Table Of ContentCet ouvrage a été publié en langue anglaise sous le titre
:
BRAND OF POSSESSION
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© 1980, Carole Mortimer.
© 1981, Harlequin S.A. Traduction française.
ISBN 2-86259-714-7
ISSN 0223-3797
— Gardez-le donc votre rôle ! je ne me laisserai pas
acheter !
Deux yeux verts lancèrent des éclairs en direction de
l’homme assis derrière le bureau.
— Miss Adams, si vous vouliez seulement rester calme, je
pourrais…
— Laissez-moi parler, interrompit Stacy, hors d’elle. Vous
êtes bien comme les autres. Les désirs de Paul Forbes
sont des ordres, et malheur à la pauvre fille qui ne serait
pas intéressée… Une seule pensée vous habite : satisfaire
la vedette de votre film à tout prix. Eh bien ! faites-le sans
moi. Je serai peut-être la seule, mais il ne m’aura pas ! Il
me dégoûte !
— Miss Adams, vous m’avez mal compris !
M. Forbes a seulement émis le désir…
— Je sais très bien ce qu’il voulait, monsieur Payne, et il
ne l’aura pas. Etant le réalisateur du film, vous devriez
exercer une plus grande autorité sur vos acteurs !
— Là, vous allez trop loin !
L’homme se redressa de toute sa petite taille, indigné.
— Votre rôle ne dure que quinze minutes ! Vous croyez-
vous pour autant autorisée à me donner des conseils? Je
fais des films et je dirige des acteurs depuis trente ans
et…
— Alors il est sans doute temps que vous preniez du
repos, lui lança la jeune fille insolemment.
Ses yeux verts étincelaient de colère, et ses deux longues
tresses, d’un roux flamboyant, dansaient jusqu’à sa taille.
Elle portait encore le costume de paysanne que lui
imposait son rôle. Le film se déroulait au dix-huitième
siècle, dans l’atmosphère légendaire de la Cornouailles.
— Les temps ont changé, poursuivit-elle. On ne devient
plus vedette en accordant ses faveurs à ceux qui régnent
sur les plateaux de cinéma !
— Miss Adams, vous êtes licenciée !
— C’est inutile, je pars de mon plein gré. J’aime le rôle de
Kate, mais pas au point de payer de ma personne, pour le
bon plaisir d’un Paul Forbes !
— Je vous ai demandé de l’accompagner à une
réception, pas de le séduire ! Je ne vois pas ce que vous
allez imaginer derrière une simple invitation!
— Dans ce cas, pourquoi ne l’a-t-il pas formulée lui-même
?
— J’ai cru comprendre qu’il l’avait fait, et que vous aviez
refusé.
— Oui, parce qu’il me déplaît! J’observe son manège
depuis deux semaines : il n’est qu’un égoïste, un snob, un
horrible…
— En voilà assez, Miss Adams. J’ai parfaitement saisi
vos sentiments à l’égard de M. Forbes. De mon côté, je
pense m’être clairement exprimé à propos de votre emploi
dans mes studios…
— J’ai fort bien compris. Je pars soulagée. La scène de
viol que je devais tourner avec votre vedette aurait
certainement dépassé les limites acceptables…
— Vos gages vous attendront demain matin à la première
heure, coupa Martin Payne. Je ne peux régler tout cela ce
soir, il n’y a plus personne dans les bureaux. Tout le monde
est rentré à l’hôtel.
— Afin de se préparer pour la réception de ce soir.
— Exactement. Celle où vous refusez de vous rendre.
Il se faisait des illusions s’il croyait qu’elle se laisserait
priver d’une sortie! Elle irait. Avec un homme de son choix,
afin de narguer Paul Forbes. Il ferait une drôle de tête
lorsqu’il la verrait entrer au bras d’un autre.
— J’attendrai donc demain matin.
Stacy se dirigea d’un pas décidé vers la porte de la
caravane, qui tenait lieu de bureau au réalisateur et à son
équipe lorsqu’ils tournaient en extérieur.
— Bonsoir monsieur Payne.
— Adieu, Miss Adams. Je doute que nos chemins se
croisent à nouveau.
— Qui sait ? Je prends congé demain matin seulement…
La jeune fille quitta la caravane, un sourire amusé aux
lèvres, une lueur de défi dans le regard.
