Table Of ContentÉTIENNE LANGTON
PRÉDICATEUR, BIBLISTE, THÉOLOGIEN
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BIBLIOTHÈQUE D’HISTOIRE CULTURELLE
DU MOYEN ÂGE
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Collection dirigée par
Nicole Bériou et Franco Morenzoni
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ÉTIENNE LANGTON
PRÉDICATEUR, BIBLISTE,
THÉOLOGIEN
Études réunies par
Louis-Jacques Bataillon †, Nicole Bériou,
Gilbert Dahan et Riccardo Quinto
2010
F
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H
© Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium
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D/2010/0095/80
ISBN 978-2-503-53519-7
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AVANT PROPOS
Pour les générations précédentes, Étienne Langton était avant tout un
homme politique, célèbre dans l’histoire de l’Angleterre et dont le nom était
lié au sort tumultueux de la Magna Carta, même si, déjà, la monographie de
Maurice Powicke contenait des chapitres sur son rôle intellectuel1 et si un
inventaire fouillé des manuscrits de ses commentaires bibliques avait été
publié dès 19302. Pour nous, aujourd’hui, Étienne Langton est surtout un
auteur majeur, à cheval sur le xiie et sur le xiiie siècle, dont la production de
bibliste, de théologien, de prédicateur constitue une étape importante dans
l’histoire de la pensée médiévale.
À cheval sur le xiie et le xiiie siècle : ce moment est particulièrement si-
gnificatif, puisque c’est celui qui voit la transition entre l’enseignement des
écoles et celui de l’Université. Écoles parisiennes multiples au cours du xiie
siècle, aussi bien celle des chanoines réguliers de Saint-Victor, que les expé-
riences tourmentées de Pierre Abélard, sur la montagne Sainte-Geneviève ou
ailleurs. Écoles qui connaissent leur apogée avec l’enseignement rattaché à
l’évêché parisien et qu’illustre un premier maître prestigieux, Pierre Lom-
bard, qui sera suivi d’enseignants tout aussi fameux, qu’il s’agisse de Pierre
le Mangeur (Comestor), de Pierre le Chantre ou, justement, d’Étienne Lang-
ton. On aura reconnu ainsi les principaux auteurs que l’on classe sous
l’appellation d’« école biblique-morale », en tant qu’ils enracinent leurs recher-
ches doctrinales dans l’Écriture sainte, dont ils ont voulu, chacun à sa manière,
couvrir l’ensemble des données.
Ces maîtres contribuent aussi à l’essor de ce que l’on appellera plus tard
la théologie, la réflexion systématique sur les données de la Révélation. Avec
le Livre des Sentences de Pierre Lombard (et malgré la production de recueils
similaires dans la génération qui suit), une ère nouvelle commence3, qui clôt
1 M. Powicke, Stephen Langton, Oxford, 1928 (plusieurs rééditions) ; voir notamment les cha-
pitres II, « Langton at Paris : his Biblical Studies », et III, « Langton at Paris : his Questiones »
(et les appendices sur les sermons et sur les manuscrits des Questiones).
2 G. Lacombe et B. Smalley, « Studies on the Commentaries of Cardinal Stephen Langton »,
AHDLMA, 5 (1930), p. 5-220.
3 Le Livre des Sentences a été récemment l’objet d’un regain d’intérêt ; après les deux volumes
de M. Colish, Peter Lombard, Leyde-New York-Cologne, 1994, un important colloque a été
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ce qu’on peut considérer comme une période de préparation avec la littérature
des recueils de sentences, que l’on qualifie parfois de « pré-scolastique »4. Le
Livre des Sentences va être désormais le guide majeur et l’on pourra rédiger
des sommes « spécialisées », comme le De sacramentis de Pierre le Mangeur
et la Summa de Pierre le Chantre, ou bien, et peut-être surtout, commenter
l’ouvrage de Pierre Lombard, comme Étienne Langton semble être l’un des
tout premiers à le faire.
Autre évolution dans l’histoire littéraire et doctrinale de cette seconde
moitié du xiie siècle : l’importance de la quaestio. Née à la fois de l’enseigne-
ment de la Bible et de la réflexion autour des recueils de sentences, la question
théologique se développe5 – les recueils de questions devenant un genre bien
illustré à la fin du xiie siècle : Étienne Langton joue dans cette évolution un
rôle majeur.
Même si l’histoire des débuts de l’Université parisienne semble assez
floue, on peut affirmer qu’Étienne Langton n’y a pas participé. En revanche,
toute son œuvre annonce, prépare la production universitaire de la faculté
de théologie : le commentaire des Sentences sera au xiiie siècle l’un des exer-
cices majeurs de son enseignement, la quaestio sera la forme privilégiée
d’exposition de la doctrine. L’autre livre de base de l’enseignement est bien
entendu la Bible et, là encore, l’approfondissement sur le plan tant de l’exégèse
littérale que de l’exégèse spirituelle fourni par les commentaires de Langton
annonce, mutatis mutandis, les méthodes de l’Université – l’un des auteurs qui
assurent la transition entre exégèse scolaire et exégèse universitaire, Hugues
de Saint-Cher, exploitant assez largement ceux de Langton.
