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Les
MÉMOIRES HISTORIQUES
SE-MA TS’IEN
de
traduits et annotés par
Édouard CHAVANNES (1865-1918)
TOME sixième
Un document produit en version numérique par Pierre Palpant,
collaborateur bénévole
Courriel : [email protected]
Dans le cadre de la collection : "Les classiques des sciences sociales"
dirigée et fondée par Jean-Marie Tremblay,
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi
Site web : http://classiques.uqac.ca
Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque
Paul-Émile-Boulet de l’Université du Québec à Chicoutimi
Site web : http://bibliotheque.uqac.ca
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 2
Un document produit en version numérique par Pierre Palpant, collaborateur bénévole,
Courriel : [email protected]
à partir de :
Les Mémoires historiques de Se-ma Ts’ien,
Tome sixième,
traduits et annotés par Edouard CHAVANNES (1865-1918)
Librairie d’Amérique et d’Orient Adrien Maisonneuve, Paris, 1969, pages 5-73.
Polices de caractères utilisée : Times, 10 et 12 points.
Mise en page sur papier format LETTRE (US letter), 8. 5 x 11’’
Édition complétée le 15 décembre 2006 à Chicoutimi, Québec.
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 3
T A B L E D E S M A T I È R E S
Quatrième section : Les maisons héréditaires (suite).
Chapitres :
XLVIII. Tchen Ch’ë.
XLIX. Les femmes d’empereurs.
L. Le roi Yuen, de Tch’ou.
Notes des Chapitres : XLVIII — XLIX — L
Note CSS
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N O T E C S S
En 1918, Henri Cordier rappelait, dans un article écrit à la mort d’Édouard
Chavannes :
Arrivé à Pe King le 21 mars, il [Éd. Chavannes] m’écrivait le 19
juillet 1889 :
« J’ai un peu hésité dans le début sur le travail que je voulais
entreprendre. J’ai abordé le Yi li, dont je vous avais parlé à Paris ;
mais cette traduction présente des difficultés si sérieuses que j’ai
dû y renoncer. Je me suis rabattu sur Se-ma Ts’ien et je me
propose de faire une traduction de la première partie de l’ouvrage,
celle qui présente une histoire des dynasties chinoises depuis Chen
Noung jusqu’aux Han. Ne croyez-vous pas que ce travail pourrait
avoir quelque intérêt ? »
Plus tard, il précisait le but de ses recherches (10 novembre 1889) :
« Je continue à lire Se-ma Ts’ien ; mais je vois mieux maintenant
ce que j’en veux faire ; j’ai l’intention de faire un livre sur Se-ma
Ts’ien lui-même, de raconter sa vie et de retracer son caractère, de
fixer quels sont les livres qui ne sont pas de lui dans le Che ki,
enfin de montrer le plan et la valeur historique de cet ouvrage ; si
rien ne vient m’empêcher dans mes études, je pense pouvoir
réaliser ce projet avant deux ans. »
….. Cependant Chavannes poursuivait la publication de son Se-ma
Ts’ien qui devait comprendre dix volumes : dans sa séance du 11
mai 1894, la Société Asiatique lui accordait une subvention, et
dans la séance du 20 juin 1895, Barbier de Meynard présentait le
premier volume de ce grand ouvrage.
Successivement parurent, de 1895 à 1901 cinq tomes sur dix (dont
l’un, en deux parties) de cette grande œuvre dont le second
volume obtint, en 1897, le prix Stanislas Julien à l’Académie des
Inscriptions et Belles-Lettres. Nous écrivions en 1898 :
« C’est un véritable monument que M. Chavannes élève à la
mémoire du célèbre historien Se-ma Ts’ien ; les volumes
paraissent à intervalles suffisamment rapprochés pour nous
permettre de voir achevée une œuvre dont l’ampleur nous faisait
craindre qu’il ne fût pas permis à un seul homme de la mener à
bonne fin. »
Hélas ! nos craintes n’étaient que trop justifiées ; Chavannes,
sollicité par tant de travaux nouveaux et intéressants, n’a pas vu la
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 5
fin de sa tâche, qui sera, je l’espère, terminée quelque jour. Sur les
130 chapitres qui composent le Che Ki, il en a publié 47 ; il reste à
donner les chapitres 48-60 de la quatrième section (Maisons
héréditaires) et toutes les Monographies (chap. 61-130).
