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pédagogique
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SOMMAIRE
1 Préparer sa visite
à l’Historial Jeanne d’Arc
1.1. L’archevêché, quelle architecture ! P. 3
1.2. Le contexte historique P. 5
1.3. L’épopée de Jeanne d’Arc P. 6
1.4. Jeanne après Jeanne P. 7
1.5. L’Historial - de l’histoire au mythe P. 9
1.6. Pistes et activités pédagogiques P. 12
2 La visite de l’Historial
Jeanne d’Arc
2.1. Fiches élèves en classe P. 18
2.2. Fiches découverte sur site P. 28
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Les ressources
3.1. Bibliographie P. 33
3.2. Chronologie P. 33
3.3. Biographies P. 34
3.4. Lexique P. 35
3.5. Questions aux historiens P. 36
3.6. Ressources thématiques P. 41
3.7. Plan du site P. 43
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1 Préparer sa visite
à l’Historial Jeanne d’Arc
1.1. L’archevêché, quelle architecture !
Les XIIe et XIIIe siècles
Le premier palais épiscopal a été
construit au Xe sièTcEOlRe après la fonda-
Pasteur/Panorama
tion de la Normandie (911). On sait que
Guillaume BoPnannoream-aÂme, archevêque
XXL
de Rouen de 1079 à 1110 s’est fait
construire une élégante demeure, dont
le seul vestige est la crypte romane. Ce
palais roman a subi de nombreux dé- Historial
Jeanne d’Arc
gâts, particulièrement lors des incen-
TEOR
dies de 1200 et 1211 qui ruinèrent la Cathédrale
cathédrale et le quartier Saint Maclou.
La plupart des grands travaux effec-
tués ensuite a été attribuée à Guil-
laume de Flavacourt, archevêque de
Rouen de 1278 à 1306. Il est à l’origine
du domaine archiépiscopal tel qu’on le
connaît aujourd’hui ; il s’étend :
• sur l’axe Nord-Sud : de la rue Saint
Romain à la rue des Bonnetiers
• sur l’axe Est-Ouest : de la cathédrale à
la rue de la République
De ce palais subsiste une façade sep-
tentrionale rue Saint Romain (de la laquelle les sentences de condamna- l’on aperçoit à l’entrée de l’Historial.
tour cylindrique en surplomb jusqu’à la tion et de réhabilitation des deux pro- Absents de Rouen pendant la guerre de
tour octogonale, dite « tour de guet ») cès de Jeanne d’Arc ont été pronon- Cent Ans suite à la prise de la ville par
et également une salle à demi souter- cées. De cette grande salle, il ne reste les Anglais en 1419, les archevêques
raine (crypte gothique qui se trouve aujourd’hui que le pignon nord par le- se désintéressent du palais. Seul Louis
sous la chapelle d’Aubigné). Guillaume quel se fait l’entrée à l’Historial Jeanne de Luxembourg, archevêque de Rouen
de Flavacourt demande la construction d’Arc. Cependant elle est aujourd’hui de 1436 à 1442 y logea car il avait,
de la salle dite « de l’Officialité » dans matérialisée par la cour intérieure que quant à lui, choisit le clan anglais.
Le XVe siècle
C’est le cardinal Guillaume d’Estouteville, Le nouveau palais s’ouvre désormais
archevêque de Rouen de 1453 à 1483, sur la rue Saint Romain, en face de la
qui décide d’agrandir ce palais par une rue des Chanoines. Grandes fenêtres,
grande campagne de travaux réalisés tourelles, toit gothique donnent un as-
entre 1460 et 1466. Une partie de l’an- pect moins austère à ce palais où sé-
cien édifice est alors détruite. journa en 1462 le roi Louis XI.
Le XVIe siècle
Georges 1er d’Amboise, archevêque moins haut mais dont les construc- Le XVIe et le XVIIe siècle témoignent
très fortuné de Rouen de 1494 tions s’harmonisent bien avec celles d’un abandon certain, les archevêques
à 1510, entreprend, lui aussi, des tra- de l’époque d’Estouteville. Louis XII, préférant alors leur résidence d’été de
vaux d’agrandissements. En 1495- Anne de Bretagne et François 1er y Gaillon. Les bâtiments se dégradent
1496 il fait construire un bâtiment séjournèrent. alors rapidement.
