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7 7 Arnaud
Agir ici – Survie
1 1 Labrousse
( Le saccage des forêts primaires (
d’Afrique centrale est infiniment plus François-Xavier
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rapide et accompli que ne l’avouent
les discours officiels des gouverne- Verschave
ments africains et de leurs «bailleurs
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de fonds» occidentaux.
Sous la pression des mouvements
écologistes, les seconds ont fait t
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adopter aux premiers des réglemen- r Les
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tations, souvent très élaborées, qui
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sont censées protéger l’écosystème, a
la biodiversité, et garantir le l
N «développement durable». e N pillards
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Le résultat est exactement inverse.
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Voici plusieurs études de cas assez d ci e
S eçaxiesm opclcauirpeesn, to uùn lee sp loapcéer aptreivuilrésg firéaen.- llar S gir i urvi de la
Pour comprendre comment s’orga- pi A S
nise ce pillage, il fallait analyser les s
R agissements de nombreuses e R forêt
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sociétés (Rougier, Bolloré, Thanry,
Pallisco, etc.); décrypter les liens
entre des acteurs de l’exploitation et
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les réseaux mafieux, entre des
hommes politiques occidentaux tels e Exploitations criminelles
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I que Foccart, Godfrain, Pasqua, a I
Chirac et leurs homologues h en Afrique
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africains; enfin, suivre l’argent du s
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bois depuis la Banque mondiale eVe
S jusqu’aux coffres des paradis fiscaux, ssr S
depuis les ventes de grumes ue
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jusqu’aux trafics d’armes. ra
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9 782748 900101 ISBN 2-7489-0010-3 AF
Agir
Les «Dossiers noirs» sont issus d’une collaboration entre
ici Survie
et , qui mènent régulièrement, avec une vingtaine
d’associations françaises, des campagnes conjointes pour
«ramener à la raison démocratique» la politique africaine de
Agir ici Survie
la France. Afin d’en refonder la crédibilité, et
ont émis une série de propositions régulièrement réactualisées.
Agir ici
est un réseau de citoyens spécialisé dans
l’intervention auprès des décideurs politiques et économiques
des pays du Nord en faveur de relations Nord/Sud plus
Agir ici
justes. mène des campagnes d’opinion liées à
l’actualité en collaboration avec d’autres associations
françaises, européennes et internationales.
104, rue Oberkampf, 75011 Paris.
Tél. (0)1 56 98 24 40 • Fax (0)1 56 98 24 09
Courriel <[email protected]>
Survie
est une association de citoyens qui intervient depuis
1983 auprès des responsables politiques français pour
renforcer et rendre plus efficace la lutte contre l’extrême
Survie
misère dans le monde. milite pour une rénovation du
dispositif de coopération, un assainissement des relations
franco-africaines et une opposition ferme à la banalisation des
crimes contre l’humanité.
57, av. du Maine, 75014 Paris.
Tél. (0)1 43 27 03 25 • Fax (0)1 43 20 55 58
Courriel <[email protected]>
Les «Dossiers noirs» d’Agir ici & Survie
L’Envers de la dette.Criminalité politique et économique
au Congo-Brazza et en Angola, «Dossier noir 16»,
Agone, 2002
Bolloré: monopoles, services compris, «Dossier noir 15»,
L’Harmattan, 2000
Le Silence de la forêt. Réseaux, mafias et filière bois au
Cameroun,«Dossier noir 14», L’Harmattan, 2000
Projet pétrolier Tchad-Cameroun. Dés pipés sur le pipe-line,
«Dossier noir 13», L’Harmattan, 1999.
La Sécurité au sommet, l’insécurité à la base…«Dossier
noir12», L’Harmattan, 1998
La Traite & l’esclavage négriers, Godwin Tété, «Dossier
noir11», L’Harmattan, 1998
France-Sénégal. Une vitrine craquelée, «Dossier noir 10»,
L’Harmattan, 1997
France-Zaïre-Congo, 1960-1997. Échec aux mercenaires,
«Dossier noir 9», L’Harmattan, 1997
Tchad, Niger. Escroqueries à la démocratie, «Dossier noir 8»,
L’Harmattan, 1996
France-Cameroun. Croisement dangereux!«Dossier noir 7»,
L’Harmattan, 1996
Jacques Chirac & la Françafrique. Retour à la case Foccart?
«Dossier noir 6», L’Harmattan, 1995
© Agone, 2002
BP 2326, F-13213 Marseille cedex 02
http://www.agone.org
ISBN 2-7489-0010-3
Arnaud Labrousse
François-Xavier Verschave
Les pillards de la forêt
Exploitations criminelles en Afrique
J’ai toujours regretté que la corruption, qui
attire tant de personnes sans scrupules, inté-
resse si peu les gens honnêtes.
Michel Foucault
N’importe qui, ou presque, peut devenir un
jour ministre de la Coopération.