Des chapitres restant à donner, E. Chavannes avait laissés en manuscrit,
prêts à être publiés, les 48e, 49e et 50e, qui ont fait l’objet, avec d’autres
travaux non encore du domaine public canadien, d’un tome sixième des
Mémoires Historiques publié en 1969 sous l’égide de l’UNESCO par la
librairie Maisonneuve.
Pour les francophones, compte tenu des traductions plus anciennes
(notamment chapitre 84 par L. d’Hervey de Saint-Denys, chapitre 121 par E.
Biot, chapitre 123 par M. Brosset), restaient près de 80 chapitres à publier.
Deux chapitres 51e et 52e sont présentés dans l’édition de 1969, traduits par
Max Kaltenmark, une petite quinzaine de monographies sont contenues dans
la précieuse traduction de Jacques Pimpaneau (Sima Qian, Mémoires
historiques, vies de Chinois illustres, Editions Picquier, collection poche,
Paris, 2002, 164 pages). Quelques autres travaux, marginaux, épars.
Dans les autres langues européennes, la situation n’est pas meilleure, mis à
part l’anglais : dans cette langue, Burton Watson notamment a traduit nombre
des chapitres non traduits par Chavannes ; l’Université de l’Indiana a
commencé une traduction complète.
Un siècle après le dernier volume publié par Édouard Chavannes, les
lecteurs francophones doivent semble-t-il attendre encore quelque temps avant
de prendre connaissance dans son ensemble de ce qui est quelquefois présenté
par les sinologues comme « un chef-d’œuvre de l’humanité ».
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CHAPITRE XLVIII
(101)
Dix-huitième maison héréditaire
Tch’en Chë .
(102)
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Tch’en Cheng était originaire de Yang-tch’eng ; son appellation
p. 5 (103)
était Chë.
Ou Koang était originaire de Yang-hia ; son appellation était Chou.
(104)
Du temps que (Tch’en) Cheng était jeune, il avait loué un jour ses services
comme laboureur avec d’autres hommes. Quand il eut fini de labourer , il
(105)
se rendit sur un talus, et, exprimant ses regrets de rester longtemps dans une
telle condition, il dit :
p.6
— Si je deviens riche et puissant, je ne vous oublierai pas .
(106)
Un des travailleurs à gages se mit à rire et répliqua :
— Si vous êtes un homme qui loue ses services pour labourer,
comment deviendrez-vous riche et puissant ?
Tch’en Chë dit en soupirant profondément :
— L’hirondelle et le passereau pourraient-ils connaître les
résolutions de la grue à la grande envergure ?
(107)
La deuxième année du règne de Eul-che, le septième mois (9 août - 6 sept.
209), on envoya neuf cents hommes pris parmi ceux qui demeuraient sur le
côté gauche des ruelles pour constituer une garnison pénitentiaire à
(108) p.7 (109)
Yu-yang ; ils campèrent dans le district de Ta-tsë . Ce fut le tour de
(110) (111)
Tch’en Cheng et de Ou Koang de partir tous deux pour être les directeurs de
p.8
la colonie. De grandes pluies étant survenues, les chemins furent
impraticables. Considérant qu’ils avaient manqué à la date du rendez-vous et
que, pour ce manquement, tous deux seraient décapités, Tch’en Cheng et Ou
Koang se concertèrent en disant :
— Maintenant, si nous désertons, c’est la mort ; si nous
entreprenons d’exécuter un grand projet, ce sera aussi la mort ; la
mort étant égale (dans ces deux cas), ne convient-il pas de mourir
pour (fonder) un empire ?
Tch’en Cheng dit :
— L’empire souffre des Ts’in depuis longtemps. J’ai appris que
Eul-che était un fils cadet et ne devait pas monter sur le trône.
(112)
Celui qui devait monter sur le trône, c’était le prince Fou-sou ;
mais, Fou-sou ayant souvent fait des remontrances, l’empereur l’a
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 7
envoyé en dehors (du territoire) commander des soldats ;
(113)
maintenant, j’entends parfois dire que, bien qu’il fût innocent,
Eul-che l’a tué . Le peuple a souvent entendu parler de sa
(114)
sagesse et ne sait pas encore qu’il est mort. (D’autre part,) Hiang
Yen , qui était général de Tch’ou, a remporté maintes fois de la
(115)
gloire ; il aimait ses soldats, et les gens de Tch’ou le chérissaient.
