus stable, le deuxiиme marquant un йlan vigoureux
Un des plus grands prosateurs du XV s. est Antoine de la Sale vers un nouvel enrichissement du vocabulaire. Ces deux tendances op-
(1388 – 1462) dont les њuvres йtaient un spйcimen du genre didactique. posйes du dйveloppement du lexique s’expliquent par les conditions poli-
Certains de ses textes sont prйcieux pour le linguiste vu le langage parlй tiques, йconomiques et sociales toutes diffйrentes, le lexique reflйtant
utilisй dans ses nouvelles. fidиlement les changements dans le mode de vie des hommes.
2. Le conte: tradition et modernitй. Les XVII et XVIII ss. йtant ceux de la formation de l’йtat franзais
Depuis l’ancien franзais, la littйrature franзaise a fait une large pla- national, ce processus a demandй la codification de la norme littйraire de
ce au conte et а la nouvelle. Il s’agit de courts rйcits, au dйbut en vers – la langue nationale. L’immense intйrкt pour les faits linguistiques anime
comme le seront encore les Contes de La Fontaine, au XVII s. – , puis en les йcrivains et les grammairiens et fait naоtre quantitй de thйories de la
prose, empruntйs а la vie quotidienne et inscrits dans un cadre narratif langue qui portent au premier chef sur le vocabulaire. A la diffйrence du
йtroit. Au XV s., deux nouvelles tendances apparaissent: une tendance XVI s., l’йpoque classique vise а йpurer le lexique et а prйciser le sens et
moralisatrice, lorsque le conte comporte un enseignement, une morale а l’emploi de chaque vocable. L’activitй littйraire des puristes oppose le
tirer de l’histoire; une tendance psychologique, avec les analyses de sen- style noble au langage vulgaire, les rйpartissant entre les diffйrents styles
timents qui influenceront beaucoup le XVI s. Mais le plus souvent, le et genres littйraires. En revanche, il se trouve des йcrivains et hommes
conte et la nouvelle cherchent а faire rire, et les aventures qu’on y racon- cultivйs qui se dressent contre les excиs du purisme devenu finalement
te sont grivoises, misogynes et anticlйricales (les femmes et les moines en aristocratique, et de ce fait rйactionnaire.
sont les principales victimes). Le XVII siиcle
Le thйвtre Au XVII s. un grand nombre de vocables synonymiques tombent
Au Moyen Age le genre dramatique fleurissait et connaissait plu- en dйsuйtude.
sieurs variйtйs. 1. La langue tend а йliminer les sйries homonymiques:
1.Un thйвtre d’origine religieuse. LP XVI s. Franзais classique
Parmi les diffйrents types de spectacles religieux, le mystиre est Manu main main
celui qui exerce le plus d’influence au XV s. Son sujet, directement em- Mane main matin
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