Table Of Content, 
1 
us
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1 
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Grégoire l i e   N y s s e  
• 
1 
• 
La  création 
1 
de  l'homme 
\ 
• 
, 
Introduction  par 
/ 
, 
J.-Y.  Guillaumin  el A.-G.  Hamman 
/ 
Traduction  par 
J.-Y.  Guillaumin, 
agrégé  de  l'Université 
, 
, 
1  • 
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• 
1 
(r / 
, 
,( 
> 
Collection cc  Pères dans la fol» 
1 
-
-
•  DESCLÉE  DE  BROUWER
-
-
1 
\ 
puhliée  la  respomabililé 
l'''ft' COl/l'OIOlI  (.'.\1  SO/H 
dt>  /'  nodalion ... P  \fI gne 
~ 
/7  rue cl'  Par,n4" 
,tI~'mhl!rl 
" 
Sommaire 
, 
, 
1 
ItllrodUClion 
Grégoire  de  Nysse,.et  la  culture 
L'anthropologie grecque 
• 
Grégoire  de  Nysse  et  l'Ecriture 
Grégoire  de  Nysse  et  le  livre  de  la  Genèse 
, 
Analyse  du  traité 
/ 
Principaux  thèmes  " 
1 
Contenu  du  traité 
Saint  Grégoire  de  Nysse: 
• 
La  Création  de  I"homme 
, 
• 
Idées-forces  de  la  «Création de l'bo.  .m  e,. 
\ 
1 
Grégoire de  Nysse et la  Bible 
Dieu  et  la  création 
•  La  création 
L"homme 
()  Desdée De  Brouwer  /nd. .x    des citations bibliques 
ISB),j ; 2-220'{)2382-6 
, 
ISSN;  0180-7439 
Bibliographie sommail'fl
• 
_.--
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• 
1 
1 
-
\ 
INTRODUCTION 
, 
, 
Il  Y a  mille  six  cents  a ns,  Grégoire  de  N ysse,  dans  la 
force  de  l'âge - il  a 4 5 ans - et  la  plénitude de son génie. 
publie  le  t rai té sur la  Créal;oll  de  l'homme. Modestement. 
il  prétend simplement achever l'œuvre de son frère.  Basile. 
qui  vient  de  mourir  et  qui  avait  commenté  l'œuvre  des 
cinq  premi ers jo urs de  la  création , dans l'Hexaemeron. en 
neuf homélies, sans traiter de la c réation de l'homme, Gré 
goire  envo ie  son  traité à  son  frère  Pierre.  le  cadet  de  tous 
deux, évêque  de  Sébaste,  Sivas.  aujourd'hui  en  Turqll ie. 
Dans son  traité de  la  Créal;oll  de  l'homme  )!ans 
comm~ 
sa Catéchèse de la Jo;,  Grégoire est  soucieux de pénétrer le 
donné  de  la  foi  avec  toutes  les  ressources  de  .;on  intelli 
gence  et de  sa  culture,  Loin  d'opposer  la  raiso'l à  la  rêvé 
latio'h il  l'utilise  pour mieux  l'interpréter et  cerner la 
C1I 
nouveauté. 
1 
1 
, /  
, 
Grégoire  de  Nysse  et  la  culture  \ 
Homme de  son  temps, Grégoire  récapitule  en  lui  toute 
la  culture  de  l'Antiquité:  il  a  passé  de  longues  années à 
acquérir une fOOlilation  philosophique dont les pilieB sont 
les  œuvres des grands penseurs grecs:  il  a  étudié la rhéto 
1 
rique en cette époque très marquée par la "seconde sophis 
till,ue»,  et  l'on  voit  revenir  dans  son  œuvre  des 
thèoliKI 
au 
constamment développés par les rhéteuB. Il est 
OlhOt
-
• 
/ 
, 
-
10 
1 1  1N  TRODUCTION. 