Les uns disent qu’il est mort ; d’autres, qu’il s’est enfui. Si
maintenant précisément, profitant de la bande de gens qui est sous
nos ordres, nous prétendons être le prince Fou-sou et Hiang Yen, et
si nous prenons l’initiative du commandement dans l’empire, il
faudra bien qu’il y ait beaucoup de gens qui répondent à notre
appel.
Ou Koang ayant approuvé ce plan, ils allèrent consulter les sorts. Celui qui
tirait les sorts connaissait leur projet ; il leur dit :
p.9
— Vos entreprises, messieurs , réussiront entièrement et seront
(116)
glorieuses ; cependant, messieurs, en consultant les sorts à ce
p.10
sujet, il y a des démons !
(117)
Tch’en Cheng et Ou Koang furent satisfaits ; songeant à (la mention que le
devin leur avait faite) des démons, ils se dirent :
— Il nous a par là donné l’avis de commencer par en imposer à la
multitude.
Alors ils écrivirent en rouge sur un morceau de soie les mots « Tch’en Cheng,
roi, » et placèrent cela dans le ventre d’un poisson qu’un homme avait pris
dans son filet. Un soldat acheta ce poisson et, en le faisant cuire pour le
manger, il trouva l’écrit qui était dans le ventre ; il ne manqua pas de voir là
un prodige. Puis, par des moyens secrets, ils firent que dans un sanctuaire au
milieu d’un bois voisin de l’endroit où campait Ou Koang, il y eut de nuit
(118)
des lumières de lanternes , que des renards crièrent et qu’une voix se
(119) (120)
fit entendre qui disait :
p.11
— Le grand Tch’ou s’élèvera ; Tch’en Cheng sera roi .
(121)
Les soldats furent tous, pendant cette nuit, frappés de terreur : le jour venu, il
y eut parmi les soldats des allées et venues et des pourparlers : tous
désignaient Tch’en Cheng du doigt et du regard.
Ou Koang était un homme toujours aimable ; les officiers et les soldats
étaient pour la plupart prêts à le servir. Le commandant (wei) qui était à la tête
(du détachement) se trouvant ivre, (Ou) Koang dit intentionnellement
plusieurs fois qu’il voulait déserter ; (il se proposait ainsi) d’exciter la colère
du commandant et de l’engager à lui faire affront, afin de provoquer le
ressentiment de ses propres partisans. Le commandant, en effet, fit battre de
verges (Ou) Koang ; l’épée du commandant se trouvant tirée (hors du
fourreau), (Ou) Koang s’élança pour la lui arracher et tua le commandant.
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 8
Tch’en Cheng lui prêta main forte et ils tuèrent en même temps les deux com-
mandants. Ils convoquèrent alors leurs partisans et leur dirent :
— À cause de la pluie qui est survenue, vous avez tous manqué à
la date du rendez-vous ; pour ce manquement, vous devez être
décapités ; à supposer même qu’on ordonne que vous ne soyez pas
décapités, ceux d’entre vous qui mourront par le fait de tenir
garnison seront au nombre de six ou sept sur dix. D’ailleurs, quand
un homme s’est conduit en brave, s’il n’est pas mort tout est bien
et, s’il est mort, il aura du moins conquis une grande gloire ; quand
on a été roi ou marquis, général ou conseiller d’État, à quoi bon
p.12
avoir une postérité ?
(122)
Leurs partisans dirent tous :
— Nous acceptons avec respect vos ordres.
Alors ils prétendirent être le prince Fou Sou et Hiang Yen, pour répondre au
désir du peuple. Ils se mirent l’épaule droite à nu et donnèrent (au
(123)
royaume qu’ils voulaient fonder) le nom de « grand Tch’ou ». Ils
(124)
disposèrent un autel et firent une convention jurée ; ils offrirent en sacrifice
les têtes des commandants .