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Le XVIIIe siècle
Il faut attendre le XVIIIe siècle et l’épis- la salle des États et construire l’esca-
copat de Claude Maur d’Aubigné, ar- lier d’honneur qui lui offre un superbe
chevêque de Rouen de 1707 à 1719, accès. Cette salle accueillera Louis XIV
pour que de nouveaux travaux soient lors d’une brève visite.
envisagés. Il fait notamment construire Pendant la décennie révolutionnaire,
une chapelle perpendiculaire à la salle le palais est encore la résidence de
des États. l’évêque constitutionnel jusqu’en
Monseigneur Saulx-Tavannes, arche- 1794 ; la municipalité y siége ensuite
vêque de Rouen de 1733 à 1759, puis quelques mois. Après le concordat en
Monseigneur de la Rochefoucauld, ar- 1802, un nouvel archevêque s’installe
chevêque de Rouen de 1759 à 1791, dans le palais mais sans aucune vo-
continuent tous deux de rénover le lonté d’entreprendre des rénovations
palais. Ils font, entre autres, restaurer pourtant nécessaires.
Jusqu’à nos jours
Des travaux furent finalement réalisés nal Dubois, est autorisé à revenir vivre
à la fin du XIXe siècle. Mais, en 1906, dans son palais en récompense des
un an après la loi de séparation de services rendus au gouvernement fran-
l’Église et de l’État, l’archevêque est çais au Moyen Orient.
contraint de quitter les lieux. Pendant L’archevêque de Rouen est donc le
la Première Guerre Mondiale le palais seul prélat français à vivre dans le pa-
est occupé par l’État-major anglais. En lais construit par ses prédécesseurs au
1919, l’archevêque de Rouen, le cardi- pied de la cathédrale.
La salle des États
La grande salle de l’hôtel d’Estouteville Rouen de 1759 à 1791, que le décor en
est appelée « salle des États » car elle plâtre marbré des murs est et ouest est
était le lieu où se tenaient les états de ajouté.
Normandie. Elle mesure aujourd’hui Les paysages peints par Hubert Robert
24 m de long, 9,45 m de large et 8 m sont ensuite placés entre les pilastres
de hauteur. Dans son état initial du du mur nord. Chaque tableau mesure
XVe siècle elle présentait de grandes 4 m de long et 3,20 m de hauteur. Ils
baies donnant au nord sur la rue Saint représentent les grandes villes du dio-
Romain. Des cheminées aujourd’hui cèse : Le Havre, Dieppe, Rouen, Gaillon
disparues sur les murs est et ouest (de droite à gauche). La vue de Rouen
permettaient de chauffer la pièce. est prise de la rive gauche avec, au pre-
La salle est complètement réaména- mier plan, la barbacane construite par
gée à partir du XVIIIe siècle. Les pre- les Anglais pendant la guerre de Cent
miers travaux sont réalisés en 1742 Ans et le pont construit en 1630. De
sous l’épiscopat de Monseigneur l’autre côté de la Seine on aperçoit la
Saulx-Tavannes, archevêque de Rouen cathédrale et sa flèche de plomb et de
de 1733 à 1759 ; la salle est alors bois qui fut détruite en 1822.
en très mauvais état. L’architecte en Quant au mobilier actuel, il a été mis en
charge, Mathieu Le Carpentier, agran- place sous l’épiscopat de Monseigneur
dit les cinq fenêtres donnant sur la cour Thomas (1884-1894) : deux statues de
au sud et fait boucher celles donnant Vasselot représentant Pierre Corneille Les vitraux, quant à eux, datent du
sur la rue Saint Romain. et Jeanne d’Arc abritées respectivement XVe siècle, ce sont des grisailles réali-
C’est sous l’épiscopat de Monseigneur dans les niches est et ouest, ainsi que sées par Jehan Barbe, maître verrier de
de la Rochefoucauld, archevêque de deux vases de la manufacture de Sèvres. la cathédrale.
La chapelle d’Aubigné
La chapelle dédiée à la Vierge Marie Ses dimensions sont importantes et ont été réalisés par Pierre Gaudin à la
est construite à la demande de Mon- elle est baignée de lumière grâce à ses fin des années 1950 dans un style très
seigneur Claude Maur d’Aubigné au huit grandes fenêtres. Celles-ci ne sont simple.