INTROOUCTION 
connaissances  scientifiques  de  son  tem ps:  les  ciens  est  une  pàrtie  de  cet  univers  soumis  au  Des1-in,  et 
mat~émati
ques  euclidiennes,  avec  tout  ce  leur a  apporte  la  \Dh  dont 'toutes  les  composantes  sont  solidaires.  A  l'intérieur 
qu~ 
1 
dition  (cf.  chapitre 22, vers la  fin),  1 astronomie (ch. 2 1), la  ,  de  l'être humain  lui-même , tout est dans  une  harmonieuse 
musique  (à  laquelle  il  emprunte  très  fréquémment  des  solidarité:  au  "poste  de  contrôle"  de  re  emble,  l'âme, 
images);  la  médeci ne enfin,  qui semble  le  paksionner (elle  «comme  une  araignée  au  centre  de  sa  t  lie»  disaient  les 
est  partout  le chap!lre  30  lUi  sera  consa  stoïciens, veil le au  bon  fonctionnement  énéral, grâce  aux 
présent~t...\9ut 
cré).  Ses  maîtres  en ces domaines semblent  être  surto ut  le  1r amifications  que  constituen t  les  sens. 
grand stoïcien Poséidon ios  et le grand  médecin stoïcisant  On  sent  bien  tout ce  que doit Grégoire il cette anthropo 
1 
logie  assez  répandue  parmi  les  esprits  d~ son  temps  -
Galien  '.  ' 
La  lecture  du  traité  sur  la  Création  de "'homme  mani   encôre que  sa  sérénité  fût  âprement discutée  par certaines 
feste  avec clarté  la  lucidité  avec  laquelle  Grégoire  utilise  écoles, comme celle des Sceptiques.  Il  accepte en efTet  cette 
l'héritage  culturel  de  son  époque.  S'agit-i l  d'être  un  concepti on qui  fait  de  l'être  h.umain  le  résJltat d'une orga 
homme  moderne, ouvert aux  dernières découvertes  scien  nisation supérieure, caractéri sé d'abord par./a puissance de 
tifiques, il  l'est, et  avec  enthousiasme:  la  foi  de  Grégoire  son  intelligence,  et  découvreur  de  penseurs  nouveaux. 
n'est  pas celle  du  charbonnier;  il  aime  l'expérimentation  L'espèce  -humaine  domine  autant  le  règne  animal  que 
scientifique. En  revanche, là  où  les  réponses de  la  doctrine  celui-ci  est  au-dessus  du  règne  végetal  et  des  minéraux . 
stoïcienne  donnent  prise  à  la  discussion  et  à  la  contesta  D'ailleurs,  l'homme  est  remarquablement  organisé  par  le 
tion , là  où  le  cbristianisme va  plus  loin  que  toute  philoso  finalisme  de  la  nature. Toute une  morale pratique, de  plus, 
phie, Grégoire  s'envole  aux  ailes  de  la  mystique : la  foi  de  .  est  véhiculée  par ce  stoïcisme  vulgarisé,  morale  que  Gré 
Grégoire,  véritable  explication  du  monde, se  rit  de  la  phi  goire  n'a cure de  rejeter, puisqu 'e lle  manifeste souvent des 
losophie,  et  parfois  de  façon  sarcastique:  en  témoigne  le  lanalogies  assez  sensibles avec  celle  du  christianisme. 
traitement  qu'il  réserve  aux  tenants  de  la  métempsychose  Seulement, pour  l'école  stoïcienne,  l'homme  est  si  bien  1 
dans  le  chapitre  28.  Ca r  on  pourrait  dire,  paraphrasant 
partie  prenante du  monde  que,  volontairement  ou  non,  il 
.f 
Pascal, que  ,<la  vraie  sagesse  se  moque  de  la  sagesse ». 
ne  peut  que  s'y  fondre  totalement.  La  vie  humaine  est 
comme  une  pièce  de  théâtre  donC nous  sommes  les 
, 
acteurs:  la  seule  chose  qui  dépende  de  nouspt  de 
L'anthropologie  grecque  bi~n 
Ji  ,jouer le  rôle qui  nous a été imparti par le, Destin. Dès  lors, 
Héraclite  d'Ephèse,  Socrate,  Platon,  Aristote,  les  pre 
quelle  liberté  reste-t-il  à l'homme, puisq\le, à  bien  regar 
y 
1 
,?iers stoïciens,  Poséidonios, puis  tous  les  syncrétismes de 
der,  ,des  choses  qui  ne  dépendent  pas  de  nous»,  pour 
l:epoque  tardive, telle  est  la  chaîne  de  tous  ces  hommes 
reprendre  les  expressions  d'Epictète,  SO!)t  bien  plus  nom 
qÛl, ~u  si~c1e avant J.-C. jusqu'au  de  notre ère,  ont 
VI'  IV'  breuses que  «les choses qui  dépendent  de  nous»,je~el-
de  repondre  à  la  question:  «qu'est-cI!  que 
t~nte  les,  au  fond,  se  ramènent à la  simple acceptation ~  re 
1 homme ?» La  tendance  profonde  de  l'esprit  grec  est  de 
destinée.  /  \ 
situer l'homme, "microcosme» ("  petit  monde»), par rap 
port  au  monde,  «macrocosme».  L'homme,  pour les  stoï-
1-
~  ~ ~màer 
siecle  avanl  J. . .('. 
t 
O!bu. .. 