(125)
Tch’en Cheng se donna le titre de général, et Ou Koang celui de
commandant de premier rang (tou-wei). Ils attaquèrent le chef-lieu du district
de Ta-tsë, et, après s’en être emparés, ils attaquèrent (la ville de) K’i ; K’i
(126)
se rendit. Ils ordonnèrent alors à Ko Yng, originaire de Fou-li , de prendre
(127)
le territoire à l’est de K’i.
(Tch’en Cheng) attaqua (les villes de) Tche , Ts’o , K’ou ,
(128) (129) (130) p.13
Tchë et Ts’iao , et les soumit toutes. À mesure qu’il avançait il
(131) (132)
recueillait des soldats, et quand il arriva à Tch’en il avait six ou sept cents
(133)
chars de guerre, plus de mille cavaliers et plusieurs myriades de fantassins. Il
attaqua Tch’en ; ni le gouverneur, ni le préfet de Tch’en n’étaient
(134)
présents. Seul le vice-gouverneur lui livra bataille à la porte de Ts’iao ,
(135)
mais il ne fut pas vainqueur ; le vice-gouverneur fut tué, et alors (Tch’en
Cheng) entra et prit possession de Tch’en.
Au bout de quelques jours, il convoqua par décret les trois catégories de
vieillards et les personnages les plus éminents à venir tous se réunir à lui
(136)
pour délibérer sur la situation. Les vieillards des trois catégories et les
personnages éminents lui dirent tous :
— Ô général, vous avez en personne revêtu une (cuirasse) solide et
pris en main une (arme) acérée pour combattre ceux qui
p.14
agissaient contrairement à la raison, pour exterminer les Ts’in
cruels, et pour réinstaller les dieux du sol et des moissons du
royaume de Tch’ou. Tel étant votre mérite glorieux, il convient que
vous soyez roi.
SE-MA TS’IEN — Mémoires historiques, tome sixième 9
Tch’en Chë prit alors la dignité de roi, et donna (à son royaume) le nom de
« Tch’ou agrandi » .
(137)
Sur ces entrefaites, dans toutes les commanderies et préfectures où les
gens souffraient des fonctionnaires des Ts’in, ils supplicièrent leurs magistrats
et leurs officiers afin de faire cause commune avec Tch’en Chë.
Puis Ou Chou fut nommé vice-roi et exerça le contrôle sur les autres
(138)
généraux afin d’attaquer à l’ouest (la ville de) Yong-yang . (Tch’en Cheng)
(139)
chargea Ou Tch’en, Tchang Eul et Tch’en Yu , originaires de Tch’en, de
(140)
conquérir le territoire de Tchao ; il chargea Teng Tsong, originaire de Jou-
(141)
yn , de conquérir la commanderie de Kieou-kiang . En ce temps, les
(142) (143)
soldats de Tch’ou étaient plusieurs milliers et ceux qui venaient se
p.15
rassembler (autour de Tch’en Cheng) étaient innombrables.
Ko Yng , étant arrivé à Tong-tch’eng , nomma Siang K’iang roi de
(144) (145)
Tch’ou ; ensuite, apprenant que le roi Tch’en était déjà monté sur le trône,
(146)
il tua donc Siang K’iang, puis revint rapporter ce qui s’était passé ; quand il
fut arrivé à Tch’en, le roi Tch’en fit périr Ko Yng.
Le roi Tch’en ordonna à Tcheou Che, originaire du pays de Wei, d’aller
dans le nord conquérir le territoire de Wei .
(147)
Ou Koang ayant mis le siège devant Yong-yang, Li Yeou, qui était
gouverneur du San-tch’oan , défendit cette ville et Ou Chou ne put la
(148) (149)
soumettre.
Le roi Tch’en appela les hommes les plus éminents du royaume pour
aviser avec eux aux mesures à prendre ; il donna le titre de
chang-tchou-kouo à Ts’ai Ts’e, prince de Fang , originaire de
(150) (151)
Chang-ts’ai .
