Table Of ContentCollection
Entreprises et société
Sous la direction de Bernard Deforge
et Laurent Acharian
OUVRAGES DE LA COLLECTION
ENTREPRISES ET SOCIÉTÉ
« »
Xavier Fontanet,
Si on faisait confiance aux entrepreneurs, 2010
Jean Emmanuel Combes,
Pour que votre retraite soit un succès, 20 Il
Laurent Acharian, Philippe Degonzague, Marc Gerretsen,
Les Cent Jours des dirigeants, 20 Il
Sylvie Gilbert,
Femmes d'altitude, 2012
Maurice Thévenet,
Managers en quête d'auteur, 2012
Institut Montaigne,
Réformer par temps de crise, 2012
Patrick Artinian,
Visages de France 2012, ma campagne électorale, 2012
Institut Montaigne,
Intérêt général, que peut l'entreprise ?, 2013
Edgard Added, Carine Dartiguepeyrou,
Image et rayonnement du DRH, 2013
Bertrand Martinot,
Chômage: inverser la courbe, 2013
Arnaud Robinet & Jacques Bichot,
La Mort de l'État providence. Vive les assurances sociales l, 2013
David Brunat
Giovanni Falcone, Un seigneur de Sicile, 2014
Yves Morieux et Peter Tollman
Smart Simplicity. Six règles pour gérer la complexité
sans devenir compliqué, 2014
Robin Rivaton
La France est prête. Nous avons déjà changé, 2014
Cécile Philippe
Trop tard pour la France? Osons remettre l'État à sa place, 2014
Edgard Added, Carine Dartiguepeyrou, Isabelle Lamothe, Robin Sappe
DRH, Le choc des ruptures. Demain le DRHsera ... , 2014
Julien Damon, Christophe de Voogd, Gaspard Koenig, Cécile Philippe
50 matinales pour réveiller la France, 2015
Jacques Bichot, Labyrinthe. Compliquer pour régner, 2015
À PARAÎTRE
Laurent Kott, Antoine Petit
Chercheurs et entrepreneurs: c'est possible 1 Belles histoires du numérique à la française
GOUVERNER AVEC LE MONDE
OUVRAGES DE JEAN-FRANÇOIS PRADEAU
Le monde de la politique. Sur le récit atlante de Platon, limée
(17a-27b) et Critias, Sankt Augustin, Academia Verlag, 1997.
(direction) Platon : les formes intelligibles, Paris, Presses
Universitaires de France, 2001.
Plato and the City: A new Introduction to Plato's Political
Thought, Exeter, University of Exeter Press, 2002.
L'imitation du principe. Plotin et la procession, Paris, Vrin,
2003.
Platon, les démocrates et la démocratie. Essai sur la réception
contemporaine de la pensée politique platonicienne, Naples,
Bibliopolis, 2005.
(en collaboration avec Luc Brisson) Les Lois de Platon, Paris,
Presses Universitaires de France, 2007.
La communauté des affections. Études sur la pensée éthique et
politique de Platon, Paris, Vrin, 2008.
Platon, l'imitation de la philosophie, Paris, Aubier, 2009.
(direction) Les Sophistes. Écrits complets, Paris, Flammarion,
2 vol., 2009.
(direction) Histoire de la Philosophie, Paris, Seuil, 2009.
(direction) Philosophie antique, Paris, Presses Universitaires
de France, 2010.
Platon et la cité, Paris, Presses Universitaires de France, 20102
•
Dans les Tribunes. Éloge du supporter, Paris, Belles Lettres,
2010.
JEAN-FRANÇOIS PRADEAU
Réflexions antiques
sur la mondialisation
MANITO
2015
366701
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Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation
réservés pour tous les pays.
© 2015, Société d'édition Les Belles Lettres,
95, boulevard Raspail, 75006 Paris.
ISBN: 978-2-251-89008-1
AVAN'T-PROPOS
Les philosophes anciens ont réfléchi et écrit sur le rapport de la cité
et du monde. Ils ont ainsi conçu, en leur ternps et selon les conditions
qui leur étaient propres, ce que l'on peut à bon droit appeler des thèses
« cosmopolitiques ». L'objet de cet ouvrage est d'exposer ces thèses, et
de montrer quel intérêt elles conservent aujourd'hui, alors que nous
réfléchissons avec une certaine inquiétude à la forme que peut ou que
doit prendre notre appartenance citoyenne au monde. Dans le débat
contemporain - celui de la « mondialisation », celui des nouvelles formes
de relations internationales ou d'internationalisation des biens et des
échanges -, les réflexions d'hier peuvent être entendues avec profit.
Mais l'exposé historique des arguments philosophiques anciens a sans
doute un intérêt plus profond que celui d'une simple comparaison
rétrospective. La lecture des philosophes de l'Antiquité enseigne avec
une certaine simplicité que la vie humaine, qui est une vie politique,
c'est-à-dire une vie qui n'est possible que dans les limites instituées
d'une communauté civique, ne peut atteindre la tranquillité ou le
bonheur sans apprécier à sa juste mesure la place qui lui convient dans
le monde. Il est néfaste et finalement impossible de vivre sans se faire
une certaine idée de ce monde et de son ordre, sans se représenter, ne
serait-ce que de manière vraisemblable, ce qu'est l'univers et la place
qui nous y est dévolue.
