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APOLOGIE DE SOCRATE
CRITON
Traductions inédites, introductions et notes
par
Luc BRISSON
GF-Flammarion
Œuvres de Platon
dans la même collection
t,ORGtl\S (11011t•elle traduction de Monique Canto).
t t· 1·1 Rt·s (11ouvellt• traduction de Luc Brisson).
t· t fl\'t>t·.\11· (11011velle 1raduction de Monique Canto).
toi-: (11out.•elle traduction de Monique Cama).
Pll1'l)Rt (11011'1.'elle 1rad11ccion de Luc Brisson) .
., 1l•NO~ (11ouvelle traduction de Monique Canto).
Ptll•DON (11otlt'clle traduction de Monique Canto).
SOl'I ns t I' (nouvelle traduction de Nestor L. Cordera).
111!-l:11. n (11ouvelle traduction de Michel Narcy).
l'/\RM(-sm1 (nouvelle traduction de Luc Brisson).
1 tMl·t, - cRrnAs (nouvelle traduc1io11 de Luc Brisson).
t.A<.111-s - HTI 11\'PHRON (nouvelle traduction de
Louis-A11dré Donon).
1 H IIA1':QIJl· I' - 1'111:DRE.
1.\ Rl'l'Ulll .lQL'l:.
Sl·.C'OSI) /\1.CIBIAl)l - HIPPIAS MJNEUR - PREMIER ALCTBJ/\OE -
l:l.TI IIYl'HROS - l \CHES - CHARMlOE - LYSIS -
llll'l'IAS .\t.'Jl:UR - ION.
PRO l'A(,()R,\S - l:U'l HYDEME - GORGIAS - Mi,NEXÈNE -
.\\(,.'-mN - CRATYI.H.
l Hl-t· l l· 11, - PARMÎ:NIOE.
SOl'IIIS I h - 1'01 ITIQUI! - l'HILÉBE - TIMÉE - CRITIAS.
Pl.A'! ON PAR I l.t-MtMI' (textes choisis et traduits
par Lo1m Gwllcnnit).
ABRÉVIATIO 'S
CAF: Comicon1111 Auicon,m Fragmenta, éd. par Th.
Kock, Leipzig, Tcubncr, 1880-1888.
CIA · Corpus lnscript1omm1 Atticon1111, éd. \X'. Dit
tcnbcrger et alii, Berlin, Reimer, 1873-1895.
DK : Die Fragmente der Vorsokrallker, éd. par H.
Diels; 6c éd. par W. Kranz, Berlin, Weidmann, 1951-
1952 = reprint de la 5"éd. [1934-1937) avec CC)
Nachtriige.
DPlzA : Dictionnaire des Philosophes amü,ucs, publié
sous la direction de Richard Goulet, Paris, éd. du
CNRS 1, 1989; Il, 1994-.
FGrH: Die Fragmente der Griechischen Historiker,
éd. par F. Jacoby, Berlin, Weidmann, puis, Lciden,
Brill, 1923-1958.
IG: lnscriptioncs Graecae, éd. minor, Berlin, de
Gruyter, 1913-.
PCGr: Poetae Comici Graeci, Berlin de Gruyter, éd.
R. Kassel et C. Austin, 1983-.
INTRODUCTION
Dans l'Apologw, Platon élèYe au rang de mythe fon
dateur * de la philosophie un fait contingent et de peu
d'importance au regard de l'histoire, la condamnation à
mort en 399 à Athènes d'un individu au terme d'un
procès public. Et cette transmutation de la contingence
en exigence absolue conserve aujourd'hw encore tout
son pouvoir de fascination. Alors que, dans les autres
dialogues socratiques, il décrit un Socrate en pleine
action, dans !'Apologie Platon fait, en définitive, appa
raître un Socrate qui, par sa mort, témoigne de cette
conviction : seule la pratique qui inspire son action, à
savoir la i, philosophie », fait que, pour un être humain,
la vie vaut d'être vécue.
A. LE PROCÈS DE SOCRATE
Platon et Xénophon firent l'un et l'autre le récit du
procès de Socrate 1 Xénophon ne revint pas d'Asie
•
Mineure avant 394, soit cinq ans après l'événement2
1. Sur les differences entre les deux versions, cf. Gregory Vlas
tos, Socrate. Ironie et philosophie morale [1991], trad. française par C
Dalimier, Paris, Aubier, 1994, p. 396-398.