.pra J.oC. 
1..  •  "
-
- , 
INTRU 'UCTION  2 
J  13 
INTRODUCTION 
Grégo, ' e  de  Nysse  et  l'&riture 
J 
l'homme,  préface) .  U  e  lectu re  bibl ique  sans effort  ph ilo 
,  Gré  soph ique  et  théologique  semble  im possible  à  G régoi re. 
'oire  nous  a  laissé  des  commenta ires  de  la  Genèse, 
de  l'E~ode, des  Psaumes,  de  l' Ecclésiaste  et  du  Ca nt ique  Les  ressources de  l'i ntell igence  et  de  la  phliosoph le  ser 
vent  de  levier  mais l'objet - o u  plutôt  le  sujet - de  leur 
des  call tiques.  Son  exégèse  du  Nouveau  Testament  est 
~'est 
in vestigation  pas de  leur o rdre, mais est donné  préei. 
moins abondante.  Nous avons déjà  p ublié ses  comm entai  
.' 
res  des  Béatill/des  et  de  l'Oraison  dominicale.  sément  par  l'Ecriture  le  message  que  son  Auteur  no u.s  
. 
, 
, .   . 
~ 
transmet.  L'herméneutique  gregon enne  s evertue  a  inte-
Les divers  thèmes  bibiiques - Exode,  Ca ntique,  Béati  
grer « sens  li ttéral  et  sens  théologique,  histo ire  et  contem-
tudes  - tracent  toujours  pour G régoire  l' itinéraire  spiri 
plation ».  , 
tuel  la  marche vers D ieu. Grégoire cherche dans l'Ecritu re 
Grégoire  revient  avec  prédi lection  ce . thème:  I<La 
le  fdndeme nt  et le modèle de  l'ascension, à travers les p uri   su~ 
J 
pauvreté de  notre nature est  Im p Uissante a  le  prlnè,pe 
fications  intérieures,  vers  le  m ystère  inaccessible  de  Di eu,  VOI~ 
dévoilé  dans  le  Christ.  de la sagesse qui  sémani feste dans chacun des etres ; conSI 
' dérer cependant  un  certain  enchaînement des 
Com me Jean Chrysostome, Grégoire part du sens littéral  fa'ts~  sUI.va~t 
l'ord re  fi xé  par le Créateur, telle est  la  contemplation lOte: 
et  de  l'histoire,  ma is  il  n'en  est  pas  prisonn ier.  Il  cherche 
-
riorisée  accessible  avec  quelques  conjectures,  a  ceux  qUI 
les  liens  entre  les  réa lités  de  l'histoire  et  l'économi<;- du  , 
, 
save nt  obse rver  co mm e  il  faut  l'enchamement>> 
sal ut.  Seul  le  dessein  de  Dieu  pe rmet  d 'attei ndre  le  sens 
(Hexaem eron). 
théologique  du  texte  et  de  découvrir  sa  cohérence.  Il  lui 
Da ns  la  Création  de  l'homme,  l'évêque  de  Nysse  est 
importe  de  découvrir  les  articulations  qui  constituent 
préoccupé  de  ce rner  d'abord  le  sens  littéral  du  rédacteur 
l'akolOl/thia  du  dessein  de  Dieu.  « Le  mot  akolouthia 
h umain  et  l'enchaînement  des  événements.  Il  remanque 
désigne à  la  foi s Ja  suite  matérielle du  texte de  la  Bible,  la 
que  le  sens  littéral  peut  avoir une  signification 
liaison  nécessaire  des  réalités  de  l'histoire  du  salut  et  la  lui-m~rpe-
méta phorique,  qui  n  pas .Je  sens  spmtuel ,  ce ql\1 avall 
correspondance  analogique,  q ui  existe  entre  les  deux  '~st 
échappé à l'école d'A I,exandne e.t lUi  per'!'et de prendre ses 
plans »  dit  Jean  Daniélou . 
d istances  par  rappo rt ,à  son  mallre  O,:,gene.  . 
