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rhetorica biblica et semitica
Roland Meynet
LA LETTRE AUX GALATES
Deuxième édition revue
PEETERS
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LA LETTRE AUX GALATES
Roland Meynet
LA LETTRE AUX GALATES
Deuxième édition revue
Rhetorica Biblica et Semitica
XXVI
PEETERS
– – ,
LEUVEN PARIS BRISTOL CT
2021
SOCIÉTÉ INTERNATIONALE POUR L’ÉTUDE DE LA RHÉTORIQUE BlBLIQUE ET SÉMITIQUE
Il existe de nombreuses sociétés savantes dont l’objet est l’étude de la rhétorique.
La plus connue est la « Société internationale pour l’histoire de la rhétorique ». La RBS
est la seule :
• qui se consacre exclusivement à l’étude des littératures sémitiques, la Bible essentielle-
ment, mais aussi d’autres, des textes musulmans par exemple ;
• qui s’attache par conséquent à inventorier et à décrire les lois particulières d’une
rhétorique qui a présidé à l’élaboration des textes dont l’importance ne le cède en rien
à ceux du monde grec et latin dont la civilisation occidentale moderne est l’héritière.
Il ne faudrait pas oublier que cette même civilisation occidentale est héritière aussi
de la tradition judéo-chrétienne qui trouve son origine dans la Bible, c’est-à-dire
dans le monde sémitique. Plus largement, les textes que nous étudions sont les textes
fondateurs des trois grandes religions monothéistes, judaïsme, christianisme et islam.
Une telle étude scientifique, condition première d’une meilleure connaissance
mutuelle, ne saurait que contribuer au rapprochement entre ceux qui se réclament
de ces diverses traditions.
La RBS promeut et soutient la formation, les recherches et les publications :
• surtout dans le domaine biblique, tant du Nouveau que de l’Ancien Testament ;
• mais aussi dans celui des autres textes sémitiques, en particulier ceux de l’islam ;
• et encore chez des auteurs nourris par les textes bibliques, comme saint Benoît et Pascal.
Pour cela, la RBS organise
• les années paires un colloque international dont les actes sont publiés dans la présente
collection ;
• chaque année des séminaires de formation à sa méthodologie, en différentes langues.
La RBS accueille et regroupe d’abord les chercheurs et professeurs universitaires qui,
dans diverses institutions académiques, travaillent dans le domaine de la rhétorique
biblique et sémitique. Elle encourage de toutes les manières les étudiants, surtout de
doctorat, dans l’apprentissage de sa technique propre. Elle est ouverte aussi à tous ceux
qui s’intéressent à ses activités et entendent les soutenir.
S ’ R B S
OCIÉTÉINTERNATIONALEPOURLÉTUDEDELA HÉTORIQUE IBLIQUEET ÉMITIQUE
Pontificia Università Gregoriana — Piazza della Pilotta, 4 — 00187 Roma (Italie)
Pour plus de renseignements sur la RBS, voir :
www.retoricabiblicaesemitica.org.
ISBN 978-90-429-4455-8
eISBN 978-90-429-4456-5
D/2021/0602/3
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© 2021, Peeters, Bondgenotenlaan 153, B-3000 Leuven, Belgium
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from the publisher, except the quotation of brief passages for review purposes.
Rhetorica Biblica et Semitica
Beaucoup imaginent que la rhétorique classique, héritée des Grecs à travers les
Romains, est universelle. C’est en effet celle qui semble régir la culture moderne, que
l’Occident a répandue sur l’ensemble de la planète. Le temps est désormais venu d’aban-
donner un tel ethnocentrisme : la rhétorique classique n’est pas seule au monde.
La Bible hébraïque, dont les textes ont été écrits surtout en hébreu mais aussi en
araméen, obéit à une rhétorique bien différente de la rhétorique gréco-romaine. Il faut
donc reconnaitre qu’il existe une autre rhétorique, la « rhétorique hébraïque ».
Quant aux autres textes bibliques, de l’Ancien Testament et du Nouveau, qui ont été
soit traduits soit rédigés directement en grec, ils obéissent largement aux mêmes lois.
On est donc en droit de parler non seulement de rhétorique hébraïque, mais plus large-
ment de « rhétorique biblique ».