début du XVIIIe siècle. Ses fondations plus décorées de leurs vitraux d’origine,
élevées la placent à l’étage noble du soufflés par les bombardements de
palais. 1944. Ceux que l’on voit aujourd’hui
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1.2. Le contexte historique
La France avant Jeanne
Les débuts de la guerre de Cent Ans (1337-1364)
Pendant la guerre de Cent Ans, le roi die reconquise par Philippe-Auguste. Il En 1346, les Anglais débarquent dans
d’Angleterre contrôle plusieurs terri- construit alors le château de Bouvreuil le Cotentin et se lancent dans une
toires situés en France : la Normandie au nord de Rouen, où fut enfermée la véritable chevauchée : ils pillent Saint-
depuis 1047 et la Guyenne à partir de Pucelle pendant son procès en 1431 Lô, Caen et Louviers alors que Rouen,
1188. Pour ces deux provinces le roi et dont il reste aujourd’hui le donjon, dit Évreux et Mantes résistent.
d’Angleterre est alors vassal du roi de « la Tour Jeanne d’Arc ». En 1350, le roi de France Philippe VI dé-
France, une position humiliante qui si- Vient alors une longue période de trêve cède et son fils Jean II le Bon monte sur
gnifie qu’il doit faire allégeance et se entre l’Angleterre et la France, qui dure le trône. Il est fait prisonnier six ans plus
soumettre à son autorité mais elles jusqu’en 1337. tard (1356) par les Anglais. Le Dauphin
constituent du point de vue français un L’opposition des deux royaumes est Charles V se fait alors nommer régent
bon moyen de pression : loin de l’An- relancée en raison des difficultés éco- et devient maître du royaume. Jean II le
gleterre en cas de conflit, elles pour- nomiques existantes des deux côtés de Bon regagne la France en 1360 mais
ront être les premières attaquées. la Manche, ainsi que par la crise dynas- cède en échange un tiers du pays à
En 1204, l’Angleterre perd la Norman- tique en France. Edouard III, roi d’Angleterre.
La guerre de Cent Ans avant Jeanne (1380-1429)
En raison des crises religieuses et Jean Sans Peur le rattrape et le ra- conséquente, qui lui est refusée.
sociales, de nombreuses révoltes et mène à Paris. En 1407 il fait finalement En août 1415, les armées anglaises
émeutes naissent sur le territoire fran- assassiner Louis d’Orléans en pleine débarquent à Harfleur dont elles
çais. Mais l’Angleterre n’est pas épar- rue. Jean Sans Peur s’enfuit alors et la prennent le contrôle un mois et demi
gnée, elle non plus. France bascule dans une guerre civile. plus tard. La saison n’étant pas propice
En France, la folie qui gagne le roi Il s’oppose à l’héritier de Louis, Charles à une marche sur Paris, Henri V décide
Charles VI conduit à la mise en place d’Orléans. Ce dernier trouve peu de d’avancer vers le nord. Le 25 octobre
d’un conseil de régence constitué par partisans, mis à part le comte d’Arma- 1415, c’est la célèbre bataille d’Azin-
Isabeau de Bavière, les ducs de Bour- gnac dont il épouse la fille. Le nom court où l’armée anglaise met en dé-
gogne et Louis d’Orléans. d’« Armagnacs » indiquera dès lors les route la cavalerie française. En 1419
Les ducs d’Orléans et de Bourgogne, partisans de Charles VII, qui s’oppose- c’est Rouen qui est assiégée par les
respectivement Louis d’Orléans et Phi- ront aux « Bourguignons ». Les deux Anglais.
lippe le Hardi, se sont régulièrement parties se disputent la capitale et la lé- Parallèlement Jean Sans Peur a repris
affrontés. Quand Philippe le Hardi gitimité royale jusqu’en 1418. Paris et rejoint Isabeau de Bavière à
meurt en 1404 ; son fils Jean Sans En Angleterre, le roi Henri V accède au Troyes où il meurt assassiné. Son suc-
Peur lui succède. Celui-ci veut accéder pouvoir en 1413. Il reprend les reven- cesseur, Philippe III le Bon, se désin-
au centre du pouvoir et se présente à dications de ses prédécesseurs en ce téresse des royaumes de France qui
Paris avec une armée. Louis d’Orléans qui concerne la France. Il demande la ont coûté la vie à son père. En 1420, il
tente de s’enfuir avec des troupes, mais main de la fille de Charles VI et une dot signe le traité de Troyes.