Il  lui  faut  donc  eXami ner  le  sens  littéral  pour  dégager 
1 
«On  trOuve  chez  et  chez  GregOIre  de  Nysse,  d!t 
l'enseignement  spiri tllel.  Cet  effort  d ' interprétation ,  Gré  ~asile 
J.  Daniélou ,  un  type  d'exégèse A' ii  9'est  ni  l'exégese  alle 
goire  l'appelle  Ihéôria ,  recherche  d'interprétation  spiri 
gorique d'Alexa{ldrie'ni  l'exégèsé lit!érale d:AntJoche mais 
tuelle.  La  Ihéôria  n'est  pas  d 'abord  une . contemplation 
un  effort  pour concilier les ~o~nées1Ik.I~glqu~s et,la ~~
parce que « les ascensions ne donnent pas à  l'âme la  vision 
sée  scientifique. Or cette exegese c.nc.rdlste nad antece-
et  la  saisie  immédiate  de  la  réalité»,  mais  elle  progresse 
dent  que  chez  Acade  de  " 
vers  la  vision  de  l'Invisible.  César~e.» 
Cette quête d'infini  chez GregOIre  de  Nysse  n est  tnbu 
Il  s'agit aussi pour Grégoire de confronter l'Ecriture avec 
taire  ni  de  Platon  ni  d'Aristote,  elle  est  mscnte  dans  la 
la  réflex10n afin  de  résoudre  les  apparentes contradictions 
révélation  divine  elle  se  trouve  dans <da  parole  fime  du 
qUI  peuvent  se  rencontrer,  en  discernant  l'enchaînement 
Dieu  infini»  pa;ole  qui  polarise  toute  I~  marche  vers  le 
en  profondeur  qui  conduit  en  réalité  «vers  un  seul  et 
co~p
Dieu de  la  béatitude et la  béatitude de  DIeu.  .. La 
même  but ,  grâ~e  à  la  puissance  divine»  (Création  de 
tion grégorienne de. l'infini divin - comme celle ~''!!.~ 
de  Poitiers  - est  Impensable  en  dehors  de  la  réiL 
lOI! 
3.  Pour chaque texle de  la  coll~IOO noûs nous interT'OlCrons, dans  les  notes  biblique».  •  ..... 
dt:  tra ... all. a la  fin du  h ... re, 5ur la  maniere dont  l'auteur utilise  "Ecriture.  Le  rôle de l',xégèse  est de  mener le croyant à la
1 
ANAL YSE  0  T RAITE' 
14  15  , 
1  RODL(TlON 
-
-------------------~ 
1 
maux, ceux-ci  ne  venir de  D ieu, qui  agit  toujours 
p~uvent 
d,  'exégèse,  au  silence  de  la  contemplation.  G régoire 
,,:,,1 
avec  Le  ne  peut  proveni r  q ue  de  J'ho mme:  de 
bo~té. 
l'"'prime  dans  un  admirable,  le jour de son  ordina 
t~xte 
sa  Iiberte,  qUI  agft  contre  sa  natu re  profo nde,  ce lle  qUI  lUI 
'on . • Supposons quelqu'un, dans la chaleur de midi , che 
a  été  donnée,  lors  de  la  créat ion . 
!T'10er  la  tête  brûlée  par le  soleil,  qui  aspire  toute  l'humi 
dité du corps.  Rude est le sol que foulent les pieds,  la  route 
est  pénible.  ardue.  Soudain  voici  une  fontaine.  Les  ea ux 
\ 
Analyse  du  traité 
coulent, limpides et  transparentes.  En  abondance  les  nots 
s'olTrent  doucement  pour étancher la  soif. Va-t-il  s'asseoir 
Le  traité  se  en  trois  grandes  pa rties : 
di vi~e 
pres  de  cette  source  et  se  mettre  à  philosopher  sur  sa 
nature, en  scruter l'origine,  le  comment , le pourquoi, et  le  - la  thèse  - , phil osophique  ( 1-  15  ):  La  vision  de 
reste ...  ou  plutôt,  ne ·"a-t-il  pas  « ba lancer »  tout  cela,  se  l' homme  dans  sa  qouble  pa renté  avec  Dieu  et  avec  l'uni 
pencher pour approcher ses  lèvres des eaux vives el  vers. Vision d'abord idéale, hors de l'expérience histo rique. 
remer~ 
cier Celui  qui  lu i en  a fai t le  don ? Im ite donc cet assoiffé. »  Grégoire  a 'est  pas  un  naïf,  un  o pt imiste  inconllitionnel. 