En outre, ces mêmes lois ont ensuite été reconnues à l’œuvre dans des textes akka-
diens, ougaritiques et autres, en amont de la Bible hébraïque, puis dans les textes arabes
de la Tradition musulmane et du Coran, en aval de la littérature biblique. Il faut donc
admettre que cette rhétorique n’est pas seulement biblique, et l’on dira que tous ces textes,
qui appartiennent à la même aire culturelle, relèvent d’une même rhétorique qu’on appel-
lera « rhétorique sémitique ».
Contrairement à l’impression que ressent inévitablement le lecteur occidental, les
textes de la tradition sémitique sont fort bien composés, à condition toutefois de les
analyser en fonction des lois de la rhétorique qui les gouverne. On sait que la forme du
texte, sa disposition, est la porte principale qui ouvre l’accès au sens. Non pas que la
composition fournisse, directement et automatiquement, la signification. Cependant,
quand l’analyse formelle permet d’opérer une division raisonnée du texte, de définir de
manière plus objective son contexte, de mettre en évidence l’organisation de l’œuvre
aux différents niveaux de son architecture, se trouvent ainsi réunies les conditions qui
permettent d’entreprendre, sur des bases moins subjectives et fragmentaires, le travail
d’interprétation.
In memoriam des petites sœurs de Jésus
Alisa et Guila
INTRODUCTION
Quand, après vingt ans de séjour au Proche-Orient, au tournant des années
1991-92, je suis revenu en Europe, plus exactement quand je suis passé de
Jérusalem à Rome, j’ai été amené à faire une pause d’un semestre à Paris. La
faculté jésuite de théologie du Centre Sèvres m’avait demandé d’assurer un
cours et un séminaire. Pour le séminaire, on m’avait donné le choix entre trois
lettres de Paul : Galates, Éphésiens ou Philippiens. J’éliminai d’entrée de jeu la
première. Elle me faisait peur. C’est en effet toute la question, difficile, du
rapport entre la Loi et la foi qui est posée dans cette lettre, même si Paul devait
ensuite la reprendre et la développer dans la Lettre aux Romains. Les lettres aux
Philippiens ou aux Éphésiens me semblaient moins dangereuses à manipuler.
Puis je me souvins de ce qui m’était arrivé à Jérusalem à propos de la Lettre
aux Galates. À l’Institut biblique, mon vieil ami Sévillan, Juan Esquivias, qu’on
appelait Yohanan ha-qatan, m’avait raconté qu’un soir, alors qu’il s’apprêtait à
célébrer la messe en hébreu avec la petite communauté de Saint-Isaïe, une
religieuse, juive devenue chrétienne, vint lui demander : « Yohanan, on peut
changer la première lecture ? » Peu contrariant de nature, il accepta aussitôt.
Mais, après la messe, tout de même un peu intrigué, il voulut savoir quel était le
texte qui avait été écarté. C’était un passage de la Lettre aux Galates ! Il me
raconta le fait une deuxième fois, ajoutant encore : « Il faudra bien qu’un jour,
lorsque l’occasion se présentera, j’aborde la question avec ces religieuses... ».
Peu de temps avant de quitter la Ville sainte, il m’arriva la même aventure.
Dans la même situation, une autre sœur vient me dire : « Roland, c’est encore les
Galates ! On change, non ? » — « Non, Guila, on lit les Galates ! » J’avais été
bien préparé pour donner une telle réponse. Je laisse de côté l’homélie que
j’avais préparée et en improvise une autre, sur l’esprit d’enfance... Certes, il
n’est pas difficile de comprendre que, pour des juifs, cette lettre de Paul est bien
difficile à entendre. Toutefois, si l’enfant ne comprend pas ce que disent ses
parents, il ne doit pas rejeter leurs paroles ; il lui faut patienter et faire
confiance : il comprendra plus tard. Et si on ne comprend pas en ce monde ci, on
comprendra à coup sûr dans le monde qui vient. En attendant, on écoute. À plus
forte raison quand il s’agit de ce que l’on tient pour Parole de Dieu. Et davantage
encore si ça dérange !
Je voulais donc en avoir le cœur net, et pour cela il me fallait étudier. D’autant
plus que, même pour des chrétiens non juifs, les questions que Paul aborde dans
sa Lettre aux Galates ne sont pas sans actualité. S’ils ne sont pas tenus par les
prescriptions de la Loi de Moïse, circoncision, sabbat et fêtes, interdits alimen-
taires, seraient-ils affranchis de toute loi ? Telle est donc la raison fondamentale
pour laquelle j’ai entrepris l’étude de ce texte.