Table Of ContentMARCHED E LA TERREE T LIENS PERSONNELS
DANSLESABRUZZESAUHAUTMOYENÂGE
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347 Tú'Úüó«.rq«'íqei lu«":?l nÍaü bouêuaü,hdiii
Laurent FKI.i,EK, Agnês GRAMAIN
et Florence 'BEBER
LA FO]RTUNE DE mROL
MARCHÉ DE LA TERRE ET LIENS PERSONNELS
DANSL ES ABRUZZESA U HAUT MOYEN AGE
Prenant plane dans une étude plus large
sur le foncLionnemendt u marchéf oncier
durant le haut Moyen Âge et la formation
des prix et leur évolution sur le long ter
me (850-1050), Z,a $oríulle de raro/ se
concentre sur I'étude des relations person-
nelles dans lesquelles s'inscrivent la vente
et I'achat, et vers la compréhension des dif-
férents cadres sociaux des transactions
effectuées.
IJessentiedl e ce livre se construit autour
d'un dossier à tous égards exceptionnel,
peut-être même unique, celui des affaires
de Karol fiasd e Liutprand. ll s'agit d'un per-
sonnage qui a vécu dans les Abruzzes entre
840 et 870 environ et qui a laissé une trace
documentaire importante. Le dossier le
concernant directement ou indirectement
comporte une centaine d'actes de ventes,
d'échanges,d e notices de plaids qui éclai-
rent non seulement la vie et la carriêre de ce
personnage, mais aussi les communautés à
I'intérieur desquelles lui-même et ses des-
cendants ont vécu. En portant I'attention
sur cet homme, sur ses parents, ses voisins
et amas, on a pu reconstruire les réseaux
d'un petit notable et le monde dans lequel
évoluent Karol et les membres de sa famille
que I'on suit sur quatre générations
Le triple point de vue de I'historien, de I'éco-
nomiste et du sociologue permet de retrou
ver le sens des stratégies fonciêres et fami-
liales de Karol et d'éclairer la rationalité de
ses actions. Karol a cherché à s'élever et à
enrichir sa lignée en se servant de sesc apa-
cités économiques, de sesr éseaux et de ses
alliances. ll a échoué. C'est grâce à son
échec et à I'intégration des maisonnées de
ses enfants dans la dépendance de I'abbaye
de Casauria que ses archives naus ont été
transmises : une vie réussie ne laisse pas de
tracei dans ce contexte.L e dossier nous
informe, fínalement, sur les processus de
mobilité sociale et leurs limites dans le
monde carolingien à un échelont rês peu
éclairé par la documentation comme par
I'historiographie, celui de la notabilité
rurale
ISSN 0223-5099
ISBN 2 7283-0730-X
COLLECTION DE L'ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME
347
LAURENT FELLER, AGNÊS GliAMAIN
ET FLORENCEW EBER
LAFORTUNEDEKAROL
MARCHE DE LA TERRE ET LIENS
PERSONNELSDANSLESABRUZZES
AU HAUT MOYEN AGE
ÉCOLE FRANÇAISED E ROME
2005
Feller, Laurent.1955-
haiit XA--,en .â -- / ' . arché de la terre et bens personnels dans les Abruzzes au
École" assed e Rome 2005er, Agnês Gramain et Florence Weber. -- Rime : AVERTISSEMENT
ISBN 2-7283-0730-X ançaise de Rome, ISSN 0223-5099; 347)
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Le texte que naus présentons a été élaboré dans le cadre d'un
CIP programme du LAMOP de Paris-l, UMR 8589, portant sur le marché
Bibtiothêqtle de I'Écote française de Robe
de la terre au Moyen Âge, qui a donné lieu à deux réunions scienti-
fiques, la premiêre en 1999 à la fondation des Treilles, à Tourtour
dans le Var, la seconde en 2001 à Saint-Lambert-des-Bois en région
pansienne.