En des termes savants qui rendent assez mal ce que cette exigence
a de naturel et de nécessaire, les philosophes anciens tenaient qu'il
n'est pas de politique sans cosmologie. Ou bien encore, qu'il n'est
pas de politique sans mythe, c'est-à-dire sans une représentation du
10 GOUVERNER AVEC LE MONDE
monde susceptible d'être partagée par l'ensemble des citoyens. C'est
cette leçon qui a retenu notre attention dans cet ouvrage.
Les penseurs anciens dont nous présentons les arguments conci
liaient le projet d'une politique éprise de vérité et de science à celui
d'une perception fidèle de la beauté et de la bonté du monde. Nous
donnons à lire ces arguments et les textes qui les portent, en privilé
giant certains d'entre eux, dont la pertinence nous a paru plus actuelle.
L'occasion était donnée de proposer au lecteur un parcours en philo
sophie ancienne qui l'éloigne de l'opinion malheureusement répandue
aujourd'hui selon laquelle la philosophie antique serait un mode de
{<
vie », une sorte de sagesse vulgaire dont la visée resterait étroitement
morale. L'ambition cosmologique et politique des philosophes anciens
était, on le verra, d'une tout autre ampleur.
INTRODU·CTION
CrrOYENNETÉ MONDIALE
ET MONDIALISA'TION
« Et à la fin il s'en alla, et se cantonnait dans l'observation des réalités
naturelles, sans s'inquiéter des affaires de la cité. C'est alors que, à celui
qui lui disait: "N'as-tu aucun souci de ta patrie ?", il répondit: "Tais-toi!
Car moi, de ma patrie, j'ai souci, et grandement", et il montrait le ciel.
»
DIOGÈNE LAËRCE, à propos d'Anaxagore 1.
On reconnaît aux anciens, et parmi eux avant tout aux stoïciens,
d'avoir introduit dans la réflexion politique l'hypothèse « cosmopoli
tique d'une appartenance citoyenne au monde. Cette appartenance
»
ne se laisserait réduire à aucune sorte d'appartenance civique ou natio
nale restreinte, mais s'en distinguerait, voire s'y opposerait, au point
que le « cosmopolite » puisse apparaître comme celui qui critique sa
citoyenneté de naissance, ou qui choisit d'y renoncer en lui préférant
une citoyenneté « mondiale ». C'est avant les débuts du stoïcisme
ancien, certes, que Diogène de Sinope, le philosophe cynique, « comme
on lui demandait d'où il était, répondit: "Je suis citoyen du monde."
1. DIOGÈ~'E iAËRCE, Vies et opinions des philosophes illustres, traductions sous la direc
tion de M.-O. Goulet-Cazé, Paris, Livre de Poche, 1999; ici, II 7, trad. par M. Narcy.
12 GOUVERNER AVEC LE MONDE
(XOeJ't.lOITOÀtT'r)ç/kosmopolites2) )}. Mais le provocateur n'en disait guère
plus, et c'est bien aux stoïciens qu'il allait revenir, peu de temps après
Diogène, de donner à cette boutade du cynique une justification à la
fois physique et éthique, et par là d'en faire une thèse et un véritable
mot d'ordre philosophique. Les historiens modernes ont ainsi pris
l'habitude de dater l'apparition d'une réflexion cosmopolitique, dans
les écrits et les enseignements philosophiques grecs, au tournant des
IVe et lUe siècles av. ].-C.
Pour autant qu'on puisse en juger au vu des textes qui nous sont
parvenus, le cosmopolitisme )} des stoïciens reposait sur des hypothèses
{<
et des arguments d'ordres distincts, dont il était la conséquence ou la
conclusion. Les stoïciens n'affirmaient pas d'emblée que l'homme fût
citoyen du monde comme s'il se fût agi d'un état de fait ou d'un droit
à faire valoir. Ils avançaient cette thèse au terme d'un raisonnement
qui déduisait cette citoyenneté mondiale d'une certaine représen
tation du monde, d'une explication de la constitution et de l'ordre
de toutes choses, et enfin d'une conception de la nature humaine,
de ses dispositions et de ses fins. Le cosmopolitisme stoïcien prit la
forme d'une exigence politique et critique, qui invitait le citoyen à
prendre la mesure de son appartenance à un monde de part en part
ordonné et rationnel, puis à se servir de sa raison afin de juger sa
propre conduite, de même que le gouvernement de sa cité, au nom
de la raison universelle, c'est-à-dire au nom de normes rationnelles et
universelles libérées des contingences et des conventions. Reconnaître
que le monde est tout entier l' œuvre d'un principe rationnel et que
nous pouvons le concevoir parce que nous sommes nous-mêmes doués
de raison, voilà l'hypothèse que les stoïciens plaçaient au principe de
leur cosmopolitisme. La lecture des textes que nous avons conservés
montre toutefois que cette hypothèse n'a guère été développée par les
2. Selon le témoignage que rapporte le doxographe Diogène Laërce (au début
du me siècle de notre ère), dans ses Vies et opinions des philosophes illustres; ici, VI 34,
trad. par M.-O. Goulet-Cazé. Diogène, qui vécut probablement entre les années
412 et 324 avant }.-C., était un contemporain à la fois de Platon et d'Aristote (et il
précède de trois ou quatre générations les fondateurs du Portique, le mouvement
stoïcien: le principal d'entre eux, Zénon, naît en 336). Comme c'est le cas ici pour
XOO"flO7TO"ÙI)Ç, les principaux termes grecs qui figurent dans cet ouvrage sont donnés
à la fois dans leur orthographe originale et sous une forme translittérée. Lorsque je
cite une expression ou une phrase empruntée à un texte ancien, j'adopte simplement
la forme translittérée.