La guerre de cent ans à l’époque de Jeanne d’Arc (1407-1422)
Pour le trône de France
En 1420, les Anglais, avec la complici- Bourguignons, partisans des Ducs de plusieurs prophéties annonçaient une
té de Philippe Le Bon (Duc de Bour- Bourgogne Jean Sans Peur puis Phi- Pucelle qui viendrait sauver la France.
gogne), imposent le traité de Troyes qui lippe le Bon. À cette époque, on attend Ainsi, Marie d’Avignon affirmait qu’une
exclut Charles VII de la succession et une intervention divine : soit Dieu met Pucelle revêtirait les armes et libérerait
place le futur roi d’Angleterre (Henri VI) fin à l’Humanité par l’Apocalypse, soit le royaume de ses ennemis. C’était une
sur le trône de France. La légitimité du il fait cesser tous ces malheurs en en- visionnaire reconnue dont les prophé-
fils de Charles VI est en effet contestée. voyant une aide divine. Prophètes et ties faisaient le tour de France : « la
Cette époque est donc marquée par prophétesses sont donc très nombreux. France, perdue par une femme, sera
une guerre civile qui oppose les Arma- Les rois de France se font un devoir restaurée par une Pucelle venue des
gnacs, partisans de Charles VII, et les de les recevoir et de les écouter. Or, marches de Lorraine ».
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Du côté militaire…
Les armées étaient peu nombreuses, but est de récupérer les places fortes breuse que l’armée anglaise par ail-
entre 12 000 et 18 000 soldats an- l’une après l’autre. leurs composée d’excellents archers.
glais lors de la bataille d’Azincourt Orléans qui avait pour exemple un sta- Mais, grâce au sacre de Charles VII,
(par exemple), les opérations mi- tut de « verrou » sur la Loire est assiégé les soldats retrouvent confiance, l’in-
litaires s’arrêtaient donc pendant en 1428. Jeanne d’Arc, avec l’armée de fériorité numérique de la France n’est
l’hiver. Des stratégies pour pallier le Charles VII, ne viendra la libérer qu’en alors plus si importante et cela pro-
manque d’effectifs et de moyens évo- mai 1429. voque une peur panique chez leurs
luent vers la guerre de sièges, dont le L’armée française est moins nom- adversaires.
1.3. L’épopée de Jeanne d’Arc (1428 – 1431)
Domrémy
Jeanne d’Arc naît vers 1412 à Domré- qu’elle identifie à celles de Sainte Ca- branches les plus basses étaient
my, un village situé en Lorraine près therine, de Sainte Marguerite et de accessibles aux enfants, sous les-
de Vaucouleurs. Cette cité est l’une Saint Michel. Ces voix lui parleraient quelles se trouvait une fontaine.
des rares villes restées fidèles au au nom de Dieu pour lui confier une C’est cet arbre qui est évoqué par
Dauphin Charles VII quand la région mission, celle d’aller trouver le Dau- les juges de Jeanne d’Arc au procès
est envahie par les Bourguignons. phin, et de l’amener à Reims pour le de 1431 et qui, selon eux , donne
Enfant, Jeanne participe aux tâches faire couronner roi. une preuve de sa sorcellerie car
de la maison et de la ferme. Elle est En lisière des bois de Domrémy, vi- croire aux fées est une forme de su-
très pieuse et se rend souvent à sible de la maison de Jeanne d’Arc, perstition qui n’est pas acceptée par
l’Église de son village. se trouve un arbre appelé « Arbre l’Église. Montaigne alla même l’admi-
À 13 ans, elle dit entendre « les voix » aux fées », un grand hêtre dont les rer au XVIe siècle.
Du départ pour Vaucouleurs aux examens de Poitiers
En 1428, à 17 ans, elle décide de quit- réussit à le convaincre de l’amener à ou infirmer son statut de prophétesse.
ter ses parents et sa maison, pour se Chinon où le Dauphin s’est réfugié Ils doivent également attester de son
rendre à Vaucouleurs, une forteresse après la prise de Paris par les Anglais. statut de vierge ; les examens s’avèrent
proche de Domrémy. Là, elle espère y Elle se présente à Charles VII comme positifs.
rencontrer Robert de Baudricourt, le ca- une prophétesse, elle-même annoncée Charles VII finit par faire confiance à
pitaine de la place, pour qu’il l’emmène par la prophétie de Marie d’Avignon, Jeanne d’Arc, et l’équipe d’une armure,
voir le roi. Dans un premier temps, Bau- une pucelle qui porterait l’armure pour d’une épée et d’un étendard. Il lui met
dricourt ne la recevra pas, la menaçant sauver la France. à disposition des soldats pour aller
même de la renvoyer chez ses parents. Charles VII veut y croire, et l’envoie à délivrer Orléans alors assiégée par les
Mais, appuyée par plusieurs personnes, Poitiers pour subir des examens et des Anglais, première étape de la mission
Jeanne d’Arc finit par être reçue et interrogatoires qui visent à confirmer confiée par « ses voix ».