Lors de la rencontre de 19 99, des introductions présentaient I'é-
tat de la réflexion des uns et des autres au moment de la réunion. On
n'a pas cru bon de toucher à ces textes,p ubliés en dignes ur le site du
LAMOP (Université de Paris 1) : ils présentent en quelque sorte un
intérêt archéo]ogique et proposent ]e cadre qui a, ensuite, guídé ]a
collaboration de notre petit groupe de travail.
En 1999,d 'autre part, Agnês Gramain et Laurent Feller ont éla-
boré une analyseé conométrique ou utilisant les méthodesd e
I'économétrie - des documents du cartulaire de Saint-Clément de
Casauria. Celle-ci a été poursuivie et approfondie entre 19 99 et 2001,
en même temps que, avec Florence Weber cette bois,I 'étude était dé.
sormais dirigée vensl e dossier des actes relatifs à Karol fíls de Liut-
prand et aux membres de sa famille. Cette secondep artie du travail
a donné lieu à une communication à trois voix à Saint-Lambert. Les
deux recherches, nécessairement complémentaires, ont été synthéti-
séesd ans le texte que nous présentons.
Bien évidemment, chacun a son champ de compétences propres
et I'a conservé.U n historien spécialisted u haut Moyen Âge, une
économiste spécialiste d'économétrie de la santé, une sociologue
spécialiste d'ethnographie de la parenté contemporaine : nous avons
fait teus trois le pari du travail collectif, ce qui n'allait pas de soi. Les
intérêts scientifiques, les logiques propres de chacun de nos labora-
toires, ce que ]'on pourrait appe]er aussi ]es intérêts de carriêre au-
raient plutât dü nous détoumer de I'entreprise. Elle a pourtant été
passionnante et pour tous trois fortement dépaysante.
Nutre objectif premier est scientifique. Chacun de nous a senti,
à peu prós au même moment, que sa discipline, histoire, économie,
© - École française de Rime - 2005
sociologie, était incomplête si elle ne tenait pas compte des acquis
ISSN 0223-5099
ISBN 2-7283-0730-X des deux autres. Plus encore, nous partageons une conviction : pour
améliorer la connaissanced es sociétésh umaines et de leur histoire,
3
LAFORTUNE DEKAROL
2 LAFORTUNE DEKAROL
il faut paire converger nos disciplines, constituer, au-delà des spécia-
lisations, une science sociale.V ieux projet porté d'abord par la phi-
losophie, avec Comte et Maré, puis par la sociologie avec Durkheim
et Weber et par I'histoire avec I'école des Annales, repris depuis vinga
ans par diverses branches de la science économique. Vieux projet
toujours d'actualité, rendu plus difflcile et plus urgent par les pro-
grês de nos disciplines.
11n 'y a rien là au fond que de três orthodoxe sinon de três banal. période contemporatne.
Les limites floues de I'actuei et de I'inactuel, la compréhension du
présent par I'étude du passé, la connaissanced u passép ar I'intel-
ligence du présent : tout cela renvoie au programme de Marc Bloch
et, par delà, à la nécessitéd e réaffirmer I'unité profonde des sciences
de I'hommei
Paradoxalement, nous sentons I'objectif aujourd'hui à portée de
la main, à condition de ne pas oublier en route les acquis des péri-
odes précédentes.
Notre tentative a été modested ans sa réalisation : un seul docu-
ment, deux méthodesc omplémentairesd e traitement de ce docu-
ment, s'appuyant sur I'acquis de la critique historique et la remet-
tant parfois en cause. La tentative est cependant ambitieuse dans ses
objectifs. Nous avons voulu montrer qu'une telle coopération était
possible et nous espéronsq u'elle a été fructueuse. Nous offrons au
lecteur, pas à pas, tous les moyens de contrâler les différentes étapes
de notre entreprise. Nous ]ivrons ]e document, ]e codage, la modéli-
sation statistique et les généalogies.N ous souhaitons être discutés et
repris, persuadés que I'entreprise est reproductible et qu'elle será dé-
passée.N otre objectif est avant tout d'apporter un élément de ré-
flexion qui prenhe sa place, par déHnition éphémêre, mais peut-être
active, dans le dialogue dynamique qu'entretiennent nos disciplines.