2. Xénophon se trouvait alors en Perse et participait à l'expédi
tion qu'il décrit dans l'Anabase. Voilà pourquoi dans son Apologie de
Socrate, qui correspond au dernier chapitre du livre IV des Mémo
rables, Xénophon se dit informé par Hermogène, le demi-frère sans
forrune du richissime Callias (cf. n. 51, p. 134-135).
12 APOLOGIE DE SOCRATE
qu'il faut situer en 399, vers le milieu du mois de
mai 1; alor,; que Platon fut présent au procès (Apologie
34a, cf. aussi 38b), même si, dans le Phédon (59b), on
apprend qu'il n'assista pas à la mort de Socrate, parce
qu'il était malade. Voilà pourquoi le témoignage de
Platon me semble devoir être privilégié2, bien qu'on
puisse penser que Platon fait souvent dire à Socrate ce
qu'il aurait dû dire plutôt que ce qu'il a dit. ll n'en
w,te pas moins que Platon devait respecter une cer
taine \'raisemblance: en effet, le procès qu'il décrit
s'était tenu devant plusieurs centaines de juges et
d'auditeurs qui devaient, pour la plupart, être encore
vi\·ant~ entre 392 et 387, date à laquelle !'Apologie fut
probablement écrite 1 cette situation impose des
;
contraintes bien plus fortes que s'il s'agissait d'une
conversation privée entre quelques interlocuteurs
mons lors de la rédaction du dialogue, comme c'est le
cas pour Je Pannénide notamment4.
Au début de !'Apologie\ Socrate remarque que c'est
la première fois qu'il comparaît devant un Tribunal
alors qu'il est âgé de soixante-dix ans environ; cette
remarque revêt une véritable pertinence, si l'on rap
pelle que, à Athènes, un procès ne constituait pas un
1. :Sur l'établis~ement de cene date dramatique, cf. l'lntroduc
ùon au Cri1011, n. 1. p. 175.
2. En di:pit des réserves faites par Pierre Vidal-Naquet dans
• Platon, l'h1,toirc et les historiens ,, d'abord publié dans Histoire et
Stnutrirt, ci w mémoire Je l 'ictor Goldschm,dt, éd. par Jacques
Brun1chwig, Claude Lmben cr Alain Roger, Paris, Vrin, 1985,
p. 147-160; puis repris dans LA Démocratie grecque vue d'ailleurs,
Paris, Flammanon, 1990, p. 121-137. Et Louis-André Dorien,
dans • l..a subversion de l'e/enchos juridique dans !'Apologie de
So.:rau ,, Retmt ph1Josoplriq11e de Lo1main 88, 1990, p. 311-344. Ce
n"est pa\ parce qu'il a du génie que Platon déforme systématique
ment les faits qu'il évoque, tout fait doit être interprété, et rien
n 'mtcrdu que l'interprétation de Platon soit la meilleure.
3, \'01r n. 165, p. 147.
4 Cf. l'lntroducuon de Pam1é11idt, Pans, GF-Flammarion,
1994. En outre, dans l'Apologic, Platon se met lw-mêmc en scène.
5. Voir n, 12, p. 130. Platon qui fréquentait Socrate depuis 408
approchait de &es trente ans. Et Aristophane avait dans les soixante
ans. l.'Assemblh dts/m1mes fut représentée en 392, à une époque où
Platon écrivait ou projetait d'écnre l'Apologie.
1~rnom:c 110s 13
èvénement exceptionnel: tout conflit d'mtéret pm:é
ou public, pouvait, sur initiative pnn.:e ou pubh4uc, }
être porté non pas devant des profr!> 1onncl , mai
devant un large public de juges; que So~rate oit cité
comparaître au Tribunal pour la première foi à l'âge
de soixante-dix ans signifie qu'il s'c t peu mêlé des
affaires publiques. li reste que, pour comprendre
l'Apologie, dont le vocabulaire et la structure
dépendent de son contexte juridique, il faut replacer
l'œuvre dans son cadre : celui d'un procès 1•
1. La procédure
Un jour de 399, Mélétos se rendit au Portique royal
pour y intenter une action (graphi) contre ocrate
auprès de l'archonte-roi. À Athènes, le terme y:èné
rique pour une affaire juridique était dikë, que ccnc
affaire fût privée (dike idia) ou publique (dike dëmô
sia). Une affaire publique portait sur toute faute, tout
conflit, qui intéressait l'ensemble de la communauté.