Il  con naît  le "pessimi sme  des  tragiques  grecs  mais  ne  s'y 
l 
attarde  pas.  Il  préfère  s'en  prendre  aux  stoïciens,  qui  font 
Grégoire  de  ysse  et  le  liHe  de  la  Genèse  , 
de l' ho m me un  m icroco  me,  une  image  no n de  Dieu  mais 
Pour  G régoire  comme  pour  Basile  la  Genèse  fournit  1 d u cosmos, ce qui  finit  pa r absorber J'homme dans un pan 
une doctrine sur le  monde et sur l'ho'';me  dans leurs  ra p  théisme  matérialiste. 
, 
ports avec Dieu. Elle met à la  portée du pl~s grand  nombre 
- l'amitllése - biblique ( 16-20).  Face aux philosophies. 
la  magnifique ordon nance de J'univers ; elle permet à ceux 
la  Révélation  décrit  J'ho mme « créé  à  l'image  et  à  la  res 
qUi  a?ordem. ces  par l'intermédia ire de sa  pen 
problè~es 
se mblance  de  Dieu».  Lo in  d'opposer  comme  Philon  et 
see d  acquenr .Ia  connaissance  du  monde,  tel  qu 'il  a  été 
O rigène les deux réc;ls de la  création, Grégoire s'e!Torce de 
cree par la  sagesse,  qui est  celle de  Dieu (Préface  de 
vraIe 
de  r 
les  ha rmoniser. 
la  CréaI/on  l'homme). 
Le  premier  récit  présente  la  préexistence  de  l'homme 
,  Grégoire  ne  cherche  pas  le  sens  de  la  créati on  et  de 
dans l' intention de  Dieu: l'homme comme DÎeu  le  voit  le 
1 homme  dans, quelqu~ cosmologie  mais  dans  le  livre  du 
. 
' 
projette dans son  intention et  dans son  terme et son achè-
. Commencem,nt».  La  Dieu  nous  fait  découvrir  que  la 
vement  hi stori~ue.  Nous  sommes  ici  hors  de  J'histoire  et 
est  mOins  .œuvre  de  puissa nce  que  d'amour. 
c~eatlon 
du  temps  du  n:tystère  de  Dieu. 
L ho:;,me  surtout  lUi  apparaît  comme  « la  merveille  du  dan~ l 'intemE?:I!~ 
Le second reclt, au plan dO"'I  hIstOIre et du devenir, selon 
mon  e, qui dépasse en grandeur tout ce que nous connais 
-
sons~.  le  thème de  la  progression  cf,c.'r  à  Irénée,  est  le  temps de 
Il  ne sera pas sa  .  , - d 
J'expérience  historique.  ) 
G '  .  ns IOteret  e comparer l'enseignement de 
de 
c~~:(o),:~e d;~slala  CréQ/i~n 
l'homme  et  celui  de  sa 
,  :-Ia sJ'nthèse - (2 1- 30). Le devenir du temps est donné 
10/, 
années  et  posteneure  sans  doute  de  quelques 
a  1 homme  pour atteindre  et  réaliser  le  dessein  que  Dieu 
dam  1~/ol.qUI a  paru ,  en  1979,  dans  la  collection  Pères 
aval!  conçu.  Ce  sera  l'achèvement,  l'accomplissement 
mots) 
Dans la Catéchèse  1  "  l 'ac~ession à la perfection (Grégoire emploie tous ces 
lUI  paraI! bonne e '  ' . a ~reatlOnen tant qu'œuvre de Dieu 
de , 1 ~omme: aussi  bien de  l'Humanité, parvenue enfin a u 
, 
• 
semble  plus  ~I,  é~s:'1.  , e pal ~dls dont parle la Genèse lui  Plerome (c'est-à-dire, en grec, à la  Plénitude), que de cha 
qu  un  leu.  Si  l'homme  connaît  des 
que Individu humain,  de la mort, Comment cela 
-
/ 
\ 
, 
16  17  PRINC IPAUX  THEMES 
PRJNCIPAUX  TH EMES 
, 
s·ac(·om pli ra. c'esC  un  mystère: il  s'e,,;  re,mettre à  Di eu  traité de  la  Créa/ion!.e l'homme, Grégoire étudie le  t~ème 
r~ ut 
et  à  sa  toute-pui ssance.  Conformement  a  1 ense Ignement  sur le terrain ontol9Sique, avec une ouverture sur le derou 
de  Pa ul  la  résurrection  marquera  pour G régoire  l'achève- lement du  temps et du  devenir.  La différence entre créé et 
- <RCJ1t  d~ la  création  universelle , et  la  fin  du  temps,  désor  incréé  a  comme  conséquence  de  situer  l'homme  dans  le 
mais  inutile  au  perfectionnemen t  de  l'hom me.  Tout  sera  temps  et  le  changel11ent,  Dieu  est  immuable  et  n'est  pas 
accompli,  tout  sera  rétabli  (c'est  le  sens  du  mot  « apo  soumis au  temps. 