Un second enjeu de notre recherche a émergéc hemin faisant, à
notre grande surprise. Deux membres du groupe, Agnês Gramain et
Florence Weber, sont spécialistes du contemporain. Elles ont d'a-
bord été attirées par le caractere exotique de la situation abruzzaise
au IX' siêcle. Mais les questions soulevéesp ar la documentation fai-
saient écho à leurs propres incertitudes sur I'avenir. Elles ont décou-
vert une étrange contemporanéité à I'histoire du Moyen Age. Cette
société instable, cette période troublée, aux confins d'un empire fra-
gile; le poids des multiples dépendancesin terpersonnellesl;a
complexité de la circulation monétaire; les bens entre statut social,
appartenance ethnique et pouvoir politique; I'imbrication des mar-
l M. Bloch, .4po/ogie tour /';zisroíre OH méríer d';zfsfoden, 5' édition, Paria
1964,P . 9-16.
INTRODUCTION
À I'origine de la recherche présentéei ci se trouve la question de
la formation du prix de la terre au Moyen Âge. Existe-t-il alors un
prix de marché indépendant des relations personnelles entre les par-
tenaires de la transaction? Au contraire, les relations personnelles,
dês qu'elles existent, jouent-elles un rale dana la formation des prix,
voire interdisent-elles de parler de marché'? Dans ce domaine, une
hypothêse fort ancienne consiste à opposer deux «mondes hos-
tiles »2.c elui du marché par essencei mpersonnel voire abstrait et ce
lui de la chaleur ou de la violence des relations interpersonnelles.
L'oeuvred e Polanyi reposait tout entiêre sur I'idée que la naissance,
au XVlll' siêcle, de ]'économie de marché était concomitante de ]a
naissance de la science économique. Elle a conduit à opposer un
avant et un aprês I'avênement du marché, déniant toute légitimité à
la science économique pour étudier ]es périodes anciennes ou ]es
lieux restésh ors de la modemité oü la sphêreé conomique,d 'aprês
lui, est «encastrée» dans la société. Symétriquement, Polanyi déniait
toute légitimité aux autres sciences sociales pour analyser le <(coeur»
de I'économie de marché : désencastrée,a utonome, I'économie de
marché était I'unique objet mais aussi I'objet par excellence de la
science êconomique.
Aujourd'hui, I'option de nombreux historiens économistese st
inverse: ils dénient toute spécificité aux périodes non contempo-
raines et leur appliquent sana états d'âme les méthodes de la science
économique contemporaine. lls effectuent ainsi un réductionnisme
économique : ]a science économique envahit, avec ses modêles ré-
ducteurs d'interprétation des comportements, I'ensemble des phéno-
mênes sociaux et culturels3 et considere que les comportements hu-
R. Pastor et A. Rodríguez López, Compravenrad e lied'as fn GaZicia./ 14icro
análisesd e !a docümentación deí monastero de Oseira, dons Hispania. 55, 1996
p. 953-1024; Id., Recíprocldades,I nfercambio y jerurquía en /as conzurzidadesm e-
dieva/es, dans Híspania, óO, 2000, p. ó3-101.
2C 'est le terme utilisé par V. A. Zelizer, Trunsacfions írzfimes, dans Genêses
42, 2001, P. 121-144.
3E . P. Lazear, Economia /moeda/zsm, dans (2uarferZyJ ourna/ o/'Econonzics
février 2000, p. 99-146.
6
LAFORTUNE DEKAROL
INTRODUCTION 7
H::S ::$$ghSH: {BSH I'on admet nutre définition des transactions marchandes, ce type
d'analyse s'applique légitimement non seulement aux transactions
entre inconnus, mais encore à toute transaction oü les relations per-
sonnelles, si elles existent, sont mêsese ntre parenthêses. Pour toutes
les autres transactions, la prise en compte des relations qui unissent
les protagonistes,d e I'histoire de ces relations et de leur intégration
dans une structure sociale paus générale s'impose.