Jacques Godfrain
ancien ministre de la Coopération
Ce groupe d’enthousiastes se présentait
comme l’Expédition d’Exploration Eldo-
rado et je crois bien qu’ils étaient tenus par
serment au secret. Mais cela ne les empê-
chait pas de parler en sordides flibustiers:ils
faisaient preuve d’imprudence sans intrépi-
dité, d’avidité sans audace, et de cruauté
sans courage. […] Tout ce qu’ils voulaient,
c’était arracher ses trésors aux entrailles du
pays, et il n’y avait chez eux pas plus de
préoccupation morale qu’il n’y en a chez les
voleurs qui fracturent un coffre.
Joseph Conrad
Au cœur des ténèbres
Les sources les plus utilisées sont mentionnées sous forme
d’abréviations (entre crochets, suivies des pages citées) dont la
référence complète est donnée page 187.
On trouvera page 185 la liste des principaux sigles utilisés.
Par souci d’homogénéité, nous avons traduit en euros les
sommes originellement exprimées en francs français.
Préambule
De la Françafrique
à la Mafiafrique I
Repartons des origines
de la «Françafrique».
II
Le terme désigne la face immergée de l’ice-
berg des relations franco-africaines. En 1960, l’his-
toire accule de Gaulle à accorder l’indépendance
aux colonies d’Afrique noire. Cette nouvelle légalité
internationale proclamée fournit la face émergée,
immaculée: la France meilleure amie de l’Afrique,
du développement et de la démocratie. En même
temps, son bras droit, Jacques Foccart, est chargé
de maintenir la dépendance, par des moyens forcé-
ment illégaux, occultes, inavouables. Il sélectionne
des chefs d’État «amis de la France» par la guerre
(plus de 100000 civils massacrés au Cameroun),
l’assassinat ou la fraude électorale. À ces gardiens
de l’ordre néocolonial, il propose un partage de la
rente des matières premières et de l’aide au déve-
loppement. Les bases militaires, le franc CFA
I. Pour plus d’informations sur les éléments évoqués dans ce
texte, lire [ED], [NC] et [NS] (cf.liste des abréviations p. 187).
II. Exhumé en 1994 des antiques discours d’Houphouët-Boigny
pour tenter de comprendre comment la France avait pu se rendre
complice du génocide rwandais. À peine Survie avait-elle réussi,
fin 2000, à rendre ce concept incontournable, qu’était déclenché
un concert d’interventions dans les médias, sur le thème: «La
Françafrique, oui, ça a existé, mais c’est fini depuis 1997 (ou
1994, ou 1990).» Le même genre de refrain est seriné à propos
du financement occulte des partis politiques. Les deux
phénomènes sont en partie liés, et le premier n’a pas plus disparu
que le second. Nous vérifions tous les jours que la France et ses
réseaux continuent de s’ingérer dans les manœuvres politiques
ou militaires visant à garder ou (re)conquérir les pactoles africains,
ou les nœuds de trafics.
10 Préambule
convertible en Suisse, les services secrets et leurs
faux-nez (Elf et de multiples PME, de fournitures
ou de «sécurité») complètent le dispositif.
C’est parti pour quarante ans de pillage, de sou-
tien aux dictatures, de coups fourrés, de guerres
secrètes – du Biafra aux deux Congos. Le Rwanda,
les Comores, la Guinée-Bissau, le Liberia, la Sierra
Leone, le Tchad, le Togo, etc. en conserveront
longtemps les stigmates. Les dictateurs usés, bouli-
miques, dopés par l’endettement, ne pouvaient
plus promettre le développement. Ils ont dégainé
l’arme ultime, le bouc émissaire: «Si je prolonge
mon pouvoir, avec mon clan et un discours ethni-
sant, c’est pour empêcher que vos ennemis de
l’autre ethnie ne m’y remplacent. Excluons-les pré-
ventivement.» On connaît la suite. La criminalité
politique est entrée en synergie avec la criminalité
économique.
Detelles dérives n’ont pas été sans déteindre sur
la France: l’argent a totalement corrompu la «rai-
son d’État » foccartienne, elle-même très contes-
table; au fonds de commerce foccartien, légué à
Jacques Chirac, s’est adjoint une galerie mar-
chande, où ont investi les frères et neveux de Gis-
card, les fils de Mitterrand et de Pasqua… Les
milliards dispensés par les Sirven et compagnie ont
perdu tout sens de la mesure, bien au-delà du seul
financement des partis. Les mécanismes de corrup-
tion ont fait tache d’huile en métropole, avec les
mêmes entreprises (Bouygues, Dumez), les mêmes
hommes (Étienne Leandri, Patrice Pelat, Michel
Pacary, Michel Roussin, etc.), les mêmes fidu-
ciaires suisses, banques luxembourgeoises, comptes
panaméens. Une partie du racket des marchés