(152)
Tcheou Wen était un homme sage de Tch’en ; il avait été autrefois chargé
d’observer les jours (propices et néfastes) pour l’armée de Hiang
(153)
p.16
Yen . Il avait été au service du prince de Tch’oen-chen et il se
(154) (155)
prétendait versé dans l’art de la guerre. Le roi Tch’en lui conféra le sceau de
général pour qu’il allât combattre dans l’ouest. En chemin, (Tcheou Wen)
recueillit des soldats, et, quand il arriva aux passes, il avait mille chars de
guerre et plusieurs centaines de mille de soldats ; parvenu à Hi , il y
(156)
campa. (L’empereur de la dynastie) Ts’in ordonna au chao-fou Tchang Han de
libérer les condamnés de la montagne Li et les fils d’esclaves et de les
(157)
lancer tous à l’attaque de la grande armée de Tch’ou ; celle-ci fut entièrement
défaite ; Tcheou Wen, vaincu, sortit précipitamment des passes et fit halte à
Ts’ao-yang . Au bout de deux ou trois mois, Tchang Han le poursuivit et
(158)
le battit ; (Tcheou Wen) se remit en marche et s’arrêta à Min-tch’e .
(159)
Tchang Han l’attaqua et lui fit essuyer une grande défaite. Tcheou Wen se
coupa la gorge et son armée cessa dès lors de combattre.
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Ou Tch’en étant arrivé à Han-tan se proclama lui-même roi de Tchao.
(160)
Tch’en Yu fut son général en chef ; Tchang Eul et Tch’ao Sao furent ses
conseillers de gauche et de droite. Le roi Tch’en, irrité, arrêta et chargea de
liens tous les parents de Ou Tch’en et des (trois) autres ; il voulait les
exterminer.
Mais le tchou-kouo lui dit :
p.17 (161)
— Alors que Ts’in n’est pas encore perdu, exterminer les parents
du roi de Tchao, de son général et de ses conseillers, ce serait là
produire un autre Ts’in . Il vaut mieux vous accommoder aux
(162)
circonstances et lui conférer l’investiture.
Le roi Tch’en envoya alors un messager porter ses félicitations à Tchao, puis il
transporta dans son palais, mais sans leur rendre la liberté , les parents de
(163)
Ou Tch’en et des (trois) autres. En outre, il conféra le titre de prince de
Tch’eng-tou à Tchang Ngao, fils de (Tchang Eul) . Il pressa les soldats
(164) (165)
de Tchao de pénétrer au plus tôt à l’intérieur des passes.
Le roi de Tchao ayant tenu une délibération avec son général et ses
conseillers, ils lui dirent :
— Ô roi, si vous régnez sur Tchao, c’est contraire aux intentions
de Tch’ou : quand donc Tch’ou aura exterminé Ts’in, il ne
manquera pas de tomber en armes sur Tchao. Notre avis est qu’il
vaut mieux ne pas aller guerroyer dans l’ouest, mais envoyer des
émissaires conquérir au nord le territoire de Yen afin de vous
(166)
agrandir. Quand Tchao s’appuiera au sud sur le grand Fleuve et
possédera au nord (les territoires de) Yen et Tai, même si Tch’ou
est vainqueur de Ts’in, il n’osera pas disposer de Tchao à sa guise ;
si Tch’ou n’a pas été vainqueur de Ts’in, il ne manquera pas de
p.18
traiter Tchao avec beaucoup d’égards, et alors Tchao, profitant de
l’épuisement de Ts’in, pourra satisfaire ses ambitions dans
l’empire.
Le roi de Tchao approuva ces conseils ; il n’alla donc pas faire la guerre
dans l’ouest, mais envoya l’ex-tsou-che de Chang-kou , Han Koang, à
(167) (168)
la tête des soldats, s’emparer du territoire de Yen dans le nord.
Ceux qui avaient été autrefois les nobles et les hommes éminents de Yen
dirent à Han Koang :
— Tch’ou s’est déjà nommé un roi ; Tchao s’est aussi déjà nommé
un roi ; quoique Yen soit plus petit, il est toutefois un royaume qui
équipait dix mille chars de guerre . Nous désirons, ô général,
(169)
que vous preniez le titre de roi de Yen.
Han Koang leur répondit :
— Ma mère se trouve dans le pays de Tchao : je n’oserais.
Description:15 déc. 2006 la précieuse traduction de Jacques Pimpaneau (Sima Qian, Mémoires
historiques, vies de Chinois illustres, Editions Picquier, collection poche,.