Le présent ouvrage est donc le résultat d'une coopération entre
trois approches historique, ethnographique et économique. Plus
qu'un simple croisement de regards sur un objet commun, il s'agit
d'une démarche de recherche commune, construite autour d'un
même document, le cartulaire-chronique de San Clemente a Casau-
ria, qui reposes ur I'intégration progressivea, u fil des questionsp o-
sées par le dossier, de nouveaux outils statistiques et ethnogra-
phiques dans une analyse historique qui fonde et anime I'ensemble
de la recherche. C'est pour tenter d'apporter de nouveaux éléments
de réponse à la question de I'existence et du fonctionnement d'un
potentie] marché de la terre que I'un d'entre nous a fait le périlleux
pari d'articuler sa connaissancei ntime du document et de son envi-
ronnement avec la puissance de synthêse et de réduction de la mo-
délisation économétrique'
Dans la perspective d'une analyse historique qui donne sa place
à la logique économiques ansp erdoed e vue pour autant les per-
sonnese t I'histoire de leurs relations mais aussi la question de la
structure sociale et de son évolution, I'approche ethnographique des
textes offrait alors une solution séduisanted e complémentarité tant
par sa prédilection pour I'analyse des relations personnelles que par
son habileté à restituer la signification des catégories de penséei ndi-
gênes.S i I'histoire de notre pente équipe, ainsi formée pour I'occa-
sion, peut paraítre simple, I'exercice quotidien d'une recherche mo
bilisant des cultures disciplinaires et des compétences techniques
4V oir V. Zelizer cit. non partagéesr elêve d'un équilibre fortement instable que seules
une attention et une énergie de tous les instants peuvent préserver.
Au chapitre des conditions préalables,o n peut aussi noter que le tex-
te polyphonique (et pour autant harmonieux, nous I'espérons) qui
suit doit son existence à I'insouciant enthousiasme de chacun
d'entre nous pour une entreprise exotique à paus d'un titre. Mais
force est de convenir, au risque de froisser le plus modeste d'entre
nous, que la recherche que nous présentons ici est née avant tour
7L e cartulaire de Casauria a en effet servi de socle documentaire à la thêse
d'habilitation de L. Feller, soutenue en 1995,e t dont la présente analyse vient at-
tester, contester ou affiner les méthodes ou les résultats. L. Feller, les .4bmzzes
médiévales.T erritoire. économie et société en ltaiie contrate du IX- au XII. siécle.
nome, 19 98 {Bibtiothêque des Écoles françaises d'Alhêtles et de Robe, 300)
8 LA FORTUNE DE mROL INTRODUCTION 9
d'un cadeau gare : les clefs inaccessibles d'un dossier exceptionnel à actos qui s'y prêtaient matériellementlo, c'est-à-dure ceux qui
sillonner à loisir.