D’Orléans à Compiègne
Après plusieurs combats, Jeanne d’Arc taille de Patay, Troyes et Reims. et les Armagnacs ont beaucoup tardé.
et l’armée de Charles VII prennent les La deuxième partie de sa mission est Le roi demande alors à ses troupes de
forts de Saint-Loup, des Augustins et de faire couronner Charles VII à la ca- revenir pour ne pas essuyer une dé-
des Tourelles. Ils libèrent finalement Or- thédrale de Reims, comme tous ses faite flagrante devant Paris.
léans de l’emprise des Anglais le 8 mai prédécesseurs depuis le IXe siècle. Elle Une fois revenue auprès du roi, elle dé-
1429. y parvient et confiante, elle demande cide de libérer Compiègne des mains
Le Dauphin lui fait alors totalement alors à se rendre à Paris pour libérer la des Anglais et des Bourguignons. Le
confiance. Elle entre dans Orléans ville des Anglais. roi l’autorise à partir seule avec une ar-
victorieuse, la population et les sol- Or, Charles VII négocie parallèlement mée mais, cette fois encore, la chance
dats croient en elle et aux « voix » qui et secrètement une paix avec les An- semble avoir tourné. Elle est mise à bas
semblent la guider dans sa mission. glais et les Bourguignons. Il autorise de son cheval et faite prisonnière. Après
Jeanne d’Arc souhaite alors se rendre tout de même Jeanne d’Arc à partir sept mois de détention dans différents
à Reims. Plus rien ne semble l’arrêter. avec une armée pour libérer Paris. Elle lieux, elle est finalement conduite à
Avec ses hommes, elle remporte la ba- est blessée, la résistance est trop forte, Rouen le 10 décembre 1430.
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Jeanne à Rouen
L’université de Paris et les Anglais actions militaires qu’elle avait réalisées. Très rapidement, elle est jugée cou-
veulent s’emparer d’elle pour lui faire Les juges s’attardèrent à lui trouver des pable, et condamnée à être brûlée vive
subir un procès. Elle est vendue aux motifs d’accusation de sorcellerie en par- sur la place du Vieux-Marché de Rouen
Anglais et déplacée à Rouen où elle lant notamment de « l’Arbre aux fées », le 30 mai 1431.
est gardée prisonnière dans l’ancien mais finirent par abandonner. Ils ciblèrent La documentation des procès de
château de Philippe-Auguste tenu alors leur interrogatoire sur son rôle dans condamnation et de réhabilitation sont
par les Anglais. Son procès se tiendra l’armée, le port des habits d’hommes, conservés ; pour le procès en réhabili-
dans le palais archiépiscopal mais, elle et l’hérésie que cela implique à cette tation on les appelle les « minutes du
sera presque toujours interrogée dans époque. Afin d’éviter une condamnation procès ». Ces documents ont été écrits
sa cellule. à mort, Jeanne d’Arc avoue toutes ces en latin et c’est Jules Quicherat qui, en
Le procès se tiendra du 21 février au fautes devant le tribunal. Mais elle sera fi- 1841, nous en a livré une traduction
30 mai 1431, sous la présidence de nalement condamnée au bûcher comme en français. Dès lors, ils sont devenus
l’évêque Pierre Cauchon. Durant les in- relapse. En effet, après avoir abjurée, on les sources premières de l’histoire de
terrogatoires elle répondra clairement à la retrouvera dans sa cellule portant des Jeanne d’Arc.
ses juges ne cachant ni les voix, ni les habits d’homme.
1.4. Jeanne après Jeanne
Le procès de réhabilitation
Jeanne d’Arc sera par la suite inno- Reims. Il fait intervenir 128 témoins, corrompu, les accusations légères et
centée par un procès en annulation de la vie de Jeanne d’Arc et du pro- la condamnation extrêmement ex-
mené en 1456. Ce procès, demandé cès de condamnation. Juvénal doit pédiée. Les conclusions innocentent
par sa mère et réclamé également juger de la validité du premier procès, finalement l’accusée et soulignent
par Charles VII, sera présidé par Jean qui est largement remise en question. une machination des Anglais, alliés à
Juvénal des Ursins, archevêque de En effet, ce procès semble avoir été l’évêque Cauchon.
Jeanne d’Arc dans les mémoires
Jeanne d’Arc est tout de suite entrée dans les mémoires par différents canaux.
