Maison MEDICALE BON

45 Pages·2008·3.22 MB·French

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La Maison médicale du roi
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Au Moyen Âge, la puissante faculté de médecine de Paris, fondée au XIIIe U ALEXANDRE LUNEL
siècle, régente seule la profession de soigner. La Renaissance marque une L

rupture, qui s’accentue jusqu’au siècle des Lumières; la faculté perd peu à E
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peu son pouvoir, au profit d’un petit groupe de privilégiés appelés
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«médecins de cour», réunis au sein d’une structure concurrente: la N
Maison médicale du roi. À sa tête, le premier médecin du roi, rejoint A
bientôt par un premier chirurgien. X LA MAISON MÉDICALE DU ROI
Le pouvoir de ces deux hommes est considérable parce qu’ils s’occupent E
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de la santé la plus précieuse du royaume: celle du corps sacré du souve-
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rain. Ces hommes, Fagon, Chirac ou Mareschal, bien que très puissants,

restent méconnus: Guy-Crescent Fagon (1638-1718), premier médecin ■
de Louis XIV, était, nous dit Saint-Simon, «de bien des degrés au-dessus
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des ministres»…
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Qu’entend-on par Maison médicale du roi? Dans quelle mesure fonction-

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ne-t-elle comme un véritable «ministère de la Santé» avant la lettre?
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Quel type de médecine pratique-t-elle? Quel est son rôle dans la création

des grandes institutions de santé des XVIIeet XVIIIesiècles contrôlées par la E
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monarchie: Jardin du roi, Collège royal de chirurgie, École de dissection, A
Société royale de médecine? Ce sont là quelques-unes des questions sou- C
levées par cet ouvrage. I
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Dans cette guerre de trois siècles entre Faculté de médecine de Paris et É
Maison médicale du roi, il n’y aura pas de vrai vainqueur: la faculté pari- M
sienne restera jusqu’au bout arc-boutée sur ses privilèges, tandis que la
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Maison médicale finira par conquérir une autorité reconnue sur
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l’ensemble des professions de santé. S
Ce livre éclaire d’un jour nouveau les rivalités entre institutions tradition- I
A
nelles et institutions nouvelles proches du pouvoir royal, alors que se joue M
la révolution scientifique du Grand Siècle.

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Alexandre Lunel est docteur en droit et enseigne l’histoire du droit et des institu-
tions à l’université Paris-VIII-Vincennes-Saint-Denis. Sa thèse consacrée à l’orga-
nisation des professions médicales sous l’Ancien Régime a été couronnée de nom-
breux prix, dont le prix de thèse de l’université Paris-II-Panthéon-Assas.
XVIe-XVIIIe SIÈCLES
LE POUVOIR ROYAL ET LES PROFESSIONS DE SANTÉ
Epoques, collection d’histoire.
ISBN: 978-2-87673-481-4
9 782876 734814
Epoques
Champ Vallon : Diffusion Harmonia Mundi
29€ CHAMP VALLON
www.champ-vallon.com
(TTC France)

ÉPOQUES
ESTUNECOLLECTION
DIRIGÉEPAR
JOËLCORNETTE
Illustration de couverture:
Cortège de médecins, chirurgiens, apothicaires.Caricature de Senemont (XVIIIesiècle).
© 2008, CHAMPVALLON, 01420 SEYSSEL
WWW. CHAMP-VALLON. COM
ISBN978-2-87673-481-4
ISSN0298-4792
Alexandre Lunel
LA MAISON MÉDICALE
DU ROI
XVIe-XVIIIe SIÈCLES
LE POUVOIR ROYAL
ET LES PROFESSIONS DE SANTÉ
(MÉDECINS, CHIRURGIENS, APOTHICAIRES)
Champ Vallon