comportaient des indications de prix et de surface. La plage chrono-
Le dossier qui va être commenté ici est tiré d'une source unique logique cholsie a.été, pour cette opération, les IX'-XI' siêcles, parce
à tous les sensd u terme, le cartulaire de San Clementea Casauria8 que le cartulaire fournit, pour cette période, une série documentaire
Le document est bien connu des spécialistes et est fréquemment uti- presque continue d'achais et de ventes, d'une part,.et que les tran-
lisé pour tel ou tel de ses documents ou groupes de documentsPl.l sactionse n causec oncement un espacel imité aux environs du mo-
n'est cependant pas d'un accêsa isé, étant toujours inédit. Nous pro- nastêre de Casauria. Le nombre d'antesu tilisables est somme toute
posons paus loin un bref état de la question. Ce dossier représente important, assez en tout cas pour que procéder à une analyse statis-
une occasion privilégiée pour tester une modalité inédite d'analyse tique soft une tentation, voire une nécessité.L e traitement statis-
des transactions : séparer systématiquement la forme de la transac tique que nous avons appliqué à cette sélection de transactions re-
tion (marchande ou non) et la relation (personnelle ou non) entre les pose sur ]'hypothêse que la formation des prix dépend uniquement
partenaires de la transaction, avant d'observer I'articulation entre de la nature'du bien et du poids économique de I'acheteur ou du
ces deux éjéments, c'est-à-dire procéder à une analyse statistique vendeur, mais ni des relations de parenté, ni des rapports de force
avant de procéder à un questionnement de type ethnographique, ce politiques et statutaires entre les protagonistes. Cette analyse fait
qui revenait à considérer aussi I'objet hors de son contexte pour I'objet de la premiêre partie de cet ouvrage. Elle apporte .son lot de
pouvoir mieux ensuite le réintroduire. ll va de soi que cela n'était te- résultats concemant I'évolution du prix de la terre sur la longue pé-
nable d'un point de vue méthodologique que parce que I'un d'entre riode. les déterminants statistiques du prix des biens vendus et les
naus détenait les clefs de I'interprétation historique du dossier. Le distorsionse ntraínéepsa r I'apparitionà, la fin du IX' siêcled, 'un
risque d'anachronisme,v oire, ce qui est peut-être pare, d'achro- opérateur dominant sur le marché, le premier abbé de Casauria,
nisme, eüt été autrement bien trop grand pour que I'affaire püt sim- Romain (873-884).
plement être envisagée. À I'issue de cette premiêre analyse, plusieurs éléments ont incité
Adoptant une démarche pragmatique, nous avons donc à pousserI 'ínvestigationp lus avant. Tout d'abord, deux tiers des
commencép ar appliquer une analyse décontextualiséeà teus les antes de ventes du IX' siêcle conservés dans le cartulaire ont été lais-
sésd e cõté faute de mentionner prix et surface. Ensuite, rien n'as-
sure que la sélection pragmatique des observations soit légitime, au-
trement dit que les transactions étudiées dans la premiêre partie
; Pauis,B NF, ms. Lat. 5411.C . Manaresi. // Liber instrumentorum seu chro- soient eKectivement des transactions marchandes; enfin, les résul-
nicorum .monasterii Casauriensis de//a iVazíorza/ed i Parlgl, dans Rendíconfí de/- tats obtenus suggêrentq ue le poids économiqued u monastêren e
,'lstituto lombardo di scienw e lettere,C lassed i letteree scienu mordi e storiche. 8Q
suffit pas à expliquer les prix pratiqués. Tous ces éléments justifient
[=3' s., ] 1], ]947, p. 29-62; A. Pratesi, Cronac;zee docanzenfí. dans Fonfi medfoe.
le recours à une analyse du dossier qui tienne compte du contexte
va/í e proa/emarica srodogra/ica..., /, Re/azíoní, Rime, 1976,p . 337-350; Id., l,'ab-
des transactions, tant pour les actes déjà étudiés, afln de vérifier la
bazia di Casauria e it suo cartulario, dana Bullettino abnlzzesed i storia pátria, 8\,
19 81, p. 25-45 ; Id. Z,'anffco arc;zívlo dí Sarz C/emerzfea Casczuda,d ans Srodogra/ia légitimité de I'analyse précédente, que pour ceux négligés busque là,
e ricerca. Relazioni e communicazioni al XVlll« Convegno nazionale archivisüco'. . .. afin de comprendrel eur signification.