Jeanne et les Arts
On la retrouve dès le XVe siècle dans personnage continuera à être présent d’Arc et se sont approprié son histoire.
les chroniques de Martial d’Auvergne dans les ouvrages littéraires (manus- Les œuvres d’art qu’elle a inspirées sont
et de Jean Chartier. Elle apparaît dans crits, théâtre, roman, …). De même, nombreuses, et chacune représente
les enluminures de ces deux chroniques les grands peintres et sculpteurs du une vision différente de Jeanne d’Arc.
qui relatent les grands événements de XVe siècle à nos jours ont également
l’époque, notamment militaires. Son interprété le personnage de Jeanne
Jeanne et la Nation
Jeanne d’Arc apparaît également dans triotique. Il faut attendre Napoléon Ier outil pour exacerber le sentiment na-
la sphère politique. Au XVIIIe siècle, les pour reconnaître en elle cet aspect et tional. La « bonne Lorraine » qui sauva
auteurs des Lumières comme Voltaire, un symbole patriotique. Jeanne d’Arc la France est alors présentée comme
ne sont pas tendres avec la Pucelle. demeure ensuite un symbole de la un exemple pour tous les jeunes Fran-
Puis, lors de la Révolution Française Nation, dans ses aspects royalistes, çais, et pas seulement dans les écoles
en 1789 son personnage est tein- républicains ou impériaux. À partir de de la République. Aujourd’hui encore
té d’ambiguïté. En effet, elle a certes la IIIe République, on assiste à une elle est toujours aussi présente dans
défendu la nation, mais dans le but de véritable instrumentalisation politique la République, que ce soit dans les
faire couronner un roi. Son person- du personnage. Après la défaite de programmes scolaires ou dans cer-
nage est alors plus lié à la monarchie 1870 et la perte d’une partie du terri- taines manifestations politiques.
qu’elle défend qu’à son aspect pa- toire français, Jeanne d’Arc devient un
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Jeanne et l’Église
Le lien qui existe entre Jeanne d’Arc et lée entre les Républicains et les Catho- À partir de cette date, elle est défini-
l’Église catholique est très complexe. liques. Il faut attendre la fin du siècle tivement reconnue par l’Église, qui
Après l’avoir jugée et brûlée comme pour que l’Église décide d’un troisième la sanctifie lors de la canonisation, et
hérétique et relapse en 1431, l’Église procès pour la canonisation sur une par la République qui instaure la pre-
mène un procès de réhabilitation en demande de Monseigneur Dupanloup, mière fête nationale en son nom. Son
1456 qui lave Jeanne d’Arc de ces alors évêque d’Orléans. Mais les avis culte est alors officiel et il s’intensifie.
accusations. Elle n’est pas pour autant sont partagés quant à la légitimité de De nombreux monuments religieux
reconnue comme martyre. Au cours du la canonisation ; Jeanne d’Arc avait en sont élevés dans les villes que Jeanne
XIXe siècle, dans le contexte politique effet refusé de reconnaître l’autorité d’Arc a traversées. Statues, autels et
qui oppose de plus en plus l’État à de l’Église lors de son procès de 1431. chapelles voient le jour dans toutes les
l’Église, Jeanne d’Arc devient un véri- Elle est finalement béatifiée en 1909, églises de France.
table enjeu. Son image est alors tirail- et canonisée en 1920.
Les questions qui font débat
Les voix
Jeanne dit entendre des voix dès l’âge sont évoquées lors des examens de messagers est à cette époque admis
de 13 ans, mais il semble alors que Poitiers et ne sont pas remises en par tous : Dieu peut désigner un élu
personne ne soit au courant, ni son question. Le fait que Dieu transmette et lui confier une mission, tout comme
père, ni le curé de son église. Elles son message aux hommes par des Moïse dans l’Ancien Testament.
L’accusation de sorcellerie
Les Anglais pensaient que Jeanne d’Arc gie là où son propre camp voyait des une mission divine, ses juges parlaient
était une sorcière ; ils voyaient de la ma- miracles. Ainsi, quand Jeanne évoquait d’une mission confiée par le démon.
Jeanne lettrée
Cette question est toujours ouverte au- du monde rural qui apprenaient alors S’agissant de la lecture, le fait qu’elle
jourd’hui. Au XIXe siècle, les historiens à lire et à écrire, et personne n’a ja- ait demandé à ses juges de lui lister
s’accordaient à dire qu’elle ne savait mais vu Jeanne d’Arc écrire, même par écrit les points auxquels elle n’a
pas lire et les Catholiques, que c’était entre 1429 et 1430. En revanche, il pas répondu crée un doute. Savait-elle
Dieu qui lui dictait ses réponses. semble qu’elle ait appris à signer de lire ? Ou simplement voulait-elle comp-
De fait, rares étaient les jeunes filles son nom. ter les points concernés ?