M. Payne avait raison ; les lieux étaient presque déserts.
Elle aperçut cependant l’un de ses vieux amis, Matthew
Day, qu’elle connaissait depuis trois ans. Il faisait
également partie de la troupe, et s’apprêtait à regagner
l’hôtel. Stacy l’interpella, et ils se dirigèrent bras dessus,
bras dessous, vers la voiture de Matthew.
C’était un jeune homme grand et mince, avec un beau
visage énergique, des cheveux bruns épais et bouclés. Il
commençait à se faire un nom sur les écrans, Stacy était
persuadée qu’un jour ou l’autre, il décrocherait le premier
rôle dans une superproduction, et deviendrait célèbre. Pour
le moment, il avait, comme elle-même, un rôle secondaire
dans le film que réalisait Martin Payne.
— Tu me sembles bien joyeuse, fit-il remarquer sur le
chemin de l’hôtel.
— Je viens d’être mise à la porte !
De surprise, Matthew en oublia qu’il tenait un volant, et la
voiture fit une embardée.
— Que dis-tu ?
— Que je viens d’être mise à la porte, répéta-t-elle
gaiement.
— Mais… pourquoi? En tout cas, cela ne semble pas te
contrarier outre mesure. Je croyais que tu tenais beaucoup
au rôle de Kate. C’est vrai qu’il n’est pas long, mais il est
essentiel.
— C’est à cause de Paul Forbes. Il a soudain décidé que
je lui plaisais.
— Cet homme est un dangereux séducteur ! Il y a huit
jours, c’était Jane, la script. Avant cela, notre amie Cindy
Davies, et à présent, c’est sur toi qu’il jette son dévolu ! Je
suppose que tu as repoussé ses avances ?
— En effet. Il s’est donc adressé à Payne, pour m’amener
à changer d’avis.
— Mais tu as tenu bon, déclara-t-il, sûr de lui. Je connais
tes principes moraux pour en avoir fait l’expérience…
— Je pensais que cette question était réglée une fois
pour toutes entre nous.
Peu après leur rencontre, deux ans auparavant, les jeunes
gens avaient ébauché un flirt qui avait bien vite pris fin,
lorsqu’ils s’étaient rendu compte à quel point leur
conception de la vie les séparait. Ils étaient parvenus,
malgré tout, à rester amis.
— Je plaisantais, Stacy, assura-t-il en lui prenant la main
d’un geste affectueux. Mais je ne comprends pas pourquoi
tu as cette mine réjouie ?
— Paul Forbes voulait que je l’accompagne à la réception
donnée en l’honneur de Jake Weston. Je m’amuse en
imaginant la tête qu’il fera lorsque j’entrerai en ta
compagnie !
— Tu… tu vas y assister malgré la façon dont ils t’ont
mise à la porte ?
— Bien sûr. Voir tous ces gens faire des ronds de jambe
à l’auteur du scénario ne m’enthousiasmait pas à première
vue, mais à présent, je ne le manquerais pour rien au
monde !
Matthew sourit devant son air décidé.
— J’ai hâte de rencontrer le célèbre Jake Weston.
— Tu ne crois tout de même pas que nous aurons
l’honneur de lui être présentés ! Il ne s’apercevra sans
doute pas de notre présence, nos rôles sont bien trop
modestes.
Matthew, sans paraître convaincu, arrêta la voiture dans le
grand parking de l’hôtel qui était presque plein. Toute
l’équipe du film y logeait. C’était l’arrière-saison, et les
touristes avaient cédé la place à la faune habituelle des
studios : acteurs en tous genres, scripts, maquilleuses, et
les opérateurs qui allaient et venaient avec leur lourd
matériel. Tout un monde insolite s’affairait dans la grande
bâtisse, sous les yeux étonnés de quelques vacanciers
attardés.
Le calme régnait à cette heure-ci, tandis que Stacy et
Matthew se frayaient un chemin à travers les voitures. La
jeune fille poursuivait son idée.
— Ses livres sont toujours en tête sur la liste des best-
sellers, quand ils ne sont pas transformés en films. Il ne
jettera pas un regard sur nous. On m’a d’ailleurs dit qu’il
n’était pas très sociable.
— Il doit l’être s’il accepte les réceptions comme celle de
ce soir.
— De toute manière, je n’ai aucune envie de le connaître.