Romã, 1981,p . 207-220; Id., préface à [Giovanni dí Berardo,] Liber ínsfmmenfo:
L'ampleur de la documentation empêchait cependant de tenir
nzzms eu c/zroniconzlm morzasredí Cbsauderzsís, L'Aquila, 19 82; L. Feller, l,e ca#zl-
compte de tous les acteurs apparaissant dans le cartulaire durant
Zaíre-c;zroníqudee S.CZemen/ae Cassada, dans O' Guyotjeannin, L. Morelle et
M. Parasse( dir.), Zzs cariz//abres..., Paria, 1993, p. 261-277 (/t4émoiruse f doca- toute la période documentée.D ans ces conditions, il était pausq ue
ments de t'Êcote des chartes). normal de chercher à restreindre le champ et, pour cela, de passer à
9P ar exemple, P. Toubert, Z.ess fmcfures du lafízzm médíéva/.l e l,afíum mé- une autre échelle. Cela signifiait ouvrir un dossier oü le nombre des
ridiotaal et ta Sabine, dü IX' au Xll' siàcle. Rime, 1973 (Bibtiothàqüe des Écoles acteurs serait limité. oü le nombre d'actes à manipulem le serait éga-
/rançatses d'Af;zênes ef de Rama, 221); F. Bougard. la jusrice dons Zer oyaame d'/-
lement et oü, enfin, il existerait une cohérence géographique. Plu-
ra/íe: de /a /in du V7//' síêc/ea a débaf d X7' slêcZeR, ome, 1995 (Bíb/iorbêqlied es
Éco/es/}zzpzçaíses d'Ar;zênes ef de Nome, 291) ; A. Senni$ Pofere cenfru/e e /t)rze Zoca-
li in un temitorto di frontiera : la Marsica tra i secoli Vlll e XII. duns Bulkttino del-
/'/sfÍfafo sfodco ífa/cano ed .4rc/zivío/ 14urarortano, 99/2, 1994, p. 1-77; C. Wick-
nam, Studi stllla società degti Appennini Reli'alto medioevo. Contadini, signori e in- iol l est bien clair que I'ensemble des transactions qui permettent une analyse
sedíanzenfon e/ ferüfodo dí Vazia rSu/monaJ, Bologne, 1982( Quademi de/ Centro décontextualisée ne correspond pas nécessairement a pdorí à I'ensemble des
studi Sarei!eC tarja, 2]. transactionsq ue I'on se doit d'analyserd e la sorte.
10 LAFORTUNE DE KAROL INTRODUCTION
1 1
sieurs dossiersr épondant à ces exigencese xistent dans le cartulaire demment de sens que si I'on peut supposer que la mention ou I'omis-
de Casauria. lls remontent tous au IX. siêcle, à la pério(ie entourant sion de certames informations n'est pas seulement due au hasard, à
immédiatemenct elle de la fondation de Casauriae n 873 Nous la fantaisie du copiste, sa fatigue, son ennui ou encore sa paresse''
avons décidé de .retenir ]e dossier de Karol fila de Liutprand à Vico Cette hypothêse est loin d'aller de soi, parce que I'on ne sait pas né
Teatino, qui est la localité oü il agit et oü, probab]ement i] vit. cessairement quelle forme prenait la documentation pour le copiste
Ce dossier présente plusieurs particularités qui peuvent toumer qui la transcrivait - et quelle était sa marge de manoeuvres ur elle.
à ]'avantage du chercheur. ll concerne uniquement le comté de Chie- Pourtant, un certain nombre de constats plaident dans ce sens. En
ü, à I'extrême .sud du royaume d ltalie; il correspond à une zone géo- effet, les documents contenus dans les munira/na (la premiêre partie
,gl-ra-.p-.h ique oü 'l e comp.o rte nentdel'abbéRomain,telqu' ''"i'l es-t-a''-p pabru du cartulaire) sono,l a plupart du temps, três courts. On pourrait
dans la premiêre partie de la recherche, est particuliêrement surpre- craindre que cette briêveté ne soft pas d'origine mais provienne de
nant. De paus:c ette zone est d'intégration relativement récente à ce qu'ils avaient été recopiés et abrégés au cours de I'une des étapes
I'Empire carolingien, puisque arrachée à ]a principauté de Bénévent du processus d'archivage. Si tel était le cas, quelle pouvait être la si-
en bul' . nutre les conséquencesp ossibles de cette situation péri- gnification des choix opérésp ar les archivistes antérieurs à Giovan-
phérique sur les objectifs de la politique fonciêre du monastêre le ni di Berardo, ]'auteur principal du cartulaire de Casauria? Pour-