1  . 
catasta, e»,  «rétablissement »)  dans  sa  dignité  première ,  La  mutabilité  de  l' homme ,  qui  constitue  sa  nature  hIs 
qui  prendra  une  forme  nouvelle.  Déba rrassé  des  contin  torique,  s'expri me  d'l'bord: 
gences  de  la  matière,  l'U ni vers  s'ouvrira  à  la  liberté  du  - dans sa  création  même ,  qui  est  passage  du  non-être 
Christ.  On  voit  ce  que  la  pensée  de  Grégoire  peut  avoir,  à  l'être  modification  pour celui  que  Dieu  fait  exister..  
, 
pour  ainsi  dire,  de  teilha rdien  o u  plus  justement  ce  que  - dans  la  prévisi«>n  divine.  En  créant  l'homme  hbre, 
, 
, 
Teil hard a  de  grégorien .  Dieu  se  doit d'en  mesurer les  conséquences, de  prévoir le 
mauvais  usage  , t  les  infidélités. 
- la  division  en sexes  s'inscrit dans cette éeon6mie du 
, 
Principaux  thèmes 
devenir, du changement et du temps.  Elle caractérise l'éco 
nomie de  la  mutabilité  et  du  temps  mais s'achèvera avec 
L'archétype e/ l'image  . 
elle. 
Tous les auteurs sont d'accord pour reconnaître 1",  place 
La  sexualité  n'est  pas  la  conséquence  d',lÎne  faute  ou 
centrale  que  la  doctrine  de  l'image  occupe  dans  le  traité 
d'une chute mais d'une condition, d'une nature temporai 
sur  la  Créa/ion  de l'homme  et  dans  toute  l'anthropologie 
rement  muable et fragile,  soumise au conditionnement du 
grégorienne.  Elle  est,  dit  Leys,  «la clef de  sa  doctrine  spi 
temps (avec  la  procréation). Ce caractère surajouté et pro 
rituelle,  la  p(èce  maîtresse  de  sa  spéculation  théologique, 
visoire de  la  sexualité  dans  l'ordre  providentiel  pour 
~ntre 
l'argument  dé.isif de  sa  polém'que contre  Eunome».  Elle 
le  développement de  être. 
n~ 
es. t  «point  de  départ  et  but  de  toute  l'hi stoire  humaine» , 
D'où  une  certaine  ambiguïté,  connaturelle  ail  devenir 
ajoute  W.  Vôlker. 
humain,  où  la  et  la  passion  sont à  la  fois  consé 
sex~alité 
Le  paradoxe  cl,e  la  transcendance  divine  est  qu'elle 
quence  d'une  défiFience  de  la  liberté  (péché),  et  bienfait 
puISse  se  communiquer.  Dieu  donnant  ne  peut  que  tout 
indéniable  pour  l'/lomme. 
donner  s',1  fait  participer  l'homme  <<à  tous  ses  biens» . 
La  pensée de G.régoire s'e«f.tt,e en deux phrases capi 
D,eu.  se  donne  lui·même,  ce  pourquoi  l'image  comient 
tales:  « Nouil sommes image  dans la  pres 
~s  puis~nce 
nudealfement tous les attributs de Dieù, sa  nature comme 
ciente  de  Dieu qui,  dès  l'originé,  •e    l'humanité comlDe 
se~ energ,es,  y compris  son  caractère  d'incompréhensibi 
un seul  corps.»  En même temps n  us ne devenons 
hte .. Le  mystère  insondable de  l'â me  humaine est  le  renet 
que  peu à peu, par le choix de la liberté, rendu 
de  1 lnc?mpréhensibilité  de  Dieu. 
par notre condition temporelle (ch.  22). Chaque individu 
Archetype et  ima  d'  . 
.  ge  ne  se  Istlnguent donc  pas par leur 
participe à  sa  manière  pelliOnnelle  «à toutes la açtiYiMs 
«l' nature» ,n., leurs qualités mais par leur mode d'existence 
un est cree  l'aut  .  , .  .  ,  par lesquelles la nature divine est  chez celui qui_ 
l'u  l"  re Incree. La dIfférence essentielle est que 
n est.  autre  a.  à  son  image.  L'Esprit  habite  III  ..... 