Le type le plus ordinaire d"• action publique était la
grapliê2, dont l'origine étymologique indique que, au
point de départ, ce fut le seul type d'affaire où la
plainte devait être rédigée par écrit, afin d'être publiée
sur une tablette exposée dans l'agora, prés des statues
des héros éponymes des dix tribus 3 ( carte II).
L'archonte-roi qui avait reçu la plainte devait
mener une enquête préliminaire, une instruction (ana
kri.sis) pour décider si l'affaire justifiait un procès.
Dans l'affirmative, l'archonte-roi faisait, à une date
qu'il avait fixée, lire la plainte devant les deux parties
qui venaient lui expliquer l'affaire : l'accusé devait
alors reconnaître les faits ou faire une déclaration
solennelle là contre. Et la séance se terminait par un
serment mutuel 4, par lequel les deux parties juraient
1. La description qui suit s'inspire de Douglas M. MacDowell,
The Law in classical Atliem, London, Thames & Hudson, 1978.
2. Apologie 19b, 26b, 26e, 27a, 27e, 28a, 31d.
3. Aristophane, Nuées, v. 770, Guêpes, v. 349; Isocrate, Sur
l'échange [XV], 237; Démosthène, Contre Midias [XXI], 103.
4. Le terme grec est amomosia (Apa/ogie 19b, 24b).
1-i
APOLOGIE Dl: SOCRATE
que leur.; déclarations étaient vraies 1 ce qui fut le cas
,
pour Socrate et pour Mélétos. Après avoir mis en
place cette procédure, l'archonte-roi transmit l'affaire
auprès de l'Iléliée, ou plutôt l'Éliée (Eliaia) 2, la cour
qui était habilitée à examiner les accusations
d'impiété. Désormais Socrate, contre qui Mélétos
avait porté plainte3, faisait l'objet d'une poursuite4.
Le jour du procès 5, les parties se rendaient à la cour,
où le::; attendait le magistrat qui devait traiter l'affaire,
a\'CC leurs témoins et leurs <• supporteurs •>; le public se
ma!>san tout autour de l'enceinte qui matérialisait la
cour~. Les uns et les autres pouvaient, au cours du
procès, manifester bruyamment leurs sentiments 7
•
Les Juges ne devaient pas prêter serment, puisqu'ils
l'a,·aient déjà fait, lorsqu'ils avaient été choisis au
début de l'année; mais le magistrat qui présidait la
cour tirait au sort parmi eux un individu qui surveillait
1. l~ocratc, Sur l'a11elagc [XVI], 2; lsée, Pour Euxémppe [Ill],
6-7. Comrt Démcsthent [V], 1-2, et [IX], 1; Démosthène, Contre
.\l,u.irta11os (XLIII], l.
2 Sur la nature et la composiùon de cette cour, cf. Douglas M
MacDm,cll, '/11e Law in c/assical Ache11s, op. cù., p. 35 : • This was
the court for many important types of case, some of which required
part,~-ularly large Jurie~ (1 000 or more) and 11 must have had a lar
gcr building than the other courts (. .. ). That may be why this court
took ovcr the utlc "l:.laia", which in earlier ùmes had meant the full
Athenian a sembly. • Pour une descripaon archéologique, cf. The
A1/w:11w11 rlgora. Remies of excawcions conducted by the American
School of clauÎCi.u Studies at Achcm, vol. XIV : Tite Agora of Achms.
11w hisc.-,ry, slwpt a11d tHes of1 111 anciem cicy cemer, ed. by I fomer A.
"('111,mrson and R.E Wycherley, The American School of classical
Stud,cs at Athcn~. Princeton, 1972, p. 62-65.
3. Le verbe e l tglwliô (Apologie 26c, 27e) et le substanùf corres
rondant igk1i111J (24c).
4. Le verbe l.°!>t âsJgô (Apologie 24d, 25c, 25d, 26a, 29a, 29c,
~Sb),
5. Le terme agJ,, (Apologie 24c, 34c, 37, cf. agônizesclwi, 34c)
désigne le procès.
6. Le terme J1Jwsctn·o11 dé~igne tout naturellement le tribunal
(Apowgû 17c, 29a. ~Ob), l'enceinte où sont assis les juges. Démos
thène, C:011rrc.\'Ur.i (XI], 5, 27, 80, 91,161, et Contre Conon [LIV],
41.
7. Ct. les occurrences de clwn1bcÎII (Apologû 17c, 20e, 21a, 27b,
30c).