Venant s’ajouter à la masse documentaire encore en partie inédite des
commentaires bibliques et des exposés théologiques argumentés, les très
nombreuses traces écrites des sermons d’Étienne Langton, recueillies le plus
souvent par ses auditeurs, attestent son intense activité de prédicateur. Elles
permettent aussi de mieux mesurer le rôle joué par ce maître séculier formé
tenu, dont les actes viennent d’être publiés : Pietro Lombardo. Atti del XLIII Convegno Storico
Internazionale, Todi, 8-10 ottobre 2006, Spoleto, 2007. La tradition des commentaires sur ce
texte est étudié dans Medieval Commentaries on the Sentences of Peter Lombard, t. I, éd. G. R.
Evans, Leyde-New York-Cologne, 2002 ; t. II, éd. Ph. W. Rosemann, ibid., 2009.
4 Voir là-dessus, l’ouvrage classique d’A. M. Landgraf, Einführung in die Geschichte der theo-
logischen Literatur der Frühscholastik, Regensburg, 1948 (dans sa trad. française mise à jour,
Introduction à l’histoire de la littérature théologique de la scolastique naissante, Paris-Montréal,
1973). Voir, en tout dernier lieu, sur les sentences d’Anselme : C. Giraud, “Per verba magis-
tri.” Anselme de Laon et son école au xiie siècle, Turnhout, Brepols, 2010 (Bibliothèque d’histoire
culturelle du Moyen Âge 8).
5 Voir notamment B. C. Bazan, « Les questions disputées dans la faculté de théologie », dans
B. C. Bazan, J. W. Wippel, G. Fransen et D. Jacquart, Les questions disputées et les questions
quodlibétiques dans les facultés de théologie, de droit et de médecine, Turnhout, 1985 ; O. Weijers,
“Queritur utrum”. Recherches sur la ‘disputatio’ dans les universités médiévales, Turnhout, 2009
(Studia Artistarum 20).
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Avant propos 7
à Paris dans les renouvellements de la prédication dès la fin du xiie siècle, en
prélude au déploiement systématique de la pastorale des frères mendiants.
Il nous a paru utile de refaire le point sur ces différents aspects de l’œu-
vre de Langton : lectio, disputatio, praedicatio, il réalise le programme bien
connu défini par Pierre le Chantre. Mais il nous a paru également utile de
faire le point sur le rôle politique et sur la carrière d’Étienne Langton.
Nous présentons ici les actes d’un colloque international, qui s’est tenu
à Paris, au couvent Saint-Jacques, du 13 au 15 septembre 2006. Ce colloque
avait pu être organisé grâce aux subventions fournies par l’Institut Universi-
taire de France, le Département de Philosophie de l’Université de Padoue,
l’École pratique des hautes études, le Laboratoire d’études des monothéismes
(CNRS-EPHE) et notamment sa composante Institut d’études augustinienens
et par l’accueil réservé par le Centre d’études du Saulchoir. Il nous plaît de
remercier ici très vivement ces institutions, qui contribuent d’une manière
efficace à la diffusion des connaissances et à l’essor des disciplines histori-
ques.
Un quatrième nom aurait dû signer cette préface, celui du Père Louis-
Jacques Bataillon, op, décédé le 13 février 2009. Non seulement, son efficacité
dans la préparation du colloque était grande – nous gardons un souvenir
attendri des passionnantes réunions de préparation de ce colloque. Mais éga-
lement, jusqu’à son dernier souffle, il a suivi la fabrication (lente et cahotique !)
de ces actes, faisant parvenir ses observations et ses corrections avec une
régularité et une ponctualité qui suscitaient notre admiration. Oui, jusqu’à
ses derniers instants il a été parmi nous dans la confection de ce volume et
c’est à très juste titre qu’il figure comme l’un de ses éditeurs, posthume hélas !
En menant à bien cette publication, nous voulons aussi rendre hommage à sa
science, à sa disponibilité, à son amitié.
Nicole Bériou
Gilbert Dahan
Riccardo Quinto
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I.
Étienne Langton dans l’histoire
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Description:Étienne Langton est probablement un homme-clé dans l’histoire du Moyen Âge. Son implication politique à la tête de l’Église d’Angleterre, en tant qu’archevêque de Canterbury, est bien connue, de même que son rôle dans la promulgation de la Magna Carta, qui s’efforce de trouver une