PRÉFACE
Jean-Louis Harouel

«Royauté et modernité médicale en France du XVIeau XVIIIesiècle», tel aurait
pu être le titre de ce livre. C’est bien en effet de cela que traite Alexandre Lunel
dans la magnifique étude d’histoire du droit et des institutions qu’il a consacrée à
la politique de la royauté d’Ancien Régime à l’égard des médecins, chirurgiens et
apothicaires, qu’il rassemble sous le vocable actuel mais bien choisi de «profes-
sions de santé». Il montre comment l’État monarchique a su favoriser la pénétra-
tion du progrès scientifique au sein de ces professions, permettant ainsi aux habi-
tants du royaume de bénéficier à la fin de l’Ancien Régime de professionnels de
santé aussi efficaces, grâce à la modernité de leur savoir, que cela était permis par
le degré des connaissances scientifiques du temps.
Au demeurant, dans ce domaine comme dans les autres, l’action modernisa-
trice de l’État monarchique ne s’est pas faite de manière linéaire. Elle a dû
emprunter des cheminements complexes, contournant les obstacles institution-
nels et juridiques que la royauté n’estimait pas possible d’écarter purement et
simplement. Telle était la conséquence de l’«organisation corporative» de la
France de l’Ancien Régime, de son caractère de «nation organisée» mis en évi-
dence par François Olivier-Martin. Le royaume se composait d’une infinité de
groupements territoriaux, sociaux, professionnels, chacun de ces corps intermé-
diaires possédant ses privilèges et exerçant une certaine autonomie. Certes, juri-
diquement, les privilèges des corps ne pouvaient faire obstacle à la plénitude du
pouvoir législatif du roi. Mais la monarchie, parce qu’elle se voulait légitime et
que les privilèges formaient l’assise majeure de la liberté des sujets du roi,
s’astreignait autant que possible à ne pas les abolir. En revanche, elle s’employait
en cas de besoin à les vider peu à peu de leur substance. Sa démarche n’était pas
celle de la suppression mais du contournement. L’institution vieillie demeurait
en principe intouchée, mais une nouvelle structure était parallèlement créée et
investie des compétences nécessaires. L’Ancien Régime ne réformait pas en sub-
stituant, mais en juxtaposant.
C’est de cette manière que la royauté d’Ancien Régime a assuré le triomphe
progressif de la science médicale moderne. Dans le domaine des professions de
santé, le système corporatif était dominé par la puissante faculté de médecine de
Paris. Or, elle était profondément hostile aux innovations. De fait, «la naissance
de la science moderne», à partir du début du XVIIe siècle, s’est accomplie «pour
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PRÉFACE
l’essentiel hors des universités»1. Les progrès de la science médicale et leur diffu-
sion dans les professions de santé n’ont pu se faire qu’en dehors de la faculté de
médecine de Paris, et qu’en passant outre à son opposition. Celle-ci était d’autant
plus redoutable que la Faculté se trouvait puissamment appuyée par le parlement
de Paris, lequel lui donnait systématiquement raison dans tous les procès nés de
sa résistance à la modernisation. Le Parlement et la Faculté, ces deux grandes
forces d’obstruction, étaient objectivement alliés contre les initiatives de l’État
moderne, représenté en l’espèce par le premier médecin du roi, et plus générale-
ment par le groupe des praticiens au service de la personne du monarque. D’où le
titre retenu pour ce livre: «La maison médicale du roi».
Le terme, il est vrai, n’existait pas sous l’Ancien Régime, mais la légitimité de
son emploi ne fait pas de doute. Les charges des praticiens de cour sont des offices
de la maison civile du roi. Leur chef, le premier médecin (ou archiâtre), est grand
officier de la maison du roi et prête serment entre ses mains. Formant la partie
«médicale» de la maison du roi, les médecins, chirurgiens et apothicaires titu-
laires de charges de cour peuvent à bon droit être rassemblés sous l’appellation de
«maison médicale».
Chef de ce service administratif de cour constitué de praticiens au service du
roi, le premier médecin apparaît comme le principal artisan de l’avènement de la
modernité médicale. Il va devenir le responsable autour duquel s’organise une
véritable politique de la santé publique. De sorte que le terme de quasi-ministre,
appliqué au premier médecin du roi, et au XVIIIesiècle au premier chirurgien, est
