La conception de l'erreur chez l'étudiant de quatrième année de licence de français

134 Pages·2011·0.85 MB·French

REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE
MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

UNIVERSITE MENTOURI - CONSTANTINE
ECOLE DOCTORALE DE FRANÇAIS
PÔLE EST
ANTENNE MENTOURI

N° d’ordre :………..
N° de Série :……….

MÉMOIRE
Présenté en vue de l’obtention du diplôme de
MAGISTER
Filière : Didactique

Intitulé

La conception de l’erreur chez

l’étudiant de quatrième année de

licence de français

Présenté par/ Douâa BOULFEKHAR
Sous la direction du docteur Fatiha HACINI

Devant le jury /
- Président : Dr. CHEHAD M. Saleh Maître de Conférences Université de Constantine
- Rapporteur : Dr. HACINI Fatiha Maître de Conférences Université de Constantine
- Examinateur : Dr. AREZKI A. Ennour Maître de Conférences Université de Bejaia

Année universitaire : 2006 / 2007
À mes parents

À mes frères et sœurs

À tous ceux qui m’ont aidée et encouragée.
REMERCIEMENTS

Un tout grand merci

…à notre directrice de recherche Mme HACINI Fatiha pour tout le temps
qu’elle m’a accordé ainsi que pour l ’aide morale et scientifique qu ’elle a
apportée tout au long d’une recherche semée d’embûches.
Qu’elle trouve ici l’expression de mon infinie reconnaissance.

…à ma famille qui m’a soutenue tout au long de ma recherche, en particulier
mes parents, mes frères et mes sœurs.

…à mes amis qui ont su me pousser, m ’encourager souvent même m’aider à
continuer lorsque le courage me manquait.
« L’essence même de la réflexion c’est de comprendre
même qu’on n’avait pas compris»
Gaston Bachelard
INTRODUCTION

1
Introduction
Quand quelqu ’un parle d ’ « apprendre une langue », il est nécessaire de
s’interroger sur ce qu ’il faut entendre par apprendre. On passe peu à peu de la
conception d'un savoir détenu et transmis par l ’enseignant à celle d'un sujet apprenant
qui construit par lui-même son savoir. De même, on passe d'une conception d'un
apprentissage centré sur le contenu à celle d'un apprentissage centré sur l'apprenant . Le
contenu ne peut pas être ignoré, il ne peut en aucun cas être perdu de vue, mais
l'enseignant doit désormais, s'intéresser au processus intellectuel développé par
l'apprenant, aux stratégies et aux méthodes qu'il emploie, aux obstacles qu'il rencontre.
De nouvelles attitudes vont s'imposer à l'enseignant qui va devenir celui qui
écoute plus qu'il ne parle, celui qui met en situation et observe les apprenants pour
adapter ses exigences aux acquis antérieurs et aux compétences visées, celui qui va
rendre l'apprenant conscient de ses apprentissages en le tenant au courant de ses progrès
et de ses manques, celui qui va utiliser l'erreur comme un outil pédagogique au service
du progrès.
En s’inspirant de l’approche cognitive nous proposons de mener une recherche
auprès des étudiants de la quatrième année de licence de français à la faculté des lettres
et des langues pour cerner leur conception de l’erreur et l’impact de cette dernière sur la
réussite/ échec de l’acte d’apprentissage.
Notre objectif sera de tenter au moyen d ’un échantillon estudiantin et à partir de
leur univers d’opinion de répondre aux questions suivantes :
1- Quelle est la conception de l’erreur chez l’étudiant ?
2- Comment se comporte t-il vis-à-vis de son erreur ?
3- Y a-t-il un rapport direct ou indirect entre la conception de l ’erreur et la
réussite/échec des étudiants ?
Nous allons présenter le travail en cinq chapitres :
Dans le premier chapitre nous tenterons de saisir d’abord quels statuts assez variés
peuvent avoir les erreurs, ensuite nous parlerons de l’apprentissage par essais et erreurs.
Dans le deuxième chapitre nous tâcherons de sérier les erreurs selon leur diversité de
causes et d’origines. Étant donné que notre recherche concerne des apprenants de la
langue française, cela nous pousserait à élaborerer un troisième chapitre qui va étudier
l’erreur dans les langues et pour ce faire nous parlerons de la norme et de l ’erreur et
2
Introduction
nous ferons un bref rappel des notions de compétence et de performance et de leur
évolution. Nous décrirons ensuite rapidement les erreurs chez les apprenants de
français, puis nous passerons à celles propres aux apprenants de français langue
étrangère et enfin aux théories sur l'acquisition d'une langue étrangère. Ces trois
chapitres seront consacrés à l ’aspect théorique de l ’étude. Les deux autres vont
concerner son aspect pratique. La conception de l ’erreur chez l’étudiant de quatrième
année de licence de français à l ’université de Constantine sera développée dans le
quatrième chapitre. Pour ce faire nous aurons recours à deux outils d ’investigation : le
questionnaire et l’entretien.

a- Le questionnaire
Nous allons élaborer un questionnaire qui concerne les informateurs et les
variables de base ainsi que le sujet de la recherche.

b- L’entretien
Nous aurons recours à l ’entretien parce qu ’il a l’avantage de donner place aux
ratages, répétitions, bafouillage qui peuvent être la signification du non-dit. Les
entretiens seront enregistrés à l’aide d’un magnétophone et transcrits tels quels.
Le cinquième chapitre va concerner l ’analyse des productions écrites de certains
étudiants choisis pour l ’échantillon, des étudiants ayant une conception négative de
l’erreur, pour relever leurs lacunes, et d’autres ayant une conception positive de l’erreur
pour remarquer s’ils commettent les mêmes erreurs que les autres.
L’étude sera achevée par une conclusion où nous allons reprendre ce qui a été fait
dans les cinq chapitres et essayer d ’ouvrir d’autres horizons de recherche à partir des
résultats tirés des enquêtes.