(ch.  16). 
pe!=~lance  l'a~chétyp~ 
et différence  entre  et  1 
Grégoire insiste sur l'unité des
1 
19  PRI NCIPAUX  nu.M lS 
~----------------------------
hommes  aux  derniers  est  une  image  unique  de  Celui  qui  tion  (ch.  12).  Die u  n'est /as la  ca use du  mal , pas plus que 
esC"  (<;h.  16).  L'image  est  donc  la  collecti,vi té  ne  l'est  quelque  principe  ma nic héen  du  mal.  Certe;, 
hu":,ain~ 
dans son  achèvement,  le  Chnst  total,  tel  qu 11  sera  rea hse  l'homme  a  été  victime  de  Sata n  et  de  ses  ruses  (ch.  20): 
à  la  fin  du  temps,  tel  que  l'artiste-créateur  le  VOit  dès  le  mais  le  res ponsab le  du  mal  est  l' homme  lui-même,  qui  a 
premIer  I• nstant.  succombé  à  la  tentatio n . 
Grégoire  de  Nysse  tire  du  double  réci t  de  la  création 
Le  temps 
deux  conclusions essentielles: 
- un  seul  homme,  appelé  Adam  c'est-à-dire  <de  ter  La  longue  reconquête  par  l'ho mme  de  sa  dignité  pre 
reux »,  désigne  l'ensemble  de  l'humanité.  Il  s'agi t  donc  mière  rend  compte  du  rô le  du  temps dans  l'anthro pologie 
d'une appellation collective.  L'évêque de  Nysse  rejoin t  ici  de Grégoire (ch. 22). Si  Dieu, de  to ute  éte rnité, a  conçL  le 
l'exégèse  la  plus  moderne.  «plérôme»  huma in ,  le  te mps  est  nécessaire  à  l'homme 
- l'humanité  est  à  comprendre  comme  un  tout.  dans sa  progressio n  vers  l'achèvement  de  son  espéce.  Cer 
Comme  telle,  elle  est  l'i mage  unique  de  Dieu .  En  D ieu  tçs,  il  est  en  un  ce rfa in  sens  la  marque  de  la  déc héance 
l'image  équivaut  à  la  totalité  concrète  de  l'huma nité,  au  humai ne:  l' homme,  tourna nt  le  dos  à  Dieu,  glisse  aussi 
corps  mystique  en  son  entier  tel  que  le  déroule ment  du  hors  de  l'éternité  da ns  le  do ma ine  du  temps.  Il  n 'en  reste 
temps  le  mènera  à  sa  pleine  stature  et  à  son  plerôme.  pas  moins  qu 'i l  a  son  rôle  à  jo uer  dans  l'économie  du 
salut : comme le temps est  nécessa ire au mûrissement de la 
La  chute  et  le  mal (ch.  20) 
moisson  (fin  du  c h.  22),  il  est  également  indispénsable  à 
Alors que dans  un  passage, G régoire  semblai t sacrifier à  l'épano uissement  de  l'humanité  et  de  la  création  tout 
la  thèse  platonisante  de  Plotin  sur  la  responsabilité  de  la  entière,  dé livrée  des  douleurs  de  l'enfantement ;  cet  épa 
matière (ch.  12), il  place la  matière  hors d 'accusatio n dans  no ui ssement  une  foi s  atleint,  le  temps, désormais  inutile, 
le  désordre  du  monde:  elle  est  en  soi  indifférente,  elle  disparaîtra  au  moment de  l';H'OCatastase, c'est-à-dire dans 
prend  beauté  ou  laideur  selon  la  détorminatio n  de  la  la  resta u ration  universelle  ét  finale . 
liberté  humaine. 
La  théologie  de  l'h istoire, chez Grégoire de  Nysse  dont 
La pensée de G régo"i(e  sur l'origine du mal tient en deux  les modernes ont releve!  l'actualité, se ramène à  trois carac 
1 
proposIt ions: 
téristiques  essentielles: 
- le  péché  est  l'œ uvre  de  la  liberté.  - e lle est théologale. Elle  dans le  mystère du 
s'el)l1'~me 
- l'ho.mme a  péché « pa r ma nque d 'expérience », man- Dieu de  la  révélation. C'est là qut tl/omme surtout trouve 
que  de  discernement,  égarement,  igno rance.  Ce  qui  rap  l'explication  de son  origine, de  sa  sl\"U;;ture  et de sa desti-
, 
pr~he  cu ne usement  Grégoire  des  thèses  d'Irénée  (cf.  nee. 
