Table Of ContentFoi et savoir
suivi de
Le Siècle
et le Pardon
Foi et savoir
suivi de
Le Siècle
et le Pardon
Jacques Derrida
Foi et savoir
suivi de
Le Siècle
et le Pardon
(entretien avec Michel Wieviorka)
Éditions du Seuil
Jacques Derrida
Foi et savoir
suivi de
Le Siècle
et le Pardon
(entretien avec Michel Wieviorka)
Éditions du Seuil
Letexte•Foietsavoir»nétépubliéauxÉditionsduSeuil
danskvolumeLareligion.SéminairedeCapi
(sousladirectiondeJacquesDerridaetGlanai Vattimo)
LeiexteeLeSiècketkon»aétépublié
dansknuméro9(décembre 1999)duMondedescIéhutL Foi et savoir
Les deux sources& la «religion»
aux limites dela simpleraison
ISBN978-2-02-047986-8
(IsBN2-02-023560-9,1 publicationde«Foletsavoir»)
CÉditionsduSeuil/ÉditionsLatent 1996.
pour Foietsavoir».
CÉditionsduSeuil.2001.pour«LeSiècleetkPardon»
etpourlacompositionduvolume
Letbè è h prpl&kiast fle kic4aq kL_, dmda k
aL ccflaiiw.te ewpaihaisflepfldbràepwckpœ
p4pneatab————èIfledeenst.aateœeœ
sla«SciaLJ3S-2ci.flaàOEdièhpiplEit chc.
t
Letexte•Foietsavoir»nétépubliéauxÉditionsduSeuil
danskvolumeLareligion.SéminairedeCapi
(sousladirectiondeJacquesDerridaetGlanai Vattimo)
LeiexteeLeSiècketkon»aétépublié
dansknuméro9(décembre 1999)duMondedescIéhutL Foi et savoir
Les deux sources& la «religion»
aux limites dela simpleraison
ISBN978-2-02-047986-8
(IsBN2-02-023560-9,1 publicationde«Foletsavoir»)
CÉditionsduSeuil/ÉditionsLatent 1996.
pour Foietsavoir».
CÉditionsduSeuil.2001.pour«LeSiècleetkPardon»
etpourlacompositionduvolume
Letbè è h prpl&kiast fle kic4aq kL_, dmda k
aL ccflaiiw.te ewpaihaisflepfldbràepwckpœ
p4pneatab————èIfledeenst.aateœeœ
sla«SciaLJ3S-2ci.flaàOEdièhpiplEit chc.
t
ITALIQUES
1. Comment «parler religion »? de la religion? Singu
lièrement de la religion, aujourd’hui? Comment oser en
parlerau singuliersans crainte ettremblementàcejour?
Et sipeu et si vite? Qui aurait l’impudence deprétendre
qu’ils’agit là d’un sujetà lafois identifiable et nouveau?
Qui aurait la présomption d’y ajuster quelques apho
rismes? Pour se donner le courage, l’arrogance ou la
sérénité nécessaires, peut-être alors faut-il feindre de
faire un instant abstraction, abstraction de tout, ou de
presque tout, une certaine abstraction. Peut-êtrefaut-il
gagersurlaplus concrète etlaplusaccessible, maisaussi
sur laplus désertique des abstractions.
Doit-on se sauver par l’abstraction ou se sauver de
l’abstraction? Où est le salut? (En 1807, Hegel écrit.
«Wer denkt abstrakt? »: « Denken? Abstrakt? Sauve
—
qui peut! » commence-t-ilpar dire, et enfrançaisjuste
ment, pour traduire le cri «Rette sich, wer kann! »
— —
de ce traître qui voudraitalorsfuir, d’un seulmouvement,
et la pensée et l’abstraction et la métaphysique: comme
la «peste ».)
2. Sauver, être sauvé, se sauver. Prétexted’unepremière
question : peut-on dissocier un discours sur la religion
d’un discours sur le salut, c’est-à-dire surle sain, le saint,
le sacré, le sauf, l’indemne, l’immun (sacer, sanctus, hei
lig, holy- et leurs équivalents supposés dans tant de
langues)? Et le salut, est-ce nécessairement la rédemp
ITALIQUES
1. Comment «parler religion »? de la religion? Singu
lièrement de la religion, aujourd’hui? Comment oser en
parlerau singuliersans crainte ettremblementàcejour?
Et sipeu et si vite? Qui aurait l’impudence deprétendre
qu’ils’agit là d’un sujetà lafois identifiable et nouveau?
Qui aurait la présomption d’y ajuster quelques apho
rismes? Pour se donner le courage, l’arrogance ou la
sérénité nécessaires, peut-être alors faut-il feindre de
faire un instant abstraction, abstraction de tout, ou de
presque tout, une certaine abstraction. Peut-êtrefaut-il
gagersurlaplus concrète etlaplusaccessible, maisaussi
sur laplus désertique des abstractions.
Doit-on se sauver par l’abstraction ou se sauver de
l’abstraction? Où est le salut? (En 1807, Hegel écrit.