3
CHAPITRE I
LE STATUT DE L’ERREUR
DANS L’APPRENTISSAGE

4
Chapitre I Le statut de l’erreur dans l’apprentissage
L’évaluation fait intrinsèquement partie de l’apprentissage et tout enseignant rêve
d’une classe-modèle, dans laquelle les apprenants réussissent à chaque épreuve, parce
que la réussite est la preuve de la bonne transmission du savoir. Mais le principe de
réalité nous oblige à tolérer que cela reste un rêve irréalisable sans toutefois éliminer
cette ambition.
L’apprenant confronté à une situation-problème, il cherche à la résoudre sans
commettre des erreurs. Mais avec le temps, l ’erreur a pris plusieurs statuts grâce à la
construction et l’usage de modèles successifs, chacun comportant sa vision du monde,
sa « part de vérité » et aussi ses points négatifs.
Dans ce premier chapitre nous allons aborder la représentation de l ’acte
d’apprendre, le statut de l’erreur à l’école selon les modèles sous-jacents, pour entamer
enfin l’apprentissage par essais et erreurs.

I-1) La représentation de l’acte d’apprendre
Le rejet didactique de l ’erreur correspond en premier lieu à une certaine
représentation de l’acte d’apprendre. Une représentation largement partagée par les
enseignants, les parents et le sens commun.

Quelle est cette représentation ?
L’idée est que si l’enseignant explique, s’il veille au bon rythme, s’il choisit aussi
les bons exemples et si, bien sûr, les apprenants sont pour leur part attentifs et motivés,
il ne devrait -normalement- survenir aucune erreur. Il s ’agit d’un mécanisme régulier et
progressif qui se mettrait en route quand on apprend bien sans détour, ni retour.
Les apprentissages sont alors conçus comme des découvertes calmes, étales, sans
aventures, soubresauts ni passions. Et c ’est sans doute pour cela que l ’école valorise
chez les apprenants les qualités correspondantes, préférant ceux qui effectuent
régulièrement et silencieusement leur travail à ceux qui prennent des risques sur des
chemins de traverse.
De façon plus imagée, Philippe Meirieu dit la même chose quand il identifie dans
les représentations banales de l ’apprendre « la métaphore du récipient que l ’attention
permettrait d’ouvrir à des savoirs que l ’on déverserait méthodiquement, ou encore la
métaphore de la pyramide bien régulière où, heure après heure, leçon après leçon,
5
Chapitre I Le statut de l’erreur dans l’apprentissage
viendraient se poser les connaissances acquises et qui permettraient de se hisser
jusqu’à la classe supérieure ».1

I-2) Le statut de l’erreur

I-2-1) Le statut négatif
En vertu d’une telle représentation les erreurs ne peuvent avoir d ’autre statut que
celui de « ratés » d’un système qui n ’a pas correctement fonctionné et qu ’il faut
sanctionner et cela se traduit de plusieurs façons :
Premièrement, dès qu’une erreur est perçue, le réflexe quasi pavlovien, c’est bien
de souligner, de barrer la faute sur le cahier ou la copie. Avant même de savoir si cela
aura quelque utilité en termes didactiques, nous nous sentons incapables d ’agir
autrement. On n’y échappe pas parce que cela touche à l ’identité professionnelle, à
l’idée que nous nous faisons de l ’action et des devoirs de l ’enseignant ; les apprenants
verront au moins que « j’ai corrigé », peut être aussi les parents et l’administration dont
on craint le jugement, si par malheur on a «laissé passer des fautes ».
Deuxièmement, les erreurs repérées chez les apprenants remettent les enseignants
en question à travers un certain constat d ’inefficacité de l’enseignement donné. Il y a
ainsi «quelque part », de l’agacement et du dépit quand les apprenants commettent ces
erreurs qu’on avait tout fait pour les éviter.
Troisièmement, c’est le vertige ressenti à l’idée de « plonger » dans ce qui se passe
dans la tête des apprenants. Mettre à jour toute cette gangue résistante, cela fait peur à
l’idée qu’on risque de s’y noyer sans plus être en mesure de s ’en sortir. La crainte de
s’engluer nous inquiète sur ce que deviendrait le fil de la progression, tant il est difficile
de mettre bout à bout la logique du savoir et la logique des apprenants. « Eux nous tirent
vers les marécages quand nous aspirons à l ’air des cimes »2.

À cause de ce statut négatif attribué à l ’erreur, cette dernière gêne tant les
apprenants que les enseignants qui ambitionnent de travailler dans des conditions aussi
confortables où l’acte d’apprendre s’y trouve réduit au processus silencieux tout en
survalorisant les savoirs disciplinaires « ceux-ci sont vécus comme un texte intangible

1 P. MEIRIEU, 1988, in ODILE et J.VESLIN, Corriger des copies, évaluer pour former, Hachette, Paris,
1992, p51.
2 J. P. ASTOLFI, l’erreur, un outil pour enseigner, ESF éditeur, Paris, 2004, p12.
6