parfaitement fondé. Certes, entendu strictement, «ministre» ne s’appliquait
qu’aux membres du conseil gouvernemental par excellence, qui s’est appelé suc-
cessivement conseil des affaires, puis d’en haut, et enfin conseil d’État. Or, tel
n’est évidemment pas le cas du premier médecin. Mais, par extension, et en pre-
nant le terme dans son sens actuel, on a assimilé aux ministres de grands respon-
sables administratifs ayant des rapports directs avec le roi. Déjà, Saint-Simon
considérait que le lieutenant général de police de Paris avait su faire de sa charge
«une sorte de ministère». Et Bernard Barbiche estime que «le surintendant
puis directeur général des bâtiments […] avait rang quasi ministériel»2. On
peut légitimement en dire autant du premier médecin, qui avait ses entrées très
faciles auprès du roi, et dont l’action s’étendait à l’échelle du royaume. C’est par-
ticulièrement net pour le célèbre Fagon, qui fut pour une bonne part à l’origine
du premier grand texte réglementant les études médicales et l’exercice de la pro-
fession dans tout le royaume, l’édit de Marly de 1707.
Il est bien évident qu’il faut beaucoup nuancer ce schéma. Comme toujours, la
réalité historique est infiniment plus complexe que les représentations que l’on
peut s’en faire. En particulier, il faut nuancer l’antagonisme entre le premier
médecin et la faculté de Paris, dont furent issus plusieurs archiâtres, et notam-
ment Fagon. Il faut nuancer aussi l’idée d’une royauté pratiquant le contourne-
ment systématique des obstacles juridiques et institutionnels. À plusieurs
reprises, vers la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle surtout, il est arrivé qu’un arrêt du
Conseil tranche dans le vif, en général au détriment de la Faculté.
1. B. Saint-Sernin, Le Rationalisme qui vient, Paris, 2007, p. 140.
2. Les Institutions de la monarchie française à l’époque moderne, Paris, 1999, p. 242.
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PRÉFACE
Les historiens des facultés de droit sont longtemps restés absents du champ
immense du droit de la santé sous l’Ancien Régime. Mon regretté maître Jean
Imbert a superbement montré l’exemple pour un domaine voisin et connexe, par
ses célèbres travaux d’histoire du droit hospitalier. Puis, tout récemment, Céline
Pauthier s’est lancée dans l’histoire du droit médical, avec sa belle thèse sur
l’exercice illégal de la médecine à la fin du XVIIeet au XVIIIesiècle. L’existence de
ce travail pionnier n’enlève cependant rien au caractère également pionnier de la
thèse d’Alexandre Lunel. Son cadre chronologique est beaucoup plus large, et sa
problématique entièrement différente. C’est l’étude de la laborieuse mais bien
réelle construction de l’État moderne et de son droit dans le domaine de la santé
sous l’Ancien Régime, sur fond d’histoire de la science médicale. Alexandre
Lunel démonte, analyse et présente tous les éléments juridiques et institutionnels
d’un tableau historique complexe et mouvant, dont les principaux acteurs sont la
royauté, le premier médecin et autres praticiens royaux, le Parlement, la Faculté,
ainsi que les professions de santé à Paris et dans le reste du royaume. Cette large
et ambitieuse recherche est fondée sur d’impressionnants dépouillements
d’archives et sur une masse immense de sources imprimées, documentation
énorme que l’auteur a remarquablement su dominer. D’où l’importance scienti-
fique de son apport, servie par une écriture vive et enlevée en même temps que
précise, qui rend aisée et agréable la lecture de cet ouvrage au contenu souvent
technique.
La thèse d’Alexandre Lunel, dont la rapide publication a été unanimement
souhaitée par son jury de soutenance, cumule les récompenses1. En l’accueillant
dans sa collection «Époques», notre collègue Joël Cornette met à la disposition
des chercheurs, mais aussi du public intéressé par l’histoire de la médecine et de
son droit, un grand travail savant qui révèle tout un pan presque inconnu de
l’histoire du droit et des institutions de la France.
Jean-Louis HAROUEL
Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris-II)
1. Prix de thèse de l’Université Panthéon-Assas (Paris-II), prix de l’Académie nationale de médecine, prix de la Société
française d’histoire de la médecine, mention honorable au concours de thèses de l’Association des historiens des facultés de droit.