~ 
~redicallon  apo~toliqlle).  Le  péché  s'introduit  dans  - elle est chris/alogique. Grégoire montre dans ses étu 
1 homme  par  la  seduction  du  plaisir.  Le  plaisir  s'insinue  des le  rapport entre le Christ et le temps, entre sa structure 
mSldleusement comme le  serpent de  la  Genèse, et devient  ontologique  d'Homme-Dieu,  sa  condition  historique, 
amSI «la  ra~me de  tous  les  maux»  (ch .  20).  «l'immixtion du divin  dans l'humain »,  modèle et  prémi 
. La  hberte  humaine  permet  à  Grégoire  d'apporter  sa  ces  de  la  transformation  et  de  la  ressemblance  du  corps 
~~se  au  c1ass,que  problème  du  mal.  Si  le  mal  existe  total,  ce  qui  éclaire  le  sens  et  la  fin  de  l'histoire  et  du 
ns  e ?londe, si l'bumme est soumis au  pe' ché  c'est qu'il  temps, 
a  tourne  le  d  ' l"  1  .  ' 
os  a  ec ar-de..la l umière  du  Bien '  le  miroir  - elle est escha/ologique (tendue vers la fin), En 
que nous sommes  d ' l'bé  '  , 
a  e  rement refusé de remplir sa fanc- guant  nettement  les  deux  plans de  l'éternité et du  tenelmifll, 
1
1 
20  , 
, 
ce qui est cn  Dieu ct ce q.Ji  est soumis au devenir, Grégoire 
e;,qu,sse  une  théolog:e  de  l'homme et de  l'histoire jusqu'à 
l'achèvement.  Anthropologie qui  est  en  même  temps  une 
;\.:le,chatologie:  réalisat,on d travers le  temps du Christ to ta l, 
dans  l'Image  parfa'te,  unique  et  universelle', 
J,-Y,  Guillaumin  et  A,-G,  Ha mman 
, 
Contenu  du 
trait~ 
'_m. 
Préambule: uttn de Grigo;rr G .If/tin  lIommage a BaJI/r, 
Bien  qu",d,gne,  Gréf.(OIre  \'U completer  lA'  dr 
~(Jn aU'Vff!.  pa,ad().l~ 
l'homme. 
, 
CA."itn 1  - ((  La na/Url!  parlf(:ulr"'e du  nron~e: u  qUI a  pricbJi 
l'apparition  de  l'homme  }} 
~' 
c.rl. 
Pe5unteur el légèrrté. Fixilé el mouW-rPWnI.  Te,re el  CIUtlCU" 
intermédiaIre  de  l'a" el de  l'eau.  lA le"e esl fixe.  mais SOUMLW  à 
/'ë\'olmion . le  fiel. qlll 11 'ém/ue pal. "'Q pin de fixaI : a.ilui. "i l'lUI Il; 
l'azure ne saurall être O,ru  La le"' aWJ1I1 l'appaff"OIt fk 1'1tomfft#  Ky 
r 
beauté  sans  Maitre 
CluJpitrr 2  - «PourquoI C '('SI  ap"} 10.  ,,:talion ft lfIOIfM.  ft II 
dernier.  que  àéé l'homme. " 
fUI 
1 
Les men'elllej {je /'umwr.\ {,","haux. 
\  pOlir l 'homme qlr,' dOll lel J( miner: il  donc 
~j, 
pri!âde l'appan IOn  de l'ho,,,,"-... Ln dnL'C  .r;' ;, 
dam  la  crNuon' de 
l'homme .Y'I,.~yill ~, I~ 'e"~strr. 
hu:na~ ~J' 
•  Ci"';',. l  - «La na'u,e  plus ptkiftl# qw  Il 
IOIIM' 
création  visible. » 
SI  Dieu «imp,ov;s~» la c,la,ioll.l'"ni~,s~' •  .ses l'ItIIIf'WiIItsll 
n 'enlreprmd ce/I. d. l'homm.  allOir dljini  jillGlilh " 
qu'apm 
:In 
"ut • 
prépare  sa  malièrt,  qui monl" qw Dwu  auocM phu • 
ft 
n"'''. 
l'homme qu 'au  tk s,s 
"s/~ 
CItqIm 4  - «La crftUiolt •  /'itotfurtt .ipj/It _  ".",. 
domina/jOlI  su, l'uniulS..  " -
La nobI.SM •  l''- . . . . .  "" • 
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