IN l'RODUCTION 15
l'horloge à eau quatre qui supcn·1 ,cnt 1 , ote et
quatre qui s'occupaient du paiement de Juges â ln fin
du procès.
L'affaire était alors instruite. Oevam le JU e et le
public, un greffier lisait l'acte d'accusation et la loi
1
laquelle l'accu é était censé a,·01r contrevenu • i 1
deux parties étaient présentes 2, le procès commen1,,-all
immédiatement avec le discours de l'ac~'Usatcur et
celui de l'accuse , qui prenaient l'un et l'autre la
parole. Un seul discours de chaque côti: était admi ,
dont la longueur était limnée. Pour mesurer 1 temp
écoulé, on se servait d'une horloge à eau, un grand
vase dont le fond était percé d'un trou qu'on pouvait
obturer a,·ec un bouchon; le vase était rempli d'eau'.
et on enle\'ait le bouchon lorsqu'un discours commen
çait. Une affaire publique retenait la cour pendant une
journée enùère5 dont l'ensemble était divi é (Jiametrê
mbië) en trois parties, d'égale longueur: un ûers pour
le discours de l'accusateur, un tiers pour celui de
1 Su1\'ant la procédure dite de la grapJ,l p,Jra1wmo11 Ct: Apologie
24e, et peut-être 33d. Pour des parallèles 1und1qucs · Eschine,
Comre C1és1plum [III]. 200; Démosthène, C<>lllrc 71itocrints
[XVIII], 111. Pour des exemples de cette lecture : Anstophane,
Guêpes, v. 894; Eschine, Comrc Ti111arq11e [I], 2.
2. L:i possibilité d"un procès 111 abscmia (vl11,êti karig<>rtfll) e~t
è\'oquée dans !'Apologie (18c) par Socrate, lor;qu'1l ~c rélere aux
calomnies anciennes qui a\'aient été lancees par Aristophane.
3. Pour l'accusateur, le champ sémantique ~t kiJr,+goros (Apok>
gie 17a, 18b, 18c, 19b, 24b, 35d, 39b, 41 d), kiJtigoriJ ( 19a). kiJ1Jw.
gorcî11 (passim); pour l'accusé, apo/og/J (24b, 28b) et apclogeisrhai
(passim).
4. Pour chaque discours, on accordait 44 khol, unité de capacité
athénienne. Les archéologues, qui ont rctrou\'ê des clcp rdres )ur
l'agora, ont pu me~urer une durée de 3 minutes par conge (kli«').
Par suite, les discours de l'accu ateur et de l'accusé pouvaient durer
= =
chacun un peu plus de deux heures 144 x 3 132 minutes
2 heures et 12 minutes). Il va sans dire que cette durée n'est
qu 'approximaùve, trop de variables intervenant dans le dèbll de
l'eau : viscosité du liquide, porosité du récipient, température
ambiante, etc. Sur le sujet, cf. Douglas M. MacDoweU, The Law 111
c/ass1cal Athens, op. cir., p. 248-250.
5. Toute la procedure devait se dérouler en un seul jour (Apolo
gie 37a-b).
16 APOLOGIE Dll SOCRATb
l'accusé et un tiers pour l'établissement de la peine, au
ca~ où l'occusé était reconnu coupable 1 Plusieurs
•
types de prm.:ès étaient possibles.
Mais, dans le cas de Socrate, on retint ce type de
procès appelé t1g6n timët6s2, qui ne comprenait pas de
peine établie par la loi. Dans un procès de ce type. la
peine proposée par l'accusateur était indiquée à la fin
de l'acte d'uccusaoon 3• Si le jury reconnaissait que
l'accusé était coupable, une nouvelle étape du procès
commençait. L'accusation pouvait après le verdict
présenter une argumentation en faveur de la peine
indiquée à la fin de l'acte d'accusation, et on accordait
à celui qui venait d'être déclaré coupable un temps de
parole égal pour proposer une peine alternative 4 Les
•
juges votaient une seconde fois pour choisir entre les
deux propositions, mais l'accusé ne pouvait présenter
une troisième proposition, cc qui constitue un point
décisif dans le cas de Socrate. Le procès que Platon
prétend rapporter dans !'Apologie a bien cette struc
ture. Dans un premier discours (Apologie 17 a-35d),
ocratc présente sa défense face à l'accusation portée
contre lui. Et dans un second discours (Ibid.