«Wer denkt abstrakt? »: « Denken? Abstrakt? Sauve
—
qui peut! » commence-t-ilpar dire, et enfrançaisjuste
ment, pour traduire le cri «Rette sich, wer kann! »
— —
de ce traître qui voudraitalorsfuir, d’un seulmouvement,
et la pensée et l’abstraction et la métaphysique: comme
la «peste ».)
2. Sauver, être sauvé, se sauver. Prétexted’unepremière
question : peut-on dissocier un discours sur la religion
d’un discours sur le salut, c’est-à-dire surle sain, le saint,
le sacré, le sauf, l’indemne, l’immun (sacer, sanctus, hei
lig, holy- et leurs équivalents supposés dans tant de
langues)? Et le salut, est-ce nécessairement la rédemp
Foi etsavoir Foi et Savoir Il
tion, devant ou d’après le mal. la fàure ou le péché Y 3. Pour jouer l’abstraction, et l’aporie du sans issue,
Maintenant: où est le mal? le mal aujourd’hui,présente peut-êtrefaut—il d’abord se retirer dans un désert, voire
ment? Supposons qu’il y ait une figure exemplaire et s’isolerdans une île. Etraconter une histoire brève qui ne
inédite du mal, voire du mal radicalquiparaisse marquer soitpas un mythe. Genre. Il était une fiis une seule
« »,
notre temps et nul autre. Est—ce à identifier ce mal qu’on tois, un jour. sur une île OU dans le désert, figure:-vous.
accédera à ce que peut être lafïgure ou la promesse du pour «parler religion », quelques hommes, philosophes,
salutpour notre temps, et donc la singularité de ce reli professeurs, herméneutes. ermites ou anachorètes, se
gieuxdonton dit dans tous lesjournauxqu’ilfait retour? seraient donné le temps de mimer unepetite communauté
A terme, nous voudrions donc relier la question de la à la fàis ésotérique et égalitaire, amicale etfraternelle.
religion à celle du mal d’abstraction. A l’abstraction Peut-êtrefaudrait-il encore situer son propos, le limiter
radicale. Nonpas à lafigure abstraite de la mort, du mal dans le temps et dans l’espace, dire le lieu et lepaysage,
ou de la maladie de la mort, mais aux formes du mal le moment passé, un jour, dater le furtifet l’éphémère,
qu’on lie traditionnellement à l’arrachement radical et singulariser,faire comme si on tenait un journal, dont on
donc au déracinement de l’abstraction, en passant, ,nais allait déchirer quelcues pages. Loi du genre : l’éphémé
ce sera beaucoupplus tard,par celle des lieux d’abstrac ride (et déjà vousparle: intarissablementdujour). Date
tion que sont la machine, la technique, la technoscience le 28février 1994. Lieu une île, l’île de Capri. Un hôtel,
.
etsurtout la transcendance télé-technologique. «Religion une table autour de laquelle nous parlons entre amis,
et mekhanè », « religion et cyberespace », « religion et presque san.s ordre, sans ordre dujour, sans mot d’ordre,
numéricité », « religion etdigitalité », « religion etespace- sauf un mot, leplus clairetleplus obscur : religion. Nous
temps virtuel » :pourmesurerun court traitéà ces thèmes, croyonspouvoirfaire semblantde croire, actefiduciaire,
dans l’économie qui nous est assignée, concevoir une que nous partageons quelque pré-compréhension. Nous
petite machine discursive qui, pour êtrefinie et peifec fusons comme si nous avionsquelque sens commun de ce
tibie, ne soitpas tiop impuissante. que religion veut dire à travers les langues que nous
« »
Afin de penser abstraitement la religion aujourd’hui, croyons (que de croyance à ce jour, déjà!) savoirparler.
nouspartironsde cespuissancesd’abstraction afinde ris Nous croyons à lafiabilité minimale de ce mot. Comme
quer, à terme, l’hypothèse suivante : au regard de toutes Heidegger pour ce qu’il appelle le Faktum dii lexique
cesfi)rces d’abstraction et de dissociation (déracinement, de l’être (à l’ouverture de Sein und Zeit), nous croyons
délocalisation, désincarnation,formalisation, schématisa (ou ci-oyons devoir)pré-comprendre le sensde ce mot. ne
tion universalisante, objectivation, télécommunication, serait—ce quepourpouvoir questionner. et en vue de nous
etc.), la « religion » està lafois dans l’antagonismeréactif interroger à ce sujet. Or, nous devrons y revenir beau
etla surenchère réaffirmatrice.Là où lesavoiret lafoi, la coupplus tard, rien n’estmoinspré-assuréqu’un telFak
technoscience ( capitaliste » etfiduciaire) et la croyance, tum (dans ces deux cas, justement!) et toute la question
le crédit, lafiabilité. l’actedejéiauronttoujours eupartie de la religion renvoie peut-être à peu d’assurance.
liée, dans le lieu même, au noeudd’alliance de leur oppo
sition. D’où l’aporie une certaine absencede chemin, de 4. A l’ouverture d’un échange préliminaire, à ladite
—
voie, d’issue, de salut— etles deux sources. table, Gianni Vatti,no me propose d’improviser quelques