comté est aussi une zone de peuplement oti les stratégies propre- quoi les manipulateursd es documentso nt-ils jugé certamesi nfor-
:J: m:E=:'st;i =: : bjiÊ%! l mations inutiles partant du príncipe que le travail a été bien fait et
qu'il répond d'une façon adéquate à des intentions de I'auteur du
tion sociale est certainement paus figée. cartulaire? Enfin, pourquoi ces choix ne sont-ils pas constants dans
Par ailleurs, ce dossier apporte une documentation d'une rale le temps? En effet, la forme même des actes varie sensiblement se-
qualité. La quantité presque incroyable d'informations généalo- lon ]a période concemée. Ainsi, alors que les actes postérieurs à 950
giques données par les actes conservés au cartulaire permet la re- sont presque standardisés, mentionnant quase systématiquement le
constitution des réseauxd 'alliance et donne une intelligibilité au montantd e la transactione t la surfacev endue,le s actesd u
comp.ortementd es différents acteurs, et cela bien que les données IXes iêcle sont eux d'un contenu informatif plus riche mais aussi
soient exclusivement foumies par des actes de vente (vendido), d'é- plus variable. Beaucoup de ces actes anciens ne comportent que des
change (cambzum).ou.des constitutjons de précaires Le dossier pro- mentions incomplêtes de prix et de surfaces, rendant impossible
pose, pour ]a famílle de Karol et celle de ses pausp roches alliés, une I'exploitation statistique. ll est en particulier relativement fréquent
epaisseurg énéalogiqued e trois, voire quatre générations. ll permet que le prix soit donné sans la surface, surtout - mais pas unique-
I'identification certamed u beau-pared e Karo], de ses brus et de ment - lorsqu'un personnagev end tous ses biensi4. Les biens fon-
leurs familles d'origine. Enfin, lorsque I'on prend en considération
I'intégralité des actes du IX' siêcle concernant Viço Teatino. la
complexité des alliances et I'imbrication des politiques fonciêres
sont telles que, dans cet ensemble,f inalement' assezp eu de docu- inclus dans le dossier de Vice Pinnense( le premier et le pausc opieux des cha-
pitres de la plemiêre partie). Cesq uatre ajouts concernent d'une pari la constitu-
ments ne sont pas,ldirecKment ou indirectement, pertinents pour tion de dot d'Helegrina fille de Karol et la vente de cette mime dot à Sisenand le
Salien;d 'autre part la constitution d'une précaire et la renonciation à ce contrat
r:-- Sur cet ensembled e 97 actes,n ous avons procédé à une analyse par Adelelmo fils d'Allo. Nous les avons inclus car nous avions besoin d'eux pour
fine du texte même des actes,n ous interrogeant sur I'absenceo u la comprendre la position d'Adelelmo fils d'Alia et celle d'Helegrina filmed e Karol.
présence de certames informations clefs':. Cette démarche n'a évi- 3G iovanni di Berardo insiste bien sur le caractere pénible et profondément
ennuyeux du labeur du cartulariste. ll a, dit-il, ceuvré cam fngenrí /abafe ef fedío
BNF! ms. Lat. 54]1, fol. l (prologue du cartulaire). La fatigue et I'ennui sont des
fopoí des rédacteurs de cartulaires. lls correspondent cependant à une réalité.
11V oir L. Pellegrini, Z.ac írrà e í/ ferdforío ne//'a/to / edfoevo. dais Cbíeff e ra néed e la pratique d'une activité bien évidemment fastidieuse. Voir. sur le travail
saa provzncla ; sroda, arfa, cu/ru/'a, Chieti, 1990, p. 227-278. ' ' ' '--' desa uteurs de cartulaires, P. Chastang,Z ,Ire,é críre, frarzscnre.l .e fravaí/ des rddac-
:euro .de.c cLRulairese n Bas-Languedoc {Xl-Xlll' siàcles), Paria, 2aQ\ (CTHS-
Histoire]
I'Voar par exemplee n annexe les n' 14, 15, 16 pour des actes auxquels
manque la surface a]ors même que ]es biens sont décrits et le n' 68 pour une
vente de tous les biens d'un individu.
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