36e-38b), Socrate propose une peine de substitution.
Chaque partie devait parler pour elle-même, après
être montée à la tribune 5 Elle ne pouvait être défen
•
due par un avocat, auprès duquel elle serait restée
1. Amtotc, Atliet1c1io11 Politew 67, Démosthène, Comre Macar1a-
11os (XI.Ill], !!, cl Co111rc Nicostratos [LIU], 17; Eschine, Sur
l'amb.JuJJe infidik [li), 126, et Comre Ctésiplwn [III], 197.
2. A proprement parler, un procès (ag8n), où l'on fixe la peine
(11ml1ôs).
3. C'c t bien le cas pour Socrate, si on en croit Diogène Laërce
qui prêtc:nJ oter Favorinus • Voici la plainte que rédigea et que
confirma par serment contradictoire Mélétos, füs de Mélétos, du
Jerne Je P1ttho,, contre Socrate, fùs de Sophroniskos, du dème
d'Alopckc _.,cr-Jte est coupable de ne pas reconnaitre les dieux
rc.:onnu par la cllé et d'introduire de nouvelles puissances démo
naqu~-s; 11 e1-t c:n outre coupable de corrompre les jeunes gens.
Pcmc:: la mort • (LI, 40). Texte analysé, p. 37-42.
4. C'est-à-dire anmimësù, cf. Apologie 36b.
5. Le terme: qui désigne cette action est a11abai11ci11 (Apologie
17c, 3 lc, 33d, 36a. 40b) et wwb1bci.ui11 (18c, 34c, 34d).
l!'-., ROl)t.:C110!'-: 17
silencieuse, comme c'est le cas de no jours. i clk
doutait de ses capacités or.noire:., chaque partie pou
vait cependant se faire assister son par un , ll)go
graphe *, un • avocat de papier•• qui écrivait le di -
cours que. prononçait la partie en question 1, oit par
un parent ou par un ami qui l'accompagnait et dont
l'aide ne devait pas être rémunérée sous peine de
poursuite. On pouvait aussi citer à comparaitre un
témoin. Outre ces personnes qui lui apportaient leur
aide, une partie pouvait s'entourer de • suppor
teurs •2 notamment sa famille et surtout se enfants,
,
qui ne prenaient pas la parole, mais dont la pré cnce
était susceptible de toucher les juges
J.
Dans l'Apologie, l'accusateur cherche à montrer4 la
culpabilité de l'accusé qui, lui, doit établir son inno
cence; ils doivent se réfuter l'un l'autre,. L'opposition
est donc insurmontable, et le conflit ne peut se
résoudre qu'à l'avantage de l'un des deux orateurs qui
doit réussir à produire des preuves~ accablantes pour
ses adversaires. Or, ces preuves ont pour sources
principales les vraisemblances et les témoins. Socrate
joue sur les vraisemblances, mais il n'appelle jamais de
témoins à la rescousse~; il se borne à désigner ceux
1. Sur l'existence des logographes et sur leur unponance, cf. M.
Lavency, Aspect de la lngographie judiciaire auique, Louvain, Pres~cs
de l'université de Louvain, 1964. Ainsi que mes remarques dans
l'lntroduction que j'ai donnée à ma traduction du Phèdre.
2. Cf. la liste de noms citée en Apologie 33e-34a.
3. Aristophane, Guêpes, 568-574; Platon, Apologie 34c; Ly·ias,
Pour Polysrratos [XX], 34; Démosthène, Contre MidiaJ [XXI], 99,
186-188.
4. Cf. les verbes apodeiknûnai (Apolog~ 20d) et epideiknûnai
(22a, 24c, 125c, 40a). On trouve aussi le substanuf tekm/rion (32a,
24a, 24d, 40c).
5. Le verbe qui désigne ceue action est elégkhein (Apolo~ 18d,
21c, 29e, 39c) et le substantif élcgkhos (39d).
6. En grec ancien, rekmbion (Apologie 24a, 24d, 32a, 40c).
7. Socrate fait parfois allusion à des témoins (mJrrures, 19d, 20c,
31c , 32e, 34a) qui pourraient porter témoignage (marrurein, 21 a)
en sa faveur, mais jamais il ne fait formellement appel à eux per
sonnellement. La seule exception, il faut le remarquer, est non pas
un homme, mais un dieu, Apollon, qui présente cene qualité qu'on
anend d'un témoin : il est digne de foi, c'est-à-ctire axi6khreë,1
(20e).