Jeanne, fille de noble, bergère ou guerrière
Au cours du XIXe siècle, Jeanne d’Arc des tournures bien différentes selon royale cachée à la campagne, une ber-
devient très populaire : son histoire in- qu’elles sont écrites par des Républi- gère illettrée qui défend son peuple ou
téresse tout le monde, et on cherche cains, des Catholiques, des Laïcs ou encore une messagère de Dieu pour
alors à comprendre qui elle était vérita- encore des romanciers. Jeanne prend sauver la France, …
blement. Des mythes et des légendes alors des traits différents, et devient se-
se mélangent à son histoire qui prend lon les uns ou les autres une héritière
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1.5. L’Historial Jeanne d’Arc : de l’Histoire au mythe
L’Historial Jeanne d’Arc a une double volonté :
• faire découvrir l’épopée de Jeanne à travers son procès de réhabilitation,
• étudier la construction de sa légende à travers de nombreux documents.
Dans les salles du palais archiépiscopal, le visiteur sera guidé sur les pas de Jeanne d’Arc par Jean Ju-
vénal des Ursins, archevêque de Reims qui présida son procès de réhabilitation. De nombreux témoins
viendront apporter toute la lumière sur l’époque de Jeanne d’Arc.
À la suite de ce parcours multimédia, le visiteur découvrira la « mythothèque », qui rassemble trois es-
paces dédiés à la postérité de Jeanne d’Arc. À travers différents outils multimédia ce lieu permettra un
accès aux œuvres, artistiques ou populaires, et aux débats qu’elle a inspirés depuis le XVe siècle.
La crypte romane - la France avant Jeanne
Le visiteur commence son parcours datant de l’époque de Jeanne d’Arc :
multimédia dans la crypte romane, der- • une volée de courtaud, prêtée à l’His-
nier vestige du palais archiépiscopal du torial par le musée Départemental
XIIe siècle. des Antiquités. Il s’agit d’un canon en
Jean Juvénal des Ursins apparaît dans fer forgé composite, provenant de la
l’écran central au-dessus du livre qui vieille tour de Caudebec-en-Caux,
représente les minutes du procès de et datant de la première moitié du
Jeanne d’Arc. Il intervient pour per- XVe siècle.
mettre au visiteur de saisir la complexi- • une reconstitution d’armure datée de
té du contexte historique de la France 1876, prêtée à l’Historial par le mu-
avant la naissance de Jeanne. Une sée des Armées aux Invalides. Cette
carte de France s’anime, ainsi qu’un armure est censée représenter celle
arbre généalogique qui permet de de Jean Poton de Xaintrailles, com-
bien comprendre les liens des familles pagnon d’armes de Jeanne d’Arc. Le
royales françaises et anglaises. casque de cette armure, appelé « ba-
Dans cette salle, le visiteur pourra éga- cinet » est un original du XVe siècle.
lement découvrir des objets militaires
La crypte gothique - l’enfance de Jeanne
Le visiteur se trouve sous la chapelle fait donc découvrir son enfance à
d’Aubigné, dans une crypte gothique Domrémy, notamment les voix qu’elle
du XIIIe siècle construite à l’époque de dit entendre depuis ses treize ans.
Guillaume de Flavacourt. Dans cette On évoque également « l’Arbre aux
salle, le spectacle audiovisuel retrace la fées » autour duquel se rejoignaient les
jeunesse de Jeanne d’Arc. Le juge, fait jeunes gens, et qui constituait un fait
ici intervenir les témoins de l’enfance important pour l’accusation en 1431.
de Jeanne. Ensuite, le visiteur pourra entendre les
On revient sur les faits qui ont contri- témoins du voyage qu’elle entrepend à
bué à son accusation d’hérésie en Vaucouleurs pour rencontrer Robert de
1431. Jean Juvénal des Ursins nous Beaudricourt.
Les anciennes cuisines - la rencontre du Roi
et les examens de Poitiers
Le visiteur arrive ensuite dans une On évoque ici la rencontre de Jeanne
partie plus récente du palais archiépis- et du Dauphin Charles VII. Des té-
copal datée de la deuxième moitié moins sont entendus par Jean Juvénal
du XVe siècle. Elle est construite à des Ursins au sujet des examens que
l’époque de Guillaume d’Estouteville. Jeanne a subi à Poitiers.
Le visiteur est alors plongé au cœur
de l’époque de Jeanne d’Arc tant dans
l’architecture que le spectacle.
