Table Of ContentKABORE-KIENONT T. HELENE
KABORE-KIENON T. Hélène
Assistante à l’ISAD
Université de Cocody.
LA MÉTALLURGIE ANCIENNE DE L'OR CHEZ
LES AKAN DE CÔTE D'IVOIRE : APPROCHE
ARCHÉOLOGIQUE. UN APPORT À L'HISTOIRE
DES TECHNIQUES MÉTALLURGIQUES.
Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, n°1 - 2004
RESUME
L'or a constitué pendant longtemps et encore aujourd'hui un élément
important dans les sociétés akan de Côte d'Ivoire. Des études ethnologiques
et sociologiques présentent en effet l'intérêt et la prépondérance sociale,
politique et économique de l'or. Des investigations sur certains aspects de
l'or ont été menées dans le Sanwi, le pays baoulé, l'Indénié et le Moronou à
des fins historiques. Sur le plan archéologique, aucune étude n'a porté sur
l'exploitation traditionnelle de l'or, abordant l'ensemble de la zone akan de
Côte d'Ivoire. Et pourtant l'extraction d'or a occupé une place de choix dans
les sociétés akan réparties en plusieurs régions aurifères importantes les
unes que les autres. les explorateurs, les ingénieurs et les rapports des
administrateurs coloniaux, peignent un brillant tableau des ressources
aurifères et des modes anciens d'extraction de l'or. Plusieurs placers sont
cités par ces auteurs, souvent surpris par la qualité technique des mineurs.
Mots-clés : Akan, Métallurgie, Or, Gisement, Filon.
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LA MÉTALLURGIE ANCIENNE DE L'OR CHEZ LES AKAN DE CÔTE D'IVOIRE...
INTRODUCTION
L'or est un métal qui revêt une importance capitale au sein des
sociétés akan de Côte d'Ivoire. Il est l'essence même du pouvoir
politique, économique, social, culturel et cultuel.
Des études dont les thématiques sont entièrement consacrées
à l'or comme celle présentée par le Pr Niangoran-Bouah1 existent,
mais elles abordent le plus souvent les aspects sociologiques et
ethnologiques. Elles montrent bien que le pouvoir de l'or dans ces
sociétés akan est un fait social global, support de l'économie, du
politique, du culturel et du religieux.
Sur le plan historique, des études sont faites sur l'or chez les
Akan de Côte d'Ivoire. Mme Claude-Hélène Perrot2 a consacré dans
sa thèse tout un chapitre à l'or chez les Agni de l'Indénié. Elle traite
des types de gisements, des modes d'exploitation, des aspects
sociaux, économiques et politiques. Le Pr Ekanza Simon Pierre3
aborde aussi dans un chapitre complet de sa thèse d'Etat,
l'exploitation de l'or chez les Aowin en Gold Coast, ancêtres des Agni
actuels de Côte d'Ivoire ; il signale les régions aurifères, explique
les modes d'extraction. On y apprend que l'immense réservoir d'or
que constituait ce pays est la cause de multiples conflits entre
communautés pour le contrôle des placers. Dans cette étude globale,
il examine l'exploitation de l'or chez les Agni du Moronou,
descendants des Aowin. Il présente : leurs zones d'habitation
actuelles comme riches en or, les modes d'exploitation, la
destination de l'or et les causes d'abandon de l'activité aurifère.
Mme Henriette Diabaté4 donne également dans sa thèse d'Etat des
indications sur certains aspects de l'or dans le Sanvi : les modes
d'exploitation, les droits perçus sur les mines, les échanges basées
1- NIANGORAN-BOUAH G, L'univers Akan des poids à peser l'or.
(1984),TI : Les poids non figuratifs, Abidjan. NEA, 323 p.
(1985),TII : Les poids figuratifs, Abidjan. NEA, 313 p.
(1987),TIII : Les poids dans la société, Abidjan, NEA, 333 p.
2- PERROT, C.H., Les Anyi-Ndenyé et le pouvoir aux 18ème et 19ème siècles, Paris
Sorbonne, 1982, 333 p.
3- EKANZA S.P., Mutations d'une société rurale. Les Agni du Moronou. 18ème siècle-
1939. Thèse d'Etat, Université de Provence, oct. 1983. T1-T2, pp. 256-292,
1007 p.
4- DIABATE H., Le Sannvin. Un royaume Akan de la Côte d’Ivoire (1701-1901),
Sources orales et historiques. Thèse d’Etat. Université de Paris I Sorbonne
1984, T1,2,3 4,5, 6, 1258 p.
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sur l'or et ses implications sociologiques. M. Allou Kouamé René5
insiste quant à lui sur le rôle de la découverte de l'or dans la création
de certaines chefferies Akan et le système d'échange basé sur la
poudre d'or.
Outre les thèses, d'autres écrits historiques abordent l'or dans
les sociétés Akan. Ce sont des articles, des mémoires de maîtrises
dont un à notre connaissance consacre sa thématique à l'or6. Le
Journal des Africanistes a publié aussi un numéro spécial en 19787
dont le thème est "L'or dans les sociétés Akan". Quatre articles sont
consacrés à l'or chez les Akan de Côte d'Ivoire : Jean Pierre Chauveau,
"Contribution à la géographie historique de l'or en pays baulé (Côte
d'Ivoire)", Diana Rey-Hulman, "L'or et les différenciations sociales dans
l'Anno, ou la création de l'espace politique de l'Anno", Claude-Hélène
Perrot, "Or, richesse et pouvoir chez les Anyi-Ndenyé aux XVIIIème et
XIXème siècles" et Georges Niangoran-Bouah, "Idéologie de l'or chez les
Akan de Côte d'Ivoire et du Ghana".
En revanche, aucune étude à notre connaissance n'a été menée
en archéologie sur la métallurgie de l'or en zone Akan de Côte d'Ivoire.
Et pourtant, les traditions orales, les sites archéologiques, les rapports
d'administrateurs coloniaux, les études d'ingénieurs et de géologues
mandatés par les autorités coloniales montrent qu'une bonne partie
de la Côte d'Ivoire, surtout la zone occupée par les populations commu-
nément appelées Akan, a jadis connu une renommée internationale
pour sa production et sa richesse en or. Il est en effet l'une des
métallurgies les plus pratiquées dans ces régions.
C'est pour combler ce vide que nous avons entrepris ces
recherches qui constituent une première approche archéologique
basée essentiellement sur la prospection des documents et sources
écrits. L'originalité de notre recherche réside dans le fait que notre
approche est d'abord archéologique, ensuite elle permet d'établir
un premier tableau général des zones d'exploitation de l'or en pays
Akan de Côte d'Ivoire et enfin d'avoir une confirmation de l'hypothèse
5- Allou Kouamé R., Histoire des peuples de civilisation Akan des origines à 1874.
Thèse d’Etat, université de Cocody, 2002, T1,2,3. 1515 p.
6- Kouakou K.E., Les sites aurifères de Kokumbo dans le peuplement du Baoulé sud
à l’époque pré-coloniale. Mémoire de maîtrise, département d’histoire, Université
de Cocody, Avril 1998, 175 p.
7- Journal des Africanistes «L’or dans les sociétés Akan» 1978, Tome 48, Fasc. 1,
165p.
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déjà émise par d'autres chercheurs, sur la coïncidence entre les
sites d'installation des peuples akan de Côte d'Ivoire et la richesse
en or du sou-sol. En effet, en tenant compte des zones aurifères très
riches sur lesquelles se sont installés les peuples akan de Côte
d'Ivoire et des multiples conflits pour le contrôle des placers qui
existaient déjà sur leur zones d'origine la Côte de l'or, n'ont-ils pas
immigré à la recherche de zones aurifères plus riches ?
Ce travail s'inscrit dans un vaste projet de recherche intitulé
"Archéologie et identité culturelle en Côte d'Ivoire" mis en place
par le Laboratoire d'Archéologie Africaine du département
d'Archéologie de l'ISAD (Institut des Sciences Anthropologiques de
Développement). L'un des programmes de ce projet a pour objectif
la prospection archéologique de tout le sud forestier de la Côte d'Ivoire.
L'étude des métallurgies anciennes (fer, or, cuivre...). fait partie des
thèmes centraux de ce projet.
Les données relatives à la métallurgie de l'or privilégient quatre
aspects: les zones de production, les techniques d'exploitation, les
aspects sociaux et économiques. Ces deux derniers aspects feront
l'objet d'études pour les prochaines publications.
Notre objectif dans cette étude est de montrer, à travers une
première approche archéologique, l'importance, l'étendue et les
modes d'exploitation de cette production ancienne d'or chez les Akan.
Pour répondre à cette préoccupation, notre approche s'articulera
autour de deux parties essentielles :
- les régions aurifères et les sites anciens d'exploitation d'or,
- les types de gisements et les modes d'exploitation des mines d'or.
I- LES REGIONS AURIFERES ET LES SITES ANCIENS D'EXPLOI-
TATION DES MINES D'OR
Les zones aurifères de la sphère akan de Côte d'Ivoire font partie
du grand ensemble minier de l'Afrique de l'Ouest. Cette formation
minière prend naissance au Ghana actuel dans une direction Sud-
est, Nord-ouest et traverse la Côte d'Ivoire dans sa plus grande
largeur. Elle apparaît au Nord de la Guinée et dans le Fouta-Jallon
et se limite au nord par celle du Mali, du Burkina-Faso et du Sénégal
un peu plus à l'ouest. Cette zone minière a abrité les gisements
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aurifères les plus réputés de l'Ouest africain : les gisements de la
Falémé, du Galam, du Bambouk, du Bouré, du Lobi, du Gurunsi et
les gisements des zones forestières dispersés jusque sur la Côte.
Au niveau de la Côte d'Ivoire, la formation paraît s'élargir. Elle
s'étend sur une largeur de 500 km entre la frontière ghanéenne et
le fleuve Comoé, du Sanwi sur le littoral au Lobi dans le nord, en
passant par les régions aurifères de l'Indénié, de l'Alangoua, et du
Bondoukou. Un peu plus à l'ouest du fleuve Comoé, cette formation
minière s'élargit avec les régions aurifères du Baoulé, du Moronou,
et de l'Attié.
Les documents écrits permettent d'identifier sept régions
aurifères (carte, p. 8) dont deux sont abordées ici de façon exhaustive
à cause des données archéologiques disponibles. Ce sont les régions
aurifères du Sanwi et du Baoulé.
1- La région aurifère du Sanwi
De toutes les régions aurifères de la zone akan, celle du Sanwi
fait partie des plus connues. Elle s'étend dans le sud-est de la Côte
d'Ivoire entre le fleuve Comoé et le Ghana actuel. Elle se limite au
sud par le littoral et au nord par l'Indénié.
Les pays du Sanwi sont réputés aurifères depuis bien longtemps.
Plusieurs sources écrites attestent de cette richesse en or. La zone
du Sanwi est en effet une zone riche de production et de commerce
intense d'or.
Sa richesse en or est signalée dès le milieu du 19ème siècle par
le lieutenant de vaisseau, commandant de la Malouine, Fleuriot de
Langle qui visita le 26 juin 1843 l'embouchure de la lagune Aby. Il
brossa un brillant tableau des nombreuses ressources de la région
où il signalait l'or comme seule ressource exploitable dans
l'immédiat. La région n'était pas seulement réputée pour sa richesse
en or. Elle avait aussi une particularité qui la différenciait des autres,
c'est la pureté de son or. En effet, d'après De Langle l'or du Sanwi
était l'un des plus purs de la côte8.
8- Ministère de l’intérieur, Assinie et sa région dans l’histoire, A.N.C.I, 1973, 95 p.,
p. 50.
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Tous les observateurs qui ont connu la zone signalent les grandes
richesses aurifères du Sanwi. En 1882, une commission Anglo-
Française dirigée par le Major Lang et le Capitaine Binger chargée
de la délimitation exacte de la frontière entre la Gold Coast et la
Côte d'Ivoire, découvrait de nombreux placers en activité, causes
d'âpres discussions entre les deux Etats.
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Cette réputation de la richesse et de la pureté de l'or du Sanwi a
entraîné vers la fin du 19ème siècle, l'arrivée des premières missions
de reconnaissance pour or. L'une d'elle est dirigée par A. Bretignère,
second de Arthur Verdier9 et M. Charper. Ils signalent de nombreux
centres d'extraction près de Maféré, Affiénou, Kouakro, Nougoua. En
1897 M. Henry Kallié, après avoir traversé un niveau d'alluvion
exploité par les gens de la région, découvrit du quartz aurifère.10
D'autres missions de reconnaissance ont lieu au début du 20ème
siècle. Ces chercheurs d'or se sont le plus souvent basés sur les
exploitations des mineurs noirs qui leur ont servi d'indicateur de
prospection. Pilippot le souligne d'ailleurs dans son rapport comme
suit : "Il faut remarquer que tout l'honneur de la découverte des mines
d'or de l'Ouest Africain revient aux mineurs indigènes. Tous les districts
miniers sont couverts d'exploitations primitives11" C'est le cas des
explorateurs du Transvaal venu en 190212, de Bault L. en 1906 qui
effectua une grande tournée minière dans le Sanwi. Il décrit les
mines d'Ahunta et Akrézi et traverse les régions de Maféré et de
Nougoua où il note de nombreux travaux d'extraction d'or13. Les
géologues Kléiber et Calame de la mission BUMIFOM du birrimien
reconnaissent également entre la Bia et la Côte de l'or les anciens
filons et de nombreux placers alluvionnaires anciens travaillés par
les villageois et aussi de nouvelles occurrences d'or en roche (quartz
et conglomérat) dans les régions d'Akrézi, de Mahamé, d'Ahunta,
d'Alosso et aux environs du Bouègne. Quarante neuf (49) occurrences
d'or en roche ont été recensées dans la région du Sanwi. La densité la
plus forte est située dans le secteur de l'Aféma à l'est de Maféré, où se
trouvent les gîtes reconnus par les travaux miniers les plus
importants (Asupiri, Aniuri, Amangoua, Adiopan, Hermann)14.
9- Verdier est un négociant Français qui établit l’influence de la France sur
l’Indenié, l’Alangoua, et le Béttié en faisant visiter ces régions par son agent
d’Assinie M. Treich Laplaine.
10- A.N.C.I., 1QQ 61 (6), Notice sur la Côte d’Ivoire du point de vue géologique et
minier, p. 9.
11- PHILIPPOT P., Etudes sur les mines d’or et les terres aurifères du Bandama. Rapport
de fin de mission, Haute Côte d’Ivoire, 1908, 40 p., p. 7.
12- ARCI, EE24 (1/2) Notice sur le cercle d’Assinie 1908-1912.
13- Sonnendrucker P. Etude de synthèse sur l’or en Côte d’Ivoire. Région aurifère
du Sanwi , SODEMI, Abidjan nov 1967, 87 p, p. 10.
14- SONNENDRUCKER P., Etude de synthèse sur l’or en Côte d’Ivoire. Région
aurifère du Sanwi. SODEMI, Abidjan, nov 1967, 87 p, p. 11.
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Les administrateurs coloniaux qui ont sillonné la zone du Sanwi,
établissent aussi la grande richesse en or dans les notices et les
rapports de tournées.
Dans un rapport datant de 1908 d'une tournée chez les Affema à
Akrézi dans le cercle d'Assinie, zone d'Aboisso, destiné au gouverneur,
l'on signale de nombreux puits d'or creusés aux abords des villages
du Sanwi et qui sont presque tous abandonnés à cette période15. Au
cours de la même année, une notice concernant le cercle d'Assinie
insiste sur la richesse du sous-sol en or et les nombreux puits
abandonnés et en activité (Aflénou, Kouakrou, Dissou) dans cette
zone16. En 1914, un rapport d'une visite chez les Afema qui occupent
la partie est du district signale un sous-sol aurifère riche et des
exploitations d'or dans les sables et les argiles des bords de Marigots17.
Les vestiges d'extraction traditionnelle de l'or étaient très nombreux
dans la région à tel point que les différents observateurs affirment
que chaque village du Sanwi avait son exploitation aurifère. Les bords
du fleuve Comoé, des rivières Bia, Noé, Tanoé, Bouègne et des
lagunes Aby et Ehy sont parsemés de sites anciens d'extraction d'or18.
Cette richesse en or était aussi perceptible dans la vie quotidienne
des habitants du Sanwi. L'on raconte que le roi de Krinjabo possédait
de nombreuses dames-jeannes remplies d'or, ainsi qu'un ensemble
de pépites d'or ayant l'allure d'un régime de bananes. En effet, la
fortune des rois de Krinjabo au temps d'Amatiffou était considérable.
Ce trésor a disparu à la mort du roi Kouassy le 13 septembre 1903.
D'après Boroba l'héritier, 120 paquets de poudre d'or, plusieurs coffres
contenant des pépites et des pièces d'or, une malle pleine de bijoux
en or ont été emportés par les captifs qui sont des hommes de
confiance du roi19. Au niveau des richesses des rois il faut être
prudent car ces biens en or peuvent provenir des zones avant les
grandes migrations du 18ème siècle. Et donc ils ne justifient pas
toujours la richesse du sous-sol en or.
15- ANCI, EE27(4), Rapport sur une tournée chez les Affema à Akrézi, cercle d’Assinie,
zone d’Aboisso, Août 1908, p. 4.
16- ANCI, 1EE24 (1/2), Notice sur le cercle d’Assinie 1908-1912.
17- ANCI, EE27(3), Rapport sur une visite de la tribu d’Afema. Cercle d’Assinie,
poste d’Aboisso, juillet 1914
18- ANCI, 1QQ 61(6), Notice sur la Côte d’Ivoire du point de vue géologique et
minier, 1905, p. 5.
19- ANCI, EE24 (3/3), Rapport politique janvier 1903, cercle d’Assinie.
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Ainsi dès le milieu du 19ème siècle déjà, et au début du 20ème siècle,
cette région était non seulement connue par les explorateurs, les
officiers de marine, les administrateurs coloniaux et les géologues
comme une zone aurifère importante, mais était aussi perçue comme
un carrefour de commerce intense de la poudre d'or. Dès janvier 1890,
de grands négociants comme Arthur Verdier (1835-1898) obtenait du
roi de Krinjabo la concession exclusive pour l'exploitation de l'or. Il
sollicita une charte de 99 ans ramenée à 20 ans devant les difficultés.20
Au milieu du 19ème siècle également, plus précisément le 18 Juillet
1849, E. Bouet Williammez, Capitaine de vaisseau, commandant de la
division navale des côtes occidentales d'Afrique, dans son courrier
sur le règlement définitif des différents avec le roi Amatifou, roi
d'Assinie et d'Aby et sur le nouvel essor du commerce de Grand
Bassam, parle de ce commerce intense de la poudre d'or dans les
villages du Sanwi21.
Il ressort des informations que nous livrent les sources écrites
que la zone du Sanwi est une région riche en sites aurifères.
Mme Diabaté le souligne d'ailleurs dans sa thèse d'Etat. Elle
distingue deux grandes régions aurifères situées d'une part à
l'est d'une ligne allant de Dubi à Nungua en passant par Mafèli,
et d'autre part autour d'Akelesi. Les habitants font état de l'or
qui "y était présent partout ; on en ramassaient même à fleur de terre
après les grosses pluies"22. Une étude archéologique plus
approfondie donnerait des éléments importants sur l'étendu réelle
et les anciens modes d'extraction de l'or qui, dans cette zone, ont
la particularité de se faire dans la plupart du temps sur des
terrains moins accidentés comme les plateaux, les plaines et
les lits des cours d'eaux..., contrairement à la zone aurifère du
Baoulé où une grande partie de l'exploitation aurifère se fait sur
des collines et montagnes.
20- Ministère de l’intérieur, Assinie et sa région dans l’histoire, ARCI, 1973, 95p,
p. 75.
21- ARCI, 1EE1 (G), Division navale des côtes occidentales d’Afrique. Courrier
du 18 juillet 1849 sur le règlement définitif des différents avec le roi d’Assinie et
Aby et au nouvel essor du commerce de Grand-Bassam par suite de la fréquenta-
tion de l’affluent d’Ebrié.
22- DIABATE, H., Op. cit., p. 644.
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LA MÉTALLURGIE ANCIENNE DE L'OR CHEZ LES AKAN DE CÔTE D'IVOIRE...
2- La région aurifère du Baoulé
Une autre région minière, non moins importante citée par les
sources écrites, est la région aurifère du Baoulé qui s'étend grosso
modo du fleuve Bandama au delà du N'Zi. Les principales zones
sont : la zone de kokumbo, le Yaouré au nord de Kokumbo et la zone
Souambé et Memlé.
La région aurifère du Baoulé faisait aussi partie des plus grandes
zones aurifères de la sphère akan. A la différence du Sanwi, une
grande partie de cette région se situe dans la zone savanicole et
sur un relief accidenté qui fait que l'extraction d'or se pratique
aussi sur les montagnes et les collines. C'est une région
excessivement riche et connue à travers tout le Soudan à cause
de la réputation des mines d'or de montagne de la zone de Kokumbo
et de ses environs.
L'explorateur Binger signalait en 1887 les richesses aurifères
de cette région et les villages où l'on trouvait des exploitations
traditionnelles d'or. Ce sont Kamelinsou, kouadiokro, Adikro,
N'Diénou, Tiokonou, Benzi, Zanzansou, Prikro, etc. Cette zone
est "une région aurifère excessivement riche. Le terrain est composé
de deux tiers de quartz semé rose et d'un tiers d'argile sablonneuse
couleur d'ocre jaune"23.
En 1893, le gouvernement de la colonie, étant informé de la
réputation de cette zone, envoya l'administrateur Pobéguin
reconnaître la région. Parlant du Baoulé central, Pobéguin affirme
que les mines d'or de Kokumbo sont parmi les plus importantes,
que les collines qui entourent le village sont "entièrement criblées de
puits" à tel point que le chef du village a défendu d'éparpiller les
puits d'or et fait procéder à une exploitation en règle des montagnes
en commençant par le sommet. Kokumbo fait ainsi parti des grands
centres d'exploitation aurifère de la région du Baoulé. Les collines
et montagnes ont été exploitées en majorité. On a comme exemple
les montagnes d'Agboua, les collines du Bandama, les massifs
montagneux du Garégoua-Bocassou. Sur ces massifs, on dénombre
les anciennes mines d'or d'Aouadi, de Goumansou-kokumbo et de
23- Capitaine BINGER, Du Niger au Golf de Guinée par le pays de Kong et le Mossi.
Paris Hachette 1892, Mémoire de la Société des Africanistes, 416 p, p. 248.
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Description:les sociétés akan réparties en plusieurs régions aurifères importantes les unes que les autres. les explorateurs, les ingénieurs et les rapports des.