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L’ancien office - batailles et désenchantement
Dans la salle suivante, le visiteur se Charles VII à Reims. Puis Jean Juvénal
trouve dans l’ancien office attenant à des Ursins rappelle la suite des événe-
la cuisine. C’est dans cet espace que ments. Les témoins évoquent la défaite
se préparait le service de table au devant Paris, sa capture à Compiègne,
XVe siècle. Le visiteur est ici amené à et enfin Rouen où elle est enfermée
suivre les actions militaires menées par durant son procès de condamnation.
Jeanne d’Arc, de la libération d’Orléans Le visiteur peut ensuite prendre
à son emprisonnement au château quelques minutes autour de la grande
de Rouen. Jean Juvénal des Ursins table où défilent des enluminures is-
interroge les compagnons d’arme de sues des Chroniques de Jean Chartier
la Pucelle et témoins des différentes et Martial d’Auvergne, deux manus-
campagnes. Sont évoquées les ba- crits du XVe siècle contemporains de
tailles d’Orléans, Patay, le sacre de Jeanne d’Arc.
Le grand comble - le « procès du procès »
Le visiteur accède au grand comble • la reconstitution d’une dague, datée
par l’escalier d’Estouteville. Dans cette de la fin du XIVe - début du XVe siècle.
pièce, aménagée au XVIIIe siècle, le vi- Tous les combattants étaient équipés
siteur assiste à la conclusion du procès d’une dague de ce type, dont la forte
de réhabilitation présidé par Jean Ju- lame permettait d’atteindre un adver-
vénal des Ursins. On revient sur les ac- saire protégé par une armure. Cet ob-
cusations portées contre Jeanne d’Arc jet a été prêt à l’Historial par le Musée
en 1431 : hérétique, apostate, relapse, des Armées aux Invalides.
idolâtre. • une épée datée de la fin du
Dans cette salle, le visiteur pourra éga- XIVe siècle, prêtée à l’Historial par
lement découvrir des objets militaires le Musée des Armées aux Invalides.
datant de l’époque de Jeanne d’Arc : Cette épée courte mais solide pou-
• Une épée, datée du XIVe - XVe siècle vait équiper un piéton à l’époque de
en alliage ferreux. Cette épée prêtée Jeanne d’Arc. La large lame au profil
à l’Historial par le Musée Départe- très aigu était destinée à disjoindre
mental des Antiquités. les pièces d’armure.
Le petit comble - les conclusions
Cet espace est la dernière salle du dans une deuxième partie plus libre. Il la Pucelle permettront de découvrir les
parcours multimédia. Jean Juvénal a alors accès à la « Tour de guet » qui œuvres et les débats qu’elle a inspirés
des Ursins y évoque la conclusion du donne une vue inédite sur les toits de depuis le XVe siècle.
procès en réhabilitation. Le visiteur Rouen, puis à la « mythothèque ». Ces
est ensuite invité à poursuivre sa visite trois espaces dédiés à la postérité de
La Mythothèque - première salle : la postérité de Jeanne
Dans ce premier espace, le visiteur • Jeanne et l’Église : les célébrations En partenariat avec l’INA (Institut Na-
peut accéder à cinq bornes multimédia. religieuses autour de Jeanne d’Arc, tional de l’Audiovisuel) nous avons
Dans chacune d’elles il trouvera des les œuvres religieuses qu’elle a inspi- constitué un focus accessible éga-
documents autour de cinq thématiques rées depuis le XIXe siècle. lement sur internet. Une sélection
dédiées à Jeanne d’Arc : • Jeanne et la Nation : documents di- de vidéos d’archives qui concernent
• Jeanne et Rouen : sur les monuments vers et discours politiques prononcés Jeanne d’Arc et la nation, Jeanne d’Arc
en lien avec Jeanne d’Arc qui ryth- notamment à l’occasion des fêtes et l’Église, Jeanne d’Arc icône popu-
ment le paysage rouennais. Jeanne d’Arc. laire, Jeanne d’Arc et les arts, Jeanne
• Jeanne et les arts : autour de la pos- • Jeanne et l’Éducation : outils péda- d’Arc à Rouen (http://sites.ina.fr/histo-
térité de Jeanne à travers la littéra- gogiques qui occupaient les salles rial-jeannedarc/).
ture, le cinéma, la peinture… de classe à la fin du XIXe siècle et au
• début du XXe siècle.
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Description:Les ducs d'Orléans et de Bourgogne, respectivement Louis d'Orléans et Phi- lippe le Hardi, se sont .. en 1431 : hérétique, apostate